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    Hurricane {FINI}

    Oz Roland
    Oz Roland
    Glandeur appliqué/Sobre à ses heures perdues

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    Message  Oz Roland Dim 10 Oct 2010 - 17:01



      Les yeux fixés sur la boisson, Oz contempla pendant quelques longues secondes les dernières touches de mousse de lait qui restaient et qui se noyaient dans le liquide ambré du cappuccino. Le gobelet en plastique, qui portait les couleurs noir et or du café en bord de mer dans lequel il avait été l’acheter, était brûlant, mais il gardait les doigts résolument vissés autour, quitte à grimacer légèrement de temps à autre sous le coup de la douleur. Les avant-bras nonchalamment appuyées sur la balustrade, il restait debout et croisait de temps à autre machinalement les jambes ; il fixa encore un bon moment sa boisson sans réellement la voir, puis releva la tête en plissant quelque peu les yeux. Juste devant lui s’étendait la plage de sable blanc, quasiment déserte hormis un homme et une gamine haute comme trois pommes qui marchaient en se tenant la main, emmitouflés dans de grosses vestes - il fallait dire que le temps n’était pas vraiment propice pour une séance de bronzage ou de baignade. L’hiver avait comme à chaque fois apporté son froid mordant et son vent glacial sur la ville, et cela se sentait encore plus en bord de mer que dans les rues. La mer était sombre, et les vagues certainement tout aussi froides que le vent s’écrasaient sur le sable dans un rythme machinal, le bruit caractéristique de la houle se mêlant aux cris de quelques mouettes courageuses. Au-dessus de la ligne d’horizon, le ciel s’étendait à perte de vue ; clair, il restait néanmoins d’un gris uniforme, nuageux et sans soleil. Un ciel sans couleurs d’hiver, froid mais tranquille. Oz contemplait ce tableau d’un air plus blasé qu’intéressé, bien qu’il ne soit pourtant pas un habitué de la mer ; Koliam se trouvait plutôt près des montagnes, et depuis qu’il était à Sannom, il avait surtout tendance à arpenter bars, boîtes, restaurants et boutiques divers plutôt que le port. Pourtant, aujourd’hui, il était venu ici. Sans raison précise, à vrai dire. Juste pour se balader, pour sortir, pour passer le temps.

      Il avait dix-huit ans, maintenant. Son anniversaire était passé depuis deux semaines à peine, en fait, peut-être un peu plus. Le 31 décembre. C’est fou ce qu’il pouvait haïr cette date, vraiment. Rien que d’y repenser maintenant, il fronçait les sourcils en baissant à nouveau les yeux sur le gobelet fumant qu’il tenait dans une main. Il ne l’aimait pas, cette date, non, et il aurait préféré l’oublier à jamais, mais il savait que rien n’y ferait. Alors il évitait juste d’y penser trop souvent. Il essayait d’oublier, tout en sachant pertinemment qu’il ne pourrait pas. Et il passait à autre chose. Un instant, il se concentra sur le bruit environnant. Dans son dos, les boutiques, les cafés et les restaurants de l’allée chic du port résonnaient du brouhaha des conversations, des incessants bruits de pas sur les pavés, des portes que l’on ouvrait ou que l’on fermait, des couverts et des tasses que l’on posait sur les tables. Le froid n’empêchait pas les gens de sortir ou de faire leurs emplettes, visiblement. Une agréable effluve de café chaud se mêlait à l’air marin, et Oz se demanda vaguement quelle heure il pouvait bien être. Fin d’après-midi, probablement. Il s’en fichait un peu, à vrai dire, car peu lui importait ; aucun engagement ne le contraignait à quoi que ce soit, c’était ça l’avantage. Il leva la main qu’il avait de libre pour la passer machinalement dans sa nuque, comme s’il voulait s’étirer, et attendit un instant avant de l’abaisser pour reposer son avant-bras sur la balustrade. Il leva ensuite son gobelet chaud, pour avaler une ou deux gorgées agréablement brûlantes de cappuccino, et son regard émeraude se perdit un instant quelque part sur la ligne d’horizon, entre mer et ciel. Le vent glacial mordait la peau de son visage et balayait ses cheveux d’ébène, mais là encore, il n’en avait pas grand-chose à faire. Il portait un jeans sombre, évidemment de marque, avec quelques chaînes en guise de ceinture, comme toujours, et le caban noir d’une élégance certaine qu’il portait au-dessus de sa chemise lui seyait à merveille, mais ne lui tenait pas vraiment chaud - c’était ça, le soucis du vêtement : on devait toujours trancher entre beauté ou utilité. Et comme on pouvait s’en douter, Oswald Roland se souciait bien plus de l’apparence d’un vêtement que de son utilité, bien évidemment.

      Il écarta d’un geste une mèche de cheveux gênante qui venait lui cingler le visage, et avala une nouvelle gorgée de cappuccino en se demandant ce qu’il pourrait bien faire, maintenant. Il avait passé l’après-midi à déambuler en ville, dans les boutiques surtout, mais la foule avait naturellement fini par le gonfler et il avait choisi de jeter son dévolu sur un endroit un peu moins fréquenté, un peu plus aéré. Le port, donc. Ou plutôt l’allée bordée de boutiques chics en bord de mer, évidemment, pas du côté des entrepôts. Il aurait pu rentrer à l’auberge, aussi. Mais bizarrement, ou pas si bizarrement que ça, il s’y sentait moins à l’aise depuis que Sila avait débarqué, il y avait de ça maintenant quelques semaines, pas beaucoup. C’était comme si à chaque fois qu’il la voyait, son passé lui sautait brutalement à la figure. Il voulait juste oublier, il voulait juste qu’on lui foute la paix, bordel. Mais visiblement, c’était trop demander. Il n’était plus aussi tranquille, donc, et il ne pouvait décemment pas faire comme si la situation lui allait très bien : on l’avait forcé à capituler, putain ! D’accord, d’accord, il avait dit à Sila qu’elle pouvait rester, ok, mais il n’empêche qu’il était contrarié. Terriblement contrarié. Et donc, quand il n’était pas occupé à être particulièrement horripilant et terriblement exaspérant, il délaissait l’auberge pour sortir et déambuler, errer sans but. Comme aujourd’hui. Il avait beau avoir visité un bon nombre de boutiques, il n’avait rien acheté - rien ne l’intéressait. A part ce cappuccino, histoire de se réchauffer et de se désaltérer en même temps. Et maintenant campé face à la plage, face à la mer, il se laissait naturellement aller à quelques pensées. Il se disait qu’il faisait particulièrement froid, cet hiver. Il se disait que ce cappuccino n’était pas mauvais. Il se demandait s’il n’avait pas oublié un collier dans la chambre de Vasco. Il songeait au 31 décembre. Il se demandait avec qui il allait dormir ce soir : dans sa chambre avec cette enquiquineuse de Sila, ou avec ce chieur de Vasco histoire d’emmerder l’enquiquineuse et de profiter l’air de rien de quelques câlins ? Il avait envie d’acheter une nouvelle veste. Et une nouvelle paire de soleil, même si ce n’était pas la saison. Il pensait à avant. Et il songeait à maintenant. Il se demandait ce qu’il pourrait bien foutre de sa vie, en tant que gosse de riche minable sans aucune ambition. Il se disait que tout cela était lassant. Et agaçant. Contrariant, fatiguant, déprimant. Et il se demandait pourquoi il n’avait rien de mieux à foutre que penser connement.

      Nouvelle gorgée de cappuccino. Tourner la tête du côté, et flinguer un passant des yeux pour avoir osé passer trop près de lui - soit à trois mètres. Puis dévier à nouveau le regard vers la mer, levant furtivement et mécaniquement les yeux au ciel d’un air agacé. Il avait fait un effort, aujourd’hui. Il ne s’était pas pris la tête avec trop de monde ; il y avait juste eu ce type dans la boutique de fringues de marque, qui lui avait effleuré le bras soi-disant sans faire exprès, et cette tête à claques de serveur qui avait fait un sourire en coin insultant en lui servant ce cappuccino. Non, vraiment, il avait fait un effort. Il pouvait être fier de lui. Sauf que non, en fait. Putain, ce qu’il pouvait se faire chier, décidément. A l’instant même où il se faisait la réflexion, des bruits de pas lui indiquèrent qu’on venait de pénétrer dans son espace vital, soit toute la zone autour de lui dans un rayon de cinq mètres au moins. Quelque soit l’intrus, il était inconscient et suicidaire. Oz tourna à peine la tête, juste assez pour pouvoir jeter une œillade haineuse au nouveau venu. Et il ne lui fallut pas plus de deux secondes pour le reconnaître ; cette haute silhouette, ce visage qu’il connaissait bien, ces cheveux dorés, ce bandeau noir, cet œil unique d’un bleu bien plus éclatant que celui de la mer, tout lui était familier depuis longtemps maintenant. Vasco était sacrément doué. Pour débarquer à l’instant même où il se disait s’emmerder, s‘entend. Pour un peu, Oz en aurait même esquissé un sourire. Sauf que non, il ne fallait pas qu’il ait l’air heureux de voir le musicien débarquer, vous pensez bien. Il se contenta donc d’hausser légèrement un sourcil, en le jaugeant d’un regard rapide et blasé, puis tourna à nouveau la tête vers les eaux froides de la mer, sans enlever ses avant-bras de la balustrade qui séparait l’allée marchande de la plage. Là, avant de porter le gobelet encore chaud à sa bouche, il laissa échapper quelques mots du bout des lèvres, d’un air éternellement blasé et ennuyé.

      - Tu me caches le soleil.

      Ce qui était une manière typiquement ozienne comme une autre de dire bonjour, certainement. Car effectivement, il n’y avait pas un seul rayon de soleil dans le ciel. C’est juste qu’il ne pouvait pas se comporter normalement envers Vasco Fair - au lieu d’agir comme le meilleur ami lambda qu‘il serait certainement s‘il était normal, il frappait, insultait, blessait et snobait une personne qui, finalement, comptait bien plus qu‘énormément à ses yeux. Juste parce qu’il était Oz. Et qu’il avait sa manière bien à lui de gérer les relations humaines, en allergique des sentiments qu’il était.


    Dernière édition par Oswald Roland le Sam 23 Juil 2011 - 17:58, édité 1 fois
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    Message  Vasco Fair Dim 10 Oct 2010 - 18:09

      Soleil. Le soleil était aveuglant, ce jour là. Chaud, délicieux, merveilleux. Non, Vasco ne planait pas : car malgré le temps on ne peut plus désagréable, de plus en plus froid au fil des jours, un véritable soleil l’illuminait de l’intérieur depuis quelques jours. Il avait rencontré une femme qu’il trouvait merveilleuse en tous points : certes, il avait dû bien plus que l’effrayer et elle ne pensait sûrement pas la même chose de lui, mais il ne pouvait s’empêcher de la déifier. Cela ne faisait pas très longtemps qu’il avait rencontré Edryn Edge et la certitude était déjà bien ancrée dans son esprit : elle était la femme de sa vie. Oui, même si elle ne sortait pas avec lui, oui, même s’il s’était prit un râteau – râteau on ne peut plus évident, vous en conviendrez parce que franchement, demander sa main à une demoiselle dont on ignorait jusqu’au nom, ce n’était pas vraiment des plus fins, ni la meilleure des solutions pour finir effectivement avec cette femme. Oui, le rockeur était heureux : non seulement il avait trouvé la femme de sa vie – ne lui restait plus qu’à la convaincre qu’ils étaient faits l’un pour l’autre – mais en plus, il avait un meilleur ami qui lui était très précieux malgré son mauvais caractère. Il avait également rencontré, il n’y a pas si longtemps, une adorable demoiselle avec qui il avait coutume de s’allier dans des combats verbaux faussement acharnés contre son fameux meilleur ami – et à l’issue desquels il était pratiquement toujours sûr de se prendre quelques coups de la part du brun frustré. Et enfin, à vingt deux ans – bientôt vingt-trois, mon pauvre Vasco qui haïssait l’idée de devenir de plus en plus vieux – il voyait sa popularité s’étendre de plus en plus. Non seulement parce qu’il était un modèle d’amabilité, de sociabilité. Mais également parce qu’il était un virtuose, c’était indéniable : ainsi, les voies de la célébrité musicale semblaient se dégager de plus en plus face à lui. Plusieurs fois on avait demandé ses services au cours de soirées, et il avait de moins en moins de mal à régler à temps sa chambre à l’auberge – il n’avait cependant pas encore assez d’argent pour se permettre le luxe d’avoir son propre appartement mais, éternel optimiste, il savait que le jour viendrait où il quitterait cette auberge, à regrets car il adorait y vivre. Vasco Fair avait donc tout pour être heureux, et il en profitait jusqu’au bout : son positivisme constant l’empêchait de s’attarder sur le fait qu’il n’était pas en couple avec Edryn, que son meilleur ami et lui passaient énormément de temps à se disputer et que la gloire qu’il commençait à connaître pouvait n’être qu’éphémère.

      Que faisait Vasco Fair ce jour là, dehors ? Et bien, justement : on avait demandé ses services dans un restau un peu chic sans non plus être trop snob où il avait joué du piano – des classiques certes, mais c’était toujours un plaisir pour l’artiste de se lancer sur cet instrument qu’il aimait tant – en échange de quoi il reçu une paye qui lui permettrait de s’assurer quelques jours de plus à l’auberge. Il n’avait bien entendu pas utilisé son propre piano, trop gênant à transporter – certes, il aurait pu le déplacer à l’aide des rudiments de magie qu’il connaissait et qu’il savait appliquer uniquement grâce à l’utilité que cela avait pour son piano – mais celui du restaurant. Leur pianiste officiel était malade ou il ne savait quoi encore, et c’était grâce à un de ses nombreux contacts qu’il avait trouvé ce travail d’un jour. On lui avait prêté un costume une fois là bas, le blondinet n’étant pas habillé suffisamment chic autrement : et puis il s’était de nouveau changé, renfilant son pull noir à col roulé, assez fin et qui moulait sa taille fine, ainsi que son vieux jeans abîmé. Sa veste en cuir sur le dos, son écharpe noire autour de son cou et sa guitare qu’il ne quittait presque jamais récupérés, il quitta le restaurant, après avoir invité aimablement les propriétaires à le recontacter si besoin était. Ensuite, il avait erré sans vraiment de buts dans les rues : il aimait rester à l’extérieur, avoir l’impression d’être libre ainsi. Et puis, en ce moment, Oz s’attardait de moins en moins à l’auberge, sans que Vasco ne comprenne pourquoi. C’était ennuyeux, car il fallait qu’il lui parle d’Edryn. Seulement, notre adorable crétin, une fois en présence de son meilleur ami, avait tendance à oublier qu’il ignorait encore qu’il avait rencontré celle qu’il voulait épouser. Et donc, cela faisait quelque jours qu’il négligeait régulièrement et involontairement de le tenir au courant. Sila ? Il semblait à Vasco qu’en ce jour et à cette heure, elle était encore à la danse. Il ne savait plus exactement. Mais il ne souhaitait pas rentrer tout de suite, quoi qu’il en soi. Il aimait l’extérieur, même lorsqu’il faisait aussi moche qu’en ce jour, le soleil brûlant de toute façon encore dans sa poitrine.

      Vasco salua quelques personnes qu’il connaissait, s’attarda de temps à autres pour leur parler un peu. Il n’entra pas dans un seul magasin, n’ayant rien à acheter en particulier et n’ayant de toute façon pas l’argent nécessaire à la futilité. Oh, il pensa bien entendu à acheter quelque chose pour Edryn, des chocolats ou des roses, il ne savait pas : mais il ignorait encore ses disponibilités et préférait attendre un peu, histoire de ne pas l’effrayer tout de suite. Il continua donc à errer, sans vraiment faire attention aux endroits où il se serait égaré deux ans auparavant, alors qu’il ne connaissait pas la ville – contrairement à maintenant où il était presque capable d’en refaire le plan les yeux fermés. Il rêvassa un peu et ce jusqu’à ce qu’une silhouette connue lui serve de point d’ancrage pour revenir sur Gamaëlia. Oz. Son meilleur ami, l’une des personnes les plus importantes à sa vie. Il ne savait pas comment aurait été sa vie s’il ne l’avait pas rencontré. Il préférait ne pas le savoir. Malgré son caractère insupportable, Oz était une part importante de son soleil, de lui. Il ne savait pas s’il comptait vraiment pour Oz : mais ce dont il était certain, c’est qu’Oz était d’une importance capitale dans sa vie à lui. C’était le moment ou jamais pour lui annoncer sa rencontre avec Edryn, n’est-ce pas ? Son projet de mariage. Il s’approcha de lui, doucement, sachant parfaitement à quel point Oz pouvait être misanthrope et s’en moquant complètement. Il sourit doucement alors qu’Oz prit la parole. Non, il n’était pas offusqué d’un tel manque de politesse. Cela faisait plus de deux ans maintenant qu’il en avait l’habitude, tous les jours ou presque. Il était vraiment content de le voir.

      C’est donc un grand sourire que l’homme au bandeau adressa au gosse de riche, un de ses sourires joyeux qui n’avaient qu’une visée : réchauffer cœur et âme, quel que soit la température extérieure et quel que soit le moment. Comme un soleil, oui. Vasco n’était-il pas un soleil lui-même, réchauffant, réconfortant ? Il retira son écharpe, déjà réchauffée par son propre corps, de son cou, doucement. L’enroula avec la même douceur autour du cou du cadet Roland qui sentirait sûrement ainsi son parfum, léger mais facilement identifiable pour quelqu’un comme l’ex-dalavirien qui le connaissait par cœur. Un geste de petit sacrifice naturel envers Oz chez Vasco, une énième manifestation de sa profonde amitié pour l’insupportable enfant qu’il était resté. Le sourire demeurant sur ses lèvres, Vasco posa sa guitare à côté de lui pour s’adosser à la balustrade où il s’accouda, juste à côté d’Oz. Et puis son œil unique se fixa sur ce visage connu par cœur qu’il voyait de profil, ses mèches d’ébènes mêlée par le vent. Il devait lui parler. Le sourire toujours flottant sur ses lèvres, il prit donc la parole…


      « … Tu faisais quoi, là, seul ? »

      … Echec Vasconnien. Juste parce qu’il avait un mauvais pressentiment à propos de la situation qu’il allait créer, oui. Il ne savait pas du tout comment Oz allait réagir à l’annonce fatidique. Au lieu de prendre le risque de le voir, il avait donc posé une question à son ami sur un ton toujours aussi doux, et bien entendu, réellement intéressé : Vasco ne comprenait pas vraiment pourquoi Oz s’isolait de plus en plus ces derniers temps. Mais cette question, Vasco le savait, ne pourrait le détourner éternellement du sujet important qu’il devait impérativement aborder avec Oz.
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    Message  Oz Roland Lun 11 Oct 2010 - 20:38

      Oz fronça les sourcils en sentant ce contact agréable sur la peau de sa gorge ; mais qu’est-ce qu’il foutait encore, ce crétin de musicien ? Ah, il lui donnait son écharpe. D’accord. Le gosse de riche conserva ce léger froncement de sourcils qu’on lui connaissait si bien, alors qu’il baissait le nez pour fixer d’un œil suspicieux l’écharpe noire que Vasco lui enroulait autour du cou, comme si elle pouvait dissimuler un piège quelconque. Il releva ensuite doucement les yeux sur le jeune homme blond, hésita à faire une remarque agressive et plus ou moins pertinente, puis se ravisa tout compte fait. D’accord, il trouvait que ce geste faisait terriblement gamin -et il n’était PAS un gamin, que diable !-, mais il avait froid et cette écharpe réchauffait agréablement la peau de son cou, qui subissait jusqu’alors les assauts du froid mordant. Sans parler du fait que l’odeur de Vasco imprégnait tout le tissu, et que c’était une odeur incontestablement agréable, rassurante, qu’il connaissait bien. Il ne fit donc pas un geste pour l’enlever, et laissa tout simplement le rockeur faire avant de boire une nouvelle gorgée de cappuccino brûlant. Son regard s’attarda sur une vague qui s’écrasait sur le sable, avant de revenir sur Vasco avec indolence. Ce dernier avait posé sa guitare, qu’il traînait toujours constamment où qu‘il aille, et s’était adossé à la balustrade juste à côté de lui. Oz fut tenté de lui ordonner de dégager avec son amabilité habituelle, juste par réflexe conditionné, mais il n’en avait pas envie, en fait. C’était agaçant. De s’attacher autant. Il retint un soupir, dévia un instant le regard sur quelques passants en tournant la tête, puis revint à Vasco alors que celui-ci lui posait une question. Ce qu’il faisait ici, seul ? Ah, bonne question. Sur le coup, Oz faillit rétorquer un « Qu’est-ce que ça peut bien te foutre ? » par la force de l’habitude, mais préféra plutôt se pencher sur la question, pour une fois. Ce qu’il faisait là. Il observait la beauté du paysage, voyons. Tsss, quelle question débile, en fait. L’ex-dalavirien tourna à nouveau la tête vers la mer, et sans vraiment s’en rendre compte, leva sa main libre sur l’écharpe qu’il portait désormais pour la coller sous son nez, et humer légèrement l’odeur qui s’en dégageait. Avant d’abaisser doucement la main et de coller les doigts sur le gobelet, pour les réchauffer, et répondre finalement dans un soupir, de manière machinale. Qu’il aille se faire foutre avec ces questions à la con, ouais.

      - Je ne sais pas.

      …Non mais quelle réponse débile. Il avait vraiment répondu ça ? Putain, il fallait qu’il fasse gaffe, ça craignait. La vérité ne s’échappait pas aussi facilement de sa bouche, d’habitude ; il faisait justement toujours très attention à ce que ce ne soit pas le cas. Merde alors. Ce qu’il foutait ici, tout seul ? Ouais, il ne savait pas. Il ne savait pas bien pourquoi il éprouvait ce besoin de s’isoler, bien qu’il se fasse une idée - il ne faisait certainement que fuir, fuir ce passé et cette réalité qu’on lui brandissait sous le nez. Et alors ? Ça ne regardait personne. Et surtout, il ne voulait absolument pas tendre de perche à Vasco ; ce mec avait la désagréable manie de savoir très bien comment s’y prendre pour lui tirer les vers du nez, sans parler du fait qu‘il devinait toujours quand quelque chose n’allait pas. Il était doué, ouais. Et Oz ne savait pas vraiment si cela l’agaçait véritablement ou si, au contraire, ça le rassurait d’une certaine façon. Peut-être un peu des deux. Bref, cette réponse ne pouvait en aucun cas être acceptable. Le gosse de riche, qui avait dévié un instant le regard vers l’horizon avec un froncement de sourcils, s’empressa de le ramener sur celui qui était, quoi qu’il puisse dire, son meilleur ami et plus encore. Pour modifier ce qu’il avait dit, donc. Juste parce qu’il était un éternel insatisfait.

      - Enfin si, je profitais du calme. Relatif. Bref.

      Putain, il enchaînait les réponses débiles, décidément. Profondément agacé par ses propres propos, Oz leva les yeux au ciel dans une mimique que là encore, on lui connaissait bien, puis porta le gobelet de cappuccino à ses lèvres pour boire deux gorgées. Oui, bref. Il n’y avait pas là matière à s’attarder. Il poussa un soupir irrité, léger, puis posa son coude sur la balustrade pour pouvoir coller son menton dans la paume de sa main, avec nonchalance. L’air à la fois renfrogné et blasé, il suivit des yeux quelques secondes le père et la fille qui s’éloignaient le long de la plage, et se demande furtivement pourquoi il ne pouvait pas s’empêcher de sans cesse mépriser autrui. Non pas qu’il veuille changer, au contraire ; il en était hors de question. Le changement était proscrit dans la doctrine ozienne. Il était, avait toujours été et resterait à jamais un sale chieur égocentrique, égoïste, blessant, asocial, méprisant, arrogant, possessif, jaloux, lâche, minable et seul, entre autres et notamment. Et ça ne changerait pas, parce que ça ne pouvait pas changer. Point à la ligne. Ou tout du moins était-ce ainsi que fonctionnait encore et toujours Oz, dans cet esprit cassé et renfermé qui avait peur de changer. L’intéressé se désintéressa bien vite de cette image écœurante de filiation bienheureuse et niaise à souhait que représentait pour lui le couple de personnages, et balaya les vagues d’un regard morne sans vraiment les voir, comme pour effectuer une transition avant de revenir sur Vasco - genre je ne me presse pas, non, je suis blasé et tu me fais chier, ouais, même si c‘est pas vrai mais bon. Bref. La tête quelque peu inclinée du côté pour mieux voir Vasco, Oz s’efforça de conserver ce masque blasé et ennuyé qui, à ses yeux, lui allait si bien, et haussa légèrement un sourcil en prenant la parole pour cette fois poser une question, à son tour.

      - Et toi, qu‘est-ce que tu fous là ?

      D’accord, d’accord, Vasco avait le droit de se balader où il voulait. Quoique. Il pouvait bien poser la question, non ? Et d‘ailleurs, ce n’était pas là une question polie et intéressée, de toutes façons - ce n’était que pure réplique inquisitrice et ennuyée. Oui, oui. Bon, ou pas, d‘accord. Bref, il se demandait vraiment ce que faisait Vasco par ici, en fait - il n’était pas occupé avec une fille de son harem, avec un de ses innombrables potes ou avec son amante de guitare ? Hm, bizarre.
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    Vasco Fair
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    Message  Vasco Fair Mer 13 Oct 2010 - 18:47

      Vasco eut un frisson : maintenant démuni de l’écharpe qu’il avait laissé à son meilleur ami et malgré son col roulé, il avait un peu plus froid. Oh, le froid ne l’avait jamais vraiment dérangé : il ne faisait après tout pas des plus chauds, là où il avait grandi. Mais le vent était un véritable traitre. Il se glissait entre les fines, très fines mailles de son pull pourtant si serré, pour lui geler la peau, comme s’il n’avait réellement aucun échappatoire et que le froid recherchait à recouvrir son soleil. Mais son soleil brillait bien trop fort pour cela, et sa veste en cuir était un excellent coupe-vent. Non, bien que son visage et, maintenant, sa gorge, souffraient du froid à cause du vent cinglant, cela ne le dérangeait nullement. Il aimait le froid qui lui rappelait tant d’excellent souvenir de sa ville natale, tout autant qu’il aimait le soleil qui lui permettait de sortir comme il l’entendait et sans risquer quelque maladie que ce soit. Et puis, son précieux meilleur ami était protégé de ce froid mordant, lui. C’était l’essentiel pour Vasco, toujours aussi prévenant envers ses proches. En plus et sans le savoir, il s’épargnait la corvée qu’était un Oz malade : oh bien sûr il avait déjà eu à le supporter dans cet état mais ce n’était bien entendu pas pour préserver ce qui lui restait – en somme, pas grand-chose – de santé mentale qu’il tenait à ce qu’Oz n’ait pas trop froid, mais bien parce qu’il tenait à lui et à ce qu’il préserve sa santé, tout simplement.

      Vasco attendit donc un petit instant avant qu’Oz ne lui réponde : il s’était attendu à se faire jeter, comme d’habitude. Il fut donc terriblement surpris de l’honnêteté avec laquelle Oz lui répondit. C’était effectivement un fait suffisamment rare pour qu’il s’en alarme : son regard auparavant joyeux se teignit d’inquiétude alors qu’il gardait la tête tournée vers son ami. Que se passait-il exactement depuis quelques jours pour qu’il soit aussi étrange ? Pourquoi est-ce qu’il semblait qu’il se soit mis à éviter le plus que possible l’auberge, qui était pourtant son lieu de vie, SON auberge, LEUR auberge, quoi ?! Non, vraiment, Vasco ne parvenait pas à comprendre : et plus que tout il s’inquiétait de ne pas réussir à interpréter les actes d’Oz, plus que tout il se sentait on ne peut plus inutile à ne même pas être capable de comprendre pourquoi son meilleur ami était bizarre ces derniers temps. Cette soudaine sincérité ne fit qu’en rajouter au sentiment d’étrangeté général qu’éprouvait Vasco : ne vous y méprenez pas, il était ravi qu’Oz soit honnête avec lui. Mais le gosse de riche l’avait bien plus habitué à des faux semblants et à des mensonges parfois terriblement flagrants. Il était donc normal que son meilleur ami soit alerté d’entendre le gosse de riche aussi honnête envers lui. Oui, quelque chose clochait, Vasco en avait désormais la certitude : restait à découvrir quoi, et, avec ce qu’il devait lui annoncer, il ne pourrait être immédiatement au courant. Il lui fallait procéder par étape : d’abord, dire à Oz qu’il avait trouvé celle qu’il voulait épouser. Ensuite, lui demander ce qui n’allait pas, et insister pour savoir. Un court instant, le musicien se demanda s’il ne valait mieux pas procéder dans l’autre sens : mais il savait que s’il se laissait accaparer par le problème d’Oz, il finirait par oublier ce qu’il avait à lui dire. Et si jamais Oz apprenait la chose par erreur, par quelqu’un d’autre… Ce serait un véritable drame, l’égocentrique serait terriblement vexé. Et ça, Vasco ne le voulait surtout pas, en plus de vouloir qu’Oz soit le premier au courant de cette merveilleuse rencontre qu’il avait faite il n’y a pas si longtemps en arrière.

      Oz compléta, modifia sa réponse. Une nouvelle fois, sa sincérité était claire et proprement effrayante pour tous ceux qui connaissaient un minimum Oswald Roland. Vasco se jura de tirer tout cela au clair. Le silence s’installa, troublé essentiellement par le bruit des vagues et les éclats de voix d’une fillette un peu plus loin. Vasco attendait : Oz, comme toujours, tenait les rênes et le blond se contentait de le suivre, d’obéir à ses moindres caprices tout en mettant certaines limites, fragiles et changeante mais on ne peut plus présentes à l’esprit de chacun d’entre eux, c’était bien là une chose certaine – cela n’empêchait pas, parfois, Oz de les dépasser allégrement, mais c’était là une toute autre affaire qui ne nous concernait pas… Pour l’instant. Vasco, attendant tranquillement une continuité à leur conversation qui, il en était sûre, viendrait malgré l’air éternellement blasé et agacé d’Oz, leva une main un instant pour jouer avec le briquet atypique qu’il portait autour du coup avant d’envoyer balader cette main, tranquillement et légèrement, sur une mèche de cheveux d’Oz pour la remettre plus ou moins en place. Ce dernier geste tout à fait inutile puisqu’aussitôt qu’il reposa son coude sur la balustrade derrière lui, une nouvelle bourrasque de vent vint l’appeler à se rebeller de nouveau. Peu importait, Oz le savait, Vasco était particulièrement tactile et ce contact, aussi léger et succinct fut-il, lui avait encore un peu réchauffé le cœur : Vasco brûlait de l’intérieur tant il était heureux, en ce jour, bien que le nuage de la contrariété d’Oz vienne troubler un peu les rayons brûlants du soleil qui tentait tant bien que mal de rendre tant que possible heureux son entourage entier, même s’il devait se sacrifier lui-même – ces sacrifices ayant tout de même une limite.

      Et puis, au bout d’un certain moment, Oz lui retourna la question initialement posée : que faisait-il ici ? Oula, longue histoire, et pas forcément des plus simple en plus. Vasco leva la tête vers le ciel, un instant. C’était vraiment un temps pourri qu’il vivait là, à croire qu’ils allaient connaître une tempête ou autres, surtout en vue de la puissance des vents. Etrangement, la perspective d’être dehors au beau milieu d’une tempête l’inquiétait moins que la réaction d’Oz lorsqu’il apprendrait que Vasco aimait Edryn Edge d’un amour fou, inconditionnel. Puis il reposa ses yeux sur Oz, avant de répondre à sa question avec un petit sourire, toujours aimable : car même si c’était une longue histoire, ce qu’Oz voulait, en règle générale, Vasco le lui offrait.


      « Oh, c’est assez compliqué. En fait aujourd’hui j’ai été embauché dans un petit restau, là bas, La Perle de Jade, tu vois ? Sûrement, il a une bonne réputation, quand même. Ils ont un problème avec leur pianiste, alors grâce à un pote, je crois que c’est le fils du gérant ou quelque chose comme ça, j’ai pu décrocher le repas de midi et avoir un bon salaire, quoi. Après j’aurais pu rentrer à l’auberge mais j’ai décidé de me balader, j’avais pas trop envie de rentrer tout de suite, en fait, je sais même pas pourquoi. Et puis je t’ai vu, ça tombe bien, je te vois de moins en moins à l’auberge, ces temps-ci, alors forcément que je suis venu te parler. Tu me manques, tu sais ? »

      Disais le mec qui dormait assez souvent avec son meilleur ami. Soudainement, Vasco prit un air nettement plus sérieux, quoi que sans quitter son sourire.

      « … Et puis en plus, j’ai quelque chose d’important à te dire. »

      Bavard, notre Vasco ? C’était là l’un de ses moindres défauts. Quoi qu’il en soit, il avait l’impression d’avoir à l’instant tendu le fouet à Oz pour se faire battre : ne tenait plus qu’au temps de lui dire si en effet, Oz saisirait ce fouet ou si au contraire, il refuserait de s’en emparer. Avec cette abominable sensation d’être au bord du gouffre, Vasco adressa un sourire à la fois courageux et encourageant à Oz.
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    Message  Oz Roland Sam 16 Oct 2010 - 21:19

      Exaspération, satisfaction et perplexité. Ce fut ce que provoqua, entre autres et notamment, la longue explication de Vasco au sujet de sa présence en ces lieux.

      Au départ, ce ne fut que désintérêt total ; désireux de conserver son air blasé pour préserver éternellement les apparences, Oz afficha un air particulièrement ennuyé en baladant vaguement son regard sur l’horizon, comme s’il n’écoutait que d’une oreille. Embauché dans un petit restau, donc, la Perle de Jade. S’il voyait ? Ouais, vaguement, vu que l’établissement avait au moins l’avantage d’avoir une réputation de restaurant plutôt chic. Sauf qu’Oz n’y avait jamais mis les pieds : ce n’était pas encore assez chic à son goût, voyez-vous. Sans parler du fait qu’il avait désormais l’habitude de prendre la plupart de ses repas à l’auberge, auberge qu’il considérait même tout naturellement comme la sienne depuis le temps qu’il la côtoyait. L’exaspération perça lorsque Vasco mentionna en toute innocence un « pote » à lui. Comme à chaque fois ou presque que ce dernier le faisait, Oz leva les yeux au ciel dans une mimique parfaitement agacée, avant de boire une gorgée de cappuccino pour se concentrer sur autre chose. Vasco était trop sociable. Beaucoup trop sociable, même, aux yeux du gosse de riche. Il avait une ribambelle incroyable et incommensurable d’amis, un nombre incalculable de filles dans son harem personnel et même des fans qui se faisaient de plus en plus nombreux au fur-et-mesure qu’il grimpait l’échelle du succès en tant qu’artiste ; des tas et des tas de gens qu’il appréciait, côtoyait et aimait, donc. Beaucoup, beaucoup, beaucoup trop sociable. Paradoxe incarné, Oz refusait de s’avouer meilleur ami de Vasco Fair comme il refusait d’avouer qu’il y était irrémédiablement attaché (quoi qu’à ce sujet, il avait finalement réussi à en toucher deux mots à Sila, le jour de l’arrivée de cette dernière, mais il préférait oublier le plus vite possible cet épisode honteux de sincérité qui le rendait encore malade aujourd‘hui), mais en même temps, a contrario, le fait de savoir que Vasco avait un tas de personnes importantes dans sa vie l’exaspérait et surtout, lui faisait mal. Pourquoi ? Il ne le savait pas vraiment lui-même. C’était juste que ça faisait mal, de se savoir pas aussi important qu’on l’aurait voulu. C’était juste que ça faisait mal, cette haine constante envers les autres. C’était juste que ça faisait mal, cette colère sourde qui côtoyait la jalousie mordante et qui avait à peu près le même effet qu’un ouragan sur les sentiments. C’était juste que ça faisait mal, d’aimer, tout simplement. Et d’ailleurs, l’amour sous toutes ses formes était sans aucun doute la pire lie de l’humanité. Il le savait, mais ça n’empêchait rien.

      L’exaspération perdura quelques secondes, et le reste de l’explication se perdit dans l’air car Oswald n’écoutait déjà plus, trop occupé qu’il était à fusiller l’horizon du regard en maudissant inutilement le reste du monde au sujet de la sociabilité écœurante de certains. Ce ne fut que lorsqu’il y eut la question que son intérêt refit surface, avec une certaine passivité, et le gosse de riche distrait plissa quelque peu les yeux. « Tu me manques, tu sais ? » Comment ça, il lui manquait ? Pourquoi il lui manquait ? Il ne voyait pas bien ce que cette question sans attente de réponse venait faire ici et maintenant, au juste. Puis la lumière fut une fraction de seconde plus tard, et il fit le rapport avec le fait qu’il ait tendance à déserter l’auberge plus souvent que d’habitude, ces derniers jours. Et donc, de la sorte, il manquait à Vasco. Tiens donc. Et ce fut ainsi que la pointe de satisfaction légère, éphémère mais réelle chassa l’exaspération d’une pichenette. Ecoutant à nouveau, Oz se redressa imperceptiblement en prenant appui sur ses avant-bras, et arrêta de fusiller le pauvre horizon d’un regard incendiaire pour se répéter stupidement et avec satisfaction qu’il manquait à Vasco, donc qu’il avait probablement un peu plus d’importance que le pote cité précédemment, et donc que son absence n’était pas passée inaperçue, et donc que ça l’emmerdait comme ça lui faisait plaisir, et donc qu’il emportait une petite victoire contre les autres, et donc que blablabla, etc. Le bout de ses lèvres s’étira de manière si légère que c’en fut certainement imperceptible, mais Oz préféra plonger sans attendre dans son gobelet encore chaud pour ne prendre aucun risque et noyer cette espèce d’esquisse ratée de sourire satisfait dans le cappuccino. Et alors qu’une gorgée lui réchauffait agréablement l’œsophage, il percuta soudainement quelque chose : si Vasco faisait cette remarque en disant qu’il lui manquait, cela voulait dire qu’il avait remarqué qu’il s’isolait davantage ces derniers temps, de toutes évidences. Et donc, si Vasco l’avait remarqué et le faisait justement remarquer, cela signifiait qu’il… Merde. Bon, ce n’était pas sûr. Avec un peu de chance, cet abruti de blond qui se la jouait parfois détective et meneur d’interrogatoire le laisserait tranquille, sur ce coup-là. Avec beaucoup de chance, en fait. Putain. Hors de question de s’expliquer, il rêvait.

      La satisfaction s’envolant aussi vite qu’elle était venue, Oz écarta le gobelet de ses lèvres et fronça très légèrement les sourcils. Il se racla furtivement la gorge, rajusta l’écharpe autour de son cou d’un geste désinvolte, puis tâcha de faire un rapide récapitulatif. Vasco avait donc été jouer du piano dans un restau avec un de ses innombrables potes, et il avait remarqué qu’Oz était moins souvent présent à l’auberge ces derniers temps, donc il profitait de le croiser au port pour le coller. D’accord, c’était enregistré. La perplexité arriva ensuite, lorsque Vasco ajouta qu’il avait quelque chose d’important à lui dire. Oh, cela n’étonna pas Oz outre mesure. Il pouvait déjà voir la connerie arriver, quelle qu’elle soit. C’était toujours comme ça. « J’ai quelque chose d’important à te dire… Mon ozouzou d’amour en mohair, je t’aaaaaimeuh ♥ », ou « J’ai quelque chose d’important à te dire… Je m’ennuiiiiie ♥ », ou encore « J’ai quelque chose d’important à te dire… J’ai un nouvel amiiiii ♥ », ou bien alors « J’ai quelque chose d’important à te dire… Oh, tiens, je ne sais plus, dommage ♥ » ; vous voyez le genre. Ouais, il pouvait déjà voir la connerie venir, mais en même temps, la perplexité dominait. Pourquoi ? Parce que les traits de Vasco s’étaient peints d’une expression incontestablement plus sérieuse, et souvent, lorsque ça arrivait… et bien, c’est que ça allait vraiment être sérieux. Et bizarrement, Oz n’aimait jamais ça. De quoi Vasco pouvait bien vouloir lui parler ? De Sila, de sa nouvelle condition de déserteur ? Sincèrement, il espérait que non. Il n’avait vraiment pas envie d’en parler. Un instant, il fut tenté de le remballer sans attendre et de se barrer tout de suite pour bien faire comprendre que oui, il était fermé à toute discussion. Mais d’un côté… C’était peut-être un de ces cas où Vasco prenait un air sérieux pour que sa connerie ait encore plus d’impact après coup, allez savoir. Et ce sourire tendre, il ne pouvait décemment pas annoncer quelque chose de terrible, pas vrai ? Ouais. Ce serait ridicule de fuir, sur ce coup-là. Oz souleva un de ses avant-bras de la balustrade pour s’appuyer sur l’autre et se tourner vers Vasco. Haussant un sourcil interrogateur et tapotant légèrement deux doigts sur le gobelet qu’il tenait encore, il répondit donc quelque chose de tout à fait banal qui signifiait clairement qu’il attendait la suite.

      - Ah ouais ?

      Et s’il avait l’air de s’en foutre complètement, il n’en restait pas moins perplexe et surtout curieux, au fond.
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    Message  Vasco Fair Ven 22 Oct 2010 - 19:32

      Vasco n’avait pas quitté son meilleur ami des yeux lors de sa longue tirade explicative de sa présence en ces lieux. C’était d’abord un désintérêt évident. Bien entendu. Après tout, quel intérêt Oz pourrait trouver dans le bavardage du blond ? Et cependant, malgré cette pensée, il continuait à jacasser encore et encore. Comme pour compenser la nature plus taciturne de son meilleur ami, qui semblait parfois réduire ses mots au strict minimum – sauf quand il s’agissait de vous disputer, auquel cas il explosait son « forfait mots » du jour. Et puis à la mention de son ami, Oz exprima de l’agacement avec une mimique qui était désormais familière à Vasco. Blondie n’arrivait pas à comprendre, non, pourquoi Oz réagissait ainsi à chaque fois qu’il évoquait une connaissance. Il ne parvenait à concevoir la jalousie brûlante qu’éprouvait Oz à l’égard de tous les proches de son meilleur ami, tout simplement parce qu’il était incapable de ressentir un tel sentiment. Certes, la jalousie n’était pas totalement exclue de lui, mais elle était réservée à la femme qu’il aimait – aujourd’hui Edryn – et elle ne parviendrait à le rendre vraiment jaloux qu’en deux cas : soit en couchant avec un autre devant ses yeux, soit en tombant follement amoureuse d’un autre. Et là, il ne pouvait pour l’instant rien faire puisqu’ils n’étaient de toutes façon pas ensemble. Mais la possessivité maladive qu’éprouvait Oz, non, jamais il ne l’avait ressentie. Quoi qu’il en soit, mettons les choses au clair : non, Vasco n’avait pas de harem. C’était ni plus ni moins une invention d’Oz pour critiquer sa sociabilité débridée. Vasco ne s’en offusquait plus, il en avait désormais l’habitude. Certes il côtoyait énormément de filles : mais franchement, il ne couchait pas avec toutes et ne projetait pas de le faire un jour ! Certes, il avait fini par sortir avec quelques unes de ses amies de Sannom, lors de ces deux ans et quelques où il était resté sur la ville. Mais c’était une époque définitivement révolue, maintenant qu’il avait trouvé Edryn. Et puis, encore une fois, il n’avait pas couché avec toutes, c’était grotesque !

      Bref. Cette histoire de harem n’était que pure divagation d’un esprit Ozien frustré. Il était vrai que Vasco connaissait et appréciait énormément de gens. Mais il y avait tout de même certaines personnes avec qui il préférait rester par rapport aux autres. Et oui, Oz en faisait partie : il était même le
      number one de ces personnes, sur Sannom… Ex-æquo avec Edryn, en fait, désormais. Il ne les aimait pas du même amour, on ne pouvait pas dire qu’ils avaient exactement la même place dans son cœur : mais cette place était similaire et restait très importante. Bien sûr Edryn ne l’aimait pas encore comme il l’aimait : mais il avait confiance en l’avenir. Quant à Oz… Oz restait bien trop souvent une énigme aux yeux de Vasco, concernant son affection envers son autoproclamé meilleur ami. Il n’arrivait pas à comprendre qu’il l’aimait tant, alors même qu’il saisissait parfaitement tout l’amour qu’Oz éprouvait pour Sila – et surtout, le trouble dans lequel il était plongé depuis qu’elle était arrivée dans la capitale. Non, il n’arrivait pas à concevoir qu’il était également important pour Oz, cela lui semblait irréel et impossible. Et il se faisait ainsi mal tout seul, ce dépendant affectif, avec cette folle idée de ne pas compter pour celui qui était l’homme le plus précieux à ses yeux – la femme étant désormais Edryn, et ce bien qu’il ne la connaisse que depuis très peu de temps. Et puis, étrangement, l’exaspération Ozienne disparu : elle laissa place à une expression un peu plus… Sereine, peut-être ? En tout cas, il se calma sans que Vasco comprenne à quel point il était satisfait – pour un pas grand-chose que Vasco ne pourrait deviner, d’ailleurs, puisqu’il restait dans l’idée qu’il ne comptait pas. Et puis la contrariété arriva, inexplicable elle aussi. Oui, Oz restait une énigme pour notre pauvre petit Vasco qui l’aimait tant.

      Et puis, quand Vasco lui annonça qu’il avait quelque chose d’important à lui dire, Oz daigna enfin se tourner vers lui. L’angoisse, toute aussi inexplicable que le comportement d’Oz, s’emparait de plus en plus de lui. Il avait vraiment l’impression qu’il allait faire une grosse, une très grosse bêtise. Alors qu’il ne ferait que dévoiler les causes d’un bonheur nouveau à son meilleur ami, et lui confier une chose importante dans sa vie. En général, un meilleur ami se réjouissait de ce genre de nouvelles, non ? Oui. Sauf que Vasco savait parfaitement qu’Oz n’était pas un meilleur ami normal. Leur relation en elle-même n’était pas très nette, d’ailleurs. Sa peur était donc on ne peut plus légitime. Un instant il fut tenté de fuir : faire un câlin par surprise à son meilleur ami qui s’était enfin tourné vers lui, sourire, lui annoncer qu’il l’aimait à la folie. Eh, le câlin, c’était pas une mauvaise idée… Non seulement parce qu’en temps que gentil petit homme hyper-câlin – terroriste des câlins, paraît-il – il en avait terriblement envie mais en plus parce que cela empêcherait Oz de s’enfuir ou autre réaction du genre qui ne plairait pas du tout à Vasco. Vasco qui se demanda brièvement si Oz lui enverrait son reste de cappuccino dessus une fois l’annonce faite : il espérait bien que non. Un peu de courage. Il lui fallait juste un peu de courage, à notre petit Vasco, lui qui était pourtant plus connu pour ses esquives diverses que pour une habitude de faire face à l’adversité – et plus encore lorsque cette adversité était le DragOz. Inspirer un grand coup, garder cet air sérieux malgré ce sourire tendre et sincèrement heureux qui ne quittait pas ses lèvres.


      « … J’ai rencontré la femme de ma vie, Oz. Elle s'appelle Edryn Edge. On va se marier. »

      Oui, il s’était informé du nom de famille de sa belle – il avait croisé le visage aimé dans un Gamazine qu’il avait feuilleté un soir mais, loin de lire l’article pour se renseigner sur ce qu’on racontait sur elle, il se contenta le s’informer de son nom. Ne cherchez pas à comprendre la logique Vasconienne, cela valait mieux pour vous. Et puis parce qu’il sembla se souvenir d’un tout mini gentil très innocent mais néanmoins crucial détail…

      « … Enfin, quand elle se sera rendue compte qu’on est fait l’un pour l’autre. »

      Vasco ne doutait de rien, oui, et il attendait maintenant la réponse d’Oz avec un mélange de crainte et d’excitation : réagirait-il au pire ? Ou au contraire le surprendrait-il en se réjouissant pour lui ? Closer to the Edge : c’était exactement ça.
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    Message  Oz Roland Dim 7 Nov 2010 - 19:28

      Il était intéressant de constater que toutes les bombes, qu’elles soient thermonucléaires, atomiques, à hydrogène ou émotionnelles, avaient à peu près le même mode de fonctionnement et le même impact… incommensurablement dévastateur. On ne les voyait pas arriver, elles ne tombaient pas tout de suite. Et quand elles tombaient enfin, il y avait cet espèce d’instant de flottement qui s’étirait pendant le laps de temps, de quelques secondes ou fractions de secondes seulement, avant l’impact. Un instant de flottement où l’on se disait que non, impossible. L’énormité de la chose, l’incongruité de la situation et l’horreur de la vérité vous poussaient tout naturellement à vous réfugier dans le confort rassurant de l’impossibilité. C’était impossible, donc inutile de s’inquiéter. C’était impossible, donc inutile de chercher à comprendre. C’était impossible, donc inutile d’avoir peur. Sauf que l’impossible devenait parfois, cruellement, possible. Et cette déchirure de la réalité, cette erreur sournoisement glissée dans l’équation géante de l’univers, cette chose inacceptable, irrecevable, inenvisageable, tout ça, tout ça se passait réellement. La bombe était lâchée, la bombe tombait, la bombe explosait, la bombe décimait. Et l’on ne pouvait absolument rien faire contre, à part subir.

      Oz ne comprit pas tout de suite. Toujours appuyé nonchalamment sur la balustrade, il ne se départit pas immédiatement de son air éternellement blasé, ennuyé ; une légère esquisse de perplexité se peignit sur son visage, tout au plus, alors qu’il plissait un peu les yeux. Comment ça, la femme de sa vie ? De quoi diable pouvait-il bien parler encore ? Par défaut et habitude, le gosse de riche songea tout d’abord que Vasco voulait lui parler d’une des innombrables filles qu’il avait la chance d’avoir dans son large cercle d’amis. Il n’aurait de cesse de chanter ses louanges, avec cette niaiserie et cette naïveté qui lui étaient propres, il passerait son temps à se demander quel cadeau lui offrir, il n’arrêterait pas de la complimenter, qu’elle soit là ou non, encore et toujours, comme à chaque fois. Sauf que bien évidemment, Oz n’en avait strictement rien à foutre : pire, que Vasco montre l’affection gargantuesque qu’il pouvait avoir pour des tas et des tas de gens l’exaspérait au plus haut point, à force. Donc il ne comprenait pas bien pourquoi cet imbécile se donnait la peine de lui parler d’une fille. Il le faisait exprès pour l’énerver ou quoi ? Franchement, allez savoir ; avec Vasco Fair, on n’était jamais sûr de rien. Et puis, qu’est-ce qu’il pouvait bien en avoir à foutre du nom de la fille en question ? Edryn Edge, hein ? Ouais, et alors ? Ça devait lui parler, il devait s’en intéresser, il devait trouver ça joli, peut-être ? Et puis quoi encore ? Pendant une seconde, Oz paru sur le point de soupirer d’un air agacé et de lever les yeux au ciel, mais il se ravisa et se contenta de froncer un peu les sourcils, finalement. Parce que les mots exacts employés par Vasco se frayaient tout doucement leur petit bout de chemin jusqu’à sa conscience. La femme de sa vie, hein ? Non, vraiment, maintenant qu’il y pensait, il ne se souvenait pas que le musicien ait déjà employé cette expression au sujet d’une fille. Excepté peut-être au sujet de sa mère, Eileen, qui était, s‘il avait bien compris, la personne la plus importante aux yeux de Vasco ; Oz l’avait effectivement appris à force d’insister pour tout savoir de celui qu’il refusait de considérer comme son meilleur ami, mais qu’il jugeait tout de même être sa propriété. Donc cette formulation sonna le premier signal d’alarme dans son esprit, qui n’était déjà plus tout à fait aussi serein qu’avant - à supposer que l’esprit d’Oswald Roland puisse réellement être serein, complètement, s‘entend. Et puis, la seconde d’après, la bombe fut lâchée avec des termes concis et on ne peut plus clairs. Quatre mots, et la déflagration enflammait tout sur son passage ; elle décimait, elle détruisait, elle massacrait. Quatre mots, tout simplement, et ils avaient le même effet qu’une véritable bombe ; sauf qu’au lieu de décimer toute une population entière, elle se contentait de déverser son horreur dans un seul esprit. En l’occurrence ici, celui d’un gosse de riche arrogant, méprisant, blessant, lâche, exécrable et proprement insupportable qui, quoiqu’il puisse en dire, était tombé comme tout le monde dans le piège inextricable de l’attachement.

      Se marier ? C’était lui ou ce verbe paraissait encore plus grotesque que d’ordinaire dans la bouche de Vasco ? Oh, Oz n’avait jamais douté du fait que le jeune homme nourrisse le rêve de se marier un jour : il était l’archétype même de ces personnes qui voyaient dans le mariage et la vie de famille un bonheur sans faille - aux yeux de l’associable de service, tout du moins. Ce n’était donc pas vraiment le fait que Vasco soulève l’idée du mariage qui le choquait, c’était… c’était qu’il impose ça comme une réalité. Pire, il l’imposait comme une vérité, une réalité inéluctable : ils allaient se marier. Il n’y avait aucun peut-être, il n’y avait aucun doute, aucune question, il avait juste cette assurance tranquille, cette chose qui faisait que ce serait comme ça et pas autrement. Il devait donc y avoir une erreur quelque part. Pas vrai ? Oui, c’était impossible, tout bonnement impossible. Trop incongru, trop soudain, trop ridicule. Il le savait, que Vasco allait sortir une connerie. Ça ne pouvait qu’en être une, de toutes façons. Il ne pouvait pas être sérieux sur une connerie pareille, plus monumentale encore que l’Empire State Building américain. Il n’avait pas le droit d’être sérieux sur un sujet pareil. Il n’avait aucunement le droit de… Non, non, inutile de s’alarmer. Inutile de s’alarmer, puisqu’il y avait une erreur quelque part. Cet étau qui se contractait légèrement dans la poitrine, il était inutile qu’il se manifeste ; il devait s‘en aller, s‘en aller au plus vite. C’était du mal pour rien, c’était… C’était juste une fausse alerte. Juste une connerie vasconienne. Il ne pouvait pas en être autrement. Sourcils toujours froncés, Oz garda de la sorte le silence un moment ; la perplexité chassa le mépris sur son visage d’albâtre, et il fixa un instant l’œil unique de Vasco comme pour y trouver l’assurance que ce n’était qu’une blague, une chose sans importance, sans réelles répercussions. Il parut profondément hésitant, troublé peut-être, puis finit par détourner le regard ; sourcils à nouveau froncés, il fixa un instant l’horizon grisonnant, s’efforçant de se convaincre que tout cela ne pouvait être qu’un grotesque malentendu. Il souleva son avant-bras de la balustrade pour l’agripper plutôt à pleine main, puis pivota en essayant d’avoir l’air tranquille pour se retrouver de nouveau face à la mer. Là, il accrocha les vagues de ses yeux émeraudes comme pour y trouver un appui plus ou moins tangible, puis finit par esquisser une espèce de sourire léger et éphémère, au coin des lèvres, désabusé et cynique ; le sourire de celui qui n‘y croit pas, qui ne veut pas y croire.

      - Tu déconnes.

      C’était obligé. Il baissa les yeux pour les poser sur le gobelet qu’il tenait encore, et il observa pendant quelques secondes le reste de cappuccino qui s’y trouvait, se faisant soudain la réflexion qu’il n’avait même plus envie d’en boire ne serait-ce qu’une gorgée. Imperceptiblement et machinalement, ses doigts se resserrèrent davantage autour du verre ; il attendit deux ou trois secondes, puis tendit le bras en avant. Il écarta les doigts, et laissa tout naturellement le gobelet tomber. Peu importait pour lui de jeter ça sur le sable, oui, au-delà de la balustrade : il n’avait jamais vraiment été un exemple de respect et de bienveillance, il faut dire. Oz suivit du regard l’objet dans sa chute, puis finit par poser à nouveau ses mains sur la balustrade. Il ne releva pas les yeux tout de suite, et songea pendant une seconde à se barrer tout de suite. Parce qu’il avait beau tenter de se convaincre que c’était impossible, il savait déjà au fond de lui que Vasco allait réfuter ce qu’il venait de dire. Parce qu’il y avait cet air sérieux avec lequel il l’avait dit. Ce sourire, aussi, mais surtout, ce sérieux. Qui ne présageait rien de bon pour lui, à cet instant. Il n’avait rien envie d’entendre. Et Oz songea que oui, il aurait vraiment, vraiment mieux préféré que Vasco déconne.
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    Message  Vasco Fair Jeu 11 Nov 2010 - 21:44

      Voler toujours plus près du soleil, jusqu’à s’en brûler les ailes : tel Icare, Vasco prenait d’énormes risques, non qu’il soit particulièrement ambitieux mais que le soleil en question, particulièrement brûlant, presque piquant, n’était autre qu’Oz. Oui, quoi qu’on en dise et malgré toute son obscurité, Oz était un soleil brûlant : les gens qui lui étaient le plus éloignés ne souffraient pas de sa présence, exceptés parfois quelques uns de ses rayons qui se trouvaient un tant soit peu destructeurs. Ceux qui restaient à une distance raisonnable avaient parfois le privilège de profiter de son rayonnement de gosse de riche, quoi que ce phénomène s’était plus vu à l’époque où il était à Koliam que maintenant qu’il était à Sannom, mais risquaient de le voir s’éloigner pour retomber dans l’obscurité totale à tous moments. Et puis il y avait des Icare inconscients. Ces quelques rares personnes dont Vasco faisait partie. Il gravitait sans cesse autour d’Oz, toujours plus près, à s’en brûler les ailes et à en chuter jusqu’à être gagné par le désespoir glacial et mortel. A risquer de tout perdre juste pour être avec lui, le soutenant sans cesse et demeurant son plus fidèle valet. Juste parce que la capacité à aimer de Vasco était proprement affolante, et que les gens sur lesquels il jetait son dévolu avec le plus d’ardeur, tels Oz et Edryn, n’étaient pas près de se débarrasser de lui. Oz était une personne pour laquelle Vasco était prêt à bien des sacrifices. Les limites qu’Oz se plaisait à franchir étaient mouvantes, instables. Oui, Vasco pouvait aller très loin pour Oz. Mais il y avait des choses qu’il ne sacrifierait jamais, que ce soit pour Oz, Edryn ou même Eileen : déjà, il ne sacrifierait aucun d’entre eux pour l’autre. Ensuite, il ne pourrait sacrifier la musique pour aucun d’entre eux également. Ces deux interdits étaient les seuls vraiment tangibles à l’esprit de Vasco. Il pouvait même presque sacrifier sa vie, lui qui en était pourtant profondément épris, pour ces trois personnes. Oui, il était capable de s’attirer les problèmes les plus sombres pour les personnes qu’il jugeait les plus importantes dans sa vie, et Oz en faisait indéniablement partie.

      Oz prit un certain temps avant de réagir. L’angoisse grimpait en flèche dans le cœur de Vasco : il avait bien conscience que cette annonce était trop inattendue, trop… Etrange, dans la façon où il l’avait formulée, pour qu’Oz l’assimile immédiatement. Depuis son arrivée sur Sannom, il avait eu un certain nombre de petites amies : mais jamais il n’avait parlé d’aucune comme la femme de sa vie, jamais il n’avait soulevé l’idée du mariage avec l’une d’entre elle. Le problème était que Vasco, trop gentil, refusait rarement les avances d’une fille alors qu’il était célibataire et ce, même s’il n’était pas amoureux de cette fille. De ce fait, il n’avait eu quasiment que des relations à court terme et n’avait souhaité épouser une fille qu’une fois, il y avait bien longtemps, alors qu’il errait encore sur ce continent : mais pour cette fille, il en était resté à l’étape du souhait pur et simple, il n’avait jamais ressenti ce sentiment de tranquille sérénité qu’il éprouvait en ce jour. Parce que pour Edryn, c’était différent. A peine l’avait-il vue et déjà il savait qu’elle allait être la femme de sa vie. Il savait qu’ils se marieraient, ce n’était pas une simple hypothèse vague et lointaine mais une certitude, concrète et le plus proche qu’il le pourrait, espérait-il. Le mariage était l’un des buts de Vasco, oui : il parvenait à concevoir un idéal sans cet élément, certes, puisqu’il savait depuis longtemps qu’il arrivait qu’on ne trouve pas cette personne à laquelle on était destinée – encore une fois, Vasco croyait dur comme fer à la théorie du destin amoureux. Cependant, l’artiste voyait un bonheur absolu dans un mariage heureux, entourés de personnes qui lui seraient très proches comme Oz, et, par la suite, dans une famille unie. Les notions du mariage et de la famille lui avaient étés inculquées par sa mère, cette femme qu’il aimait tant : il était donc normal qu’il en fasse un véritable sacerdoce – ce qui, soit dit en passant, était en contradiction totale avec sa vie actuelle de bohème libre qui lui plaisait tant, mais ne lui brisons pas toutes ses illusions. Oui, s’il affirmait qu’il comptait se marier avec une femme qu’il présentait comme la femme de sa vie, c’était que cette femme avait vraiment pris une importance gargantuesque pour lui : en quelques jours à peine, Edryn avait pris énormément de place dans le cœur du rockeur.

      Cependant, et malgré tous le sérieux avec lequel Vasco présentait ce projet, Oz ne semblait pas du tout prêt à y croire. Le regard qu’il posa sur lui intrigua fortement Vasco : le mépris avait pour une fois quitté les traits du gosse de riche. Car même Vasco, qui était pourtant l’inconscient Icare qui se brûlait un peu plus les ailes chaque jour auprès du soleil qu’était Oz, était constamment confronté au mépris Ozien. Il arrivait bien entendu quelques fois, rares, où le masque tombait : mais ces moments étaient rares et toujours aussi déstabilisants pour l’artiste. Cette fois, il aurait pu s’y attendre : mais se confronter au regard d’un Oz hésitant, légèrement troublé, était toujours aussi dur. A la fois rassurant et déprimant. Rassurant pour la simple raison que cela prouvait bel et bien à Vasco qu’il avait suffisamment d’importance pour qu’Oz se permette, ne serait-ce que partiellement, de se débarrasser de son masque continuel. Et plus que pour ça, parce que cela assurait à l’artiste que son jeune ami savait qu’il avait un soutien, qu’il n’était pas totalement seul. Déprimant, parce que savoir qu’Oz ne se sentait pas bien lui faisait terriblement mal au cœur, systématiquement. Parce que le voir troublé, dérangé, était une épreuve terrible pour Vasco. Non, vraiment, c’était terrible à quel point le bonheur était parfois capable de flirter avec la souffrance la plus abominable. Et finalement, il détourna les yeux, regarda au loin. Lâcha une réponse que Vasco aurait dû attendre mais qui ne fit que le surprendre. Vasco s’était attendu une réaction bien plus violente de la part d’Oz : celle-ci était étrangement plate. Mais bizarrement, il ne sentait pas la suite. Le calme avant la tempête, certainement.

      Une nouvelle fois, Vasco fut pris de l’envie de fuir. C’aurait été d’un simple… Une nouvelle brèche s’était ouverte à lui. Il devait saisir cette opportunité maintenant, il n’en aurait plus d’autres. Mais en même temps… Si jamais il disait à Oz qu’il plaisantait, celui-ci risquait tout de même d’avoir des doutes par la suite. Et d’apprendre de ce fait la vérité par quelqu’un d’autre. Voire même d’aller rendre visite à Edryn elle-même pour se renseigner directement. Si cela arrivait, Oz en voudrait alors terriblement à Vasco et ce, bien que le musicien ait tout fait pour préserver à la fois le bonheur de son ami et sa propre santé. Il était bien trop habitué aux réactions d’Oz, il savait parfaitement qu’il risquait de réagir avec une violence assez choquante pour les personnes qui n’avaient pas l’habitude de son tempérament de petite brute. Et même. Il devait le lui dire. Il ne pouvait pas lui cacher quelque chose d’aussi important dans sa vie. Oz comptait bien trop pour qu’il ne le lui annonce pas. Doucement, il posa sa main sur l’épaule d’Oz, quelque peu hésitant, dans un mouvement à la fois doux et ferme. Un geste qui affichait son soutien continuel pour répondre à la simple affirmation d’Oz.


      « … Non, je suis très sérieux. Je la connais depuis quelques jours, pas très longtemps, et on va se marier. »

      Il était tout de même fou de voir tant de naïveté et d’optimisme en un seul homme. Enfin, pour les personnes qui n’étaient pas habituées à la personnalité tout de même particulière de Vasco : les autres finissaient par le trouver normal, au bout d’un moment. Et là, Vasco descendait quelque peu de son nuage tout rose à la barbe à papa. Il attendait l’ouragan qu’il risquait de se prendre de pied ferme, oui, se promettant de tenir tout de même le cap et d’y résister jusqu’à ce qu’il se calme. Et il serait là par la suite pour faire admettre la nouvelle à son insupportable meilleur ami. Parce qu’il serait là quoi qu’il arrive. Pour toujours et à jamais.
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    Message  Oz Roland Jeu 2 Déc 2010 - 23:13

      Effectivement, il ne déconnait pas. Inexorablement, il ne déconnait pas. Malheureusement, il ne déconnait pas.

      C’était sûr… Amer, Oz songea furtivement qu’il était idiot de sa part de s’accrocher bêtement et désespérément à l’espoir que Vasco puisse plaisanter, alors qu’il savait maintenant naturellement interpréter toutes les expressions et attitudes de ce dernier. Il savait parfaitement quand Vasco mentait et il savait parfaitement quand il était sérieux. Or, ici, il était plus qu’évident qu’il ne plaisantait pas. Malheureusement. Oz se voilait la face parfois (souvent, même) parce que ça l’arrangeait bien, mais indubitablement, il connaissait vraiment suffisamment le jeune homme blond, désormais, pour pouvoir saisir toutes ces subtilités significatives et profondes qui émanaient de son être et qui échappaient à l’œil de celui qui ne le connaissait pas assez. Donc oui, Vasco était sérieux. Cruellement sérieux. Et rien que pour ça, Oz lui en voulait. Terriblement. Il lui en voulait pour ne serait-ce qu’aborder ce sujet. Il lui en voulait pour lui en parler avec cet air à la fois sérieux et doux qui ne laissait aucune place au doute. Il lui en voulait pour dire ça, il lui en voulait pour dire ça maintenant, il lui en voulait pour dire ça comme ça. Il lui en voulait pour laisser sous-entendre qu’une personne incommensurablement importante venait de faire irruption dans sa vie au détriment des autres. Il lui en voulait pour oser annoncer une incongruité pareille. Il lui en voulait pour oser poser ça comme un postulat. Il lui en voulait pour oser lui faire mal avec ce sourire. Il lui en voulait tout court. Et ces mots, ces mots qui répétaient la même chose, ces mots qui remuaient le couteau dans la plaie, ces mots absurdes qu’il ne voulait pas entendre, ces atrocités s’élevaient de nouveau sur un ton affreusement tendre et doux ; comment OSAIT-il lui faire ça ? De quel DROIT se permettait-il de croire ne serait-ce qu’un seul instant que lui, Oswald Roland, allait se réjouir pour lui et partager son bonheur alors qu’il venait brutalement et simplement d’annoncer qu’il partait avec quelqu’un d’AUTRE ? COMMENT ? Oh, si Oz aurait été un meilleur ami tout ce qu’il y avait de plus sain et de plus normal pour Vasco, nul doute qu’il se serait réjouit pour cette personne qu’il chérissait tant. Il l’aurait félicité, il aurait demandé des détails, il aurait été intrigué, enchanté, content pour lui. Sauf qu’il était loin, loin d’être un meilleur ami normal. Et il ne voulait pas l’être. Jamais. Les relations humaines, à la base, il n’en voulait même pas. Il les exécrait. Il haïssait la normalité. Il haïssait la banalité. Il haïssait les autres. Il haïssait leur quotidien. Il haïssait l’amour, l’affection, la famille et l’amitié, il haïssait ce qui faisait le bonheur du commun des mortels. Il exécrait les liens que l’on pouvait tisser avec les autres, mais il s’était tout de même inexorablement attaché à certaines personnes, quand bien même il ne le voulait pas ; il s’était trop attaché, même. Il finirait par souffrir de ça, il le savait, il en était intimement persuadé. S’attacher, c’était une connerie monumentale. Il le savait comme il savait qu’il allait souffrir un jour ou l’autre. Il avait déjà vécu ça avec William. Alors au lieu d’attendre que ça lui arrive à nouveau, il attaquait en premier. Il faisait mal aux autres, il se faisait mal à lui-même, il rejetait tout et tout le monde, et ainsi, personne ne lui ferait de mal ; personne à part lui-même. Non ? Si. Peut-être. A dire vrai, il était perdu. Simplement perdu. Et cassé.

      Les paroles de Vasco trouvèrent brutalement et rapidement un sens dans l’esprit d’Oswald, mais ce fut encore avec un temps de retard qu’il réagit. Parce qu’il n’avait pas envie de comprendre immédiatement. Et de nouveau, cette perplexité entremêlée à la stupéfaction. Avait-il bien entendu ? Était-ce possible qu’il ait bien entendu ? …Mais qu’est-ce que c’était que ce bordel, à la fin ?! Il avait forcément mal entendu, encore une fois. Sauf que non. Il le savait. Quelques secondes passèrent ainsi, fugacement, instant éphémère et éternel à la fois, puis Oz balaya le trouble de son visage au profit d’un violent froncement de sourcils. Sans prévenir, il donna un vif coup d’épaule pour que Vasco enlève cette main traitresse qu’il avait osé poser sur lui, et écarta dans la foulée le bras du blond d’un geste brusque du revers de la main. Comme toujours, il ne se souciait pas de savoir si la brutalité plus ou moins importante de ses coups pouvaient réellement faire souffrir l’artiste qui avait bien trop tendance à subir ses sautes d’humeur. Ceci fait, il s’écarta d’un pas en arrière pour pouvoir le fusiller allégrement d’un regard noir et étincelant d’une colère sourde qui ne demandait qu‘à exploser. Tout comme sa voix qui, cette fois, avait perdu cette intonation plate et désintéressée pour un ton plus ozien de nature : soit dur, agressif et stupéfait à la fois.

      - Quelques jours ? Tu te fous de ma gueule ?

      Comme toujours, l’agressivité dans les propos était une seconde nature chez Oz. En guerre contre tout et tous sans distinction aucune, il avait naturellement cherché à se démarquer de l’éducation parfaitement cadrée qu’il avait pu recevoir en tant que gosse de riche, et ce depuis de nombreuses années maintenant. L’emphase et la politesse ? Au placard, ou seulement réservées pour l’hypocrisie qu’exigeaient toujours les soirées mondaines. Il avait rapidement pris cette habitude de parler de manière agressive, laconique, familière ; les jurons et les insultes franchissaient un nombre incalculable de fois mieux la barrière de ses lèvres que les excuses ou les gentillesses. Pourquoi ? Parce que c’était là encore une manière de dresser un mur entre les autres et lui. Ne laisser transparaître aucun sentiment, et empêcher les autres de trop s’approcher. Toute une philosophie de vie ; parfois difficile à tenir, à vrai dire. Oz pinça légèrement les lèvres, un court instant, alors qu’il gardait les sourcils froncés et qu’il continuait de fixer Vasco d’un œil noir. Une main toujours sur la balustrade, il se demanda pour la énième fois à quoi rimait tout cela. Vasco était sérieux, c’était indéniable, mais c’était tellement… grotesque ! Depuis quelques jours ? Il connaissait cette fille depuis quelques jours ? Et il voulait déjà se marier avec, il parlait déjà d’être faits l’un pour l’autre ? Contrairement à Vasco, Oz ne croyait en aucune façon au coup de foudre ou au destin amoureux. Ce n’étaient que des foutaises, des idioties que l’on donnait à croire aux plus naïfs comme cet abruti de borgne trop sensible. Il aurait pu trouver tout cela ridicule et se contenter de se foutre de Vasco, mais le problème, c’est qu’il connaissait bien ce dernier. Et qu’il savait pertinemment ce que tous ces mots voulaient dire. Sauf qu’il ne pouvait pas le croire. Vasco ne pouvait pas lui faire ça. Pas vrai ? Il ne pouvait décemment pas… il ne pouvait pas aimer à ce point quelqu’un qu‘il ne connaissait que depuis quelques jours. Il n’avait pas le droit de propulser cette inconnue dans le palmarès des personnes qu’il aimait et chérissait le plus, pas alors qu’elle n’avait rien à faire là, pas alors qu’elle ne le connaissait même pas. Elle n’avait pas le droit de s’incruster comme ça alors qu’elle n’était, présentement, absolument rien aux yeux du gosse de riche. Elle n’avait pas le droit. Et Vasco n’en avait aucunement le droit non plus. C’était ignoble. Infect. Dégueulasse.

      …Et lui, alors, merde ?

      - C‘est n’importe quoi. Vraiment n’importe quoi.

      Un souffle craché entre les dents comme pour se débarrasser de mots incapables de retranscrire fidèlement une pensée, et Oz détourna les yeux. Les doigts qui entouraient la rambarde resserrèrent sensiblement leur prise en dépit du froid, et ignorant ses phalanges qui blanchirent doucement, le gosse de riche tourna un instant la tête pour fusiller la plage, la mer, les vagues et le ciel d’hiver d’un regard où la colère se disputait à l‘incompréhension. Il trouvait tout cela moins beau à contempler, d’un coup. Il secoua la tête furtivement d’un air à la fois dépité et dégoûté, puis leva un instant le menton pour perdre son regard plus haut encore dans le ciel. Lorsqu’on inclinait suffisamment la tête en arrière, il n’y avait plus que le ciel nuageux et infini dans le champ de vision, et rien d’autre ; on avait l‘impression de tomber, ou d‘être ailleurs. C’était vertigineux. Furtivement, Oz songea qu’il aurait aimé être débarrassé de toutes ces prises de tête, de toute cette affection qui lui faisait mal, de toutes ces choses qui le faisaient détester le monde et encore plus lui-même ; il aurait aimé ne rien ressentir, ne penser à rien et n’être rien. Mais il n’en était rien. Il baissa le menton, garde les sourcils froncés et le regard dur, jeta un nouveau coup d’œil aux flots qu’il ne trouvait même plus beaux. Relâcha finalement la balustrade, laissant le sang affluer à nouveau dans ses doigts, puis prit finalement une inspiration en se tournant vers Vasco, le toisant froidement et s’écartant encore une fois d’un pas. Il n’avait pas envie de savoir mais en même temps, il lui paraissait indispensable de savoir s’il était trahi sur toute la ligne ou s’il restait encore un espoir, quand bien cet affreux sentiment de rancune s’insinuait déjà dans son être entier au même titre que ce sentiment d’abandon qui lui déchirait lentement la poitrine. Oui, il se sentait déjà trahi. Mais il faut croire que lorsque l’on a mal, on un don pour chercher à avoir encore plus mal.

      - Tu l’aimes ?

      Deux mots, une interrogation. De nouveau un ton plat, mais surtout polaire et annonciateur de tempête. Cette froideur dans la voix, cette froideur dans le regard ; froideur qui se disputait d’ailleurs allégrement avec le brasier de la colère dans les prunelles. Oz n’était plus que déception, incompréhension, colère, rancœur, déni, détestation, douleur et doutes. Mais il lui restait au moins une certitude. Vasco n’avait pas le droit.

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    Message  Vasco Fair Mar 4 Jan 2011 - 22:19

      La panique grimpait dans le cœur du rockeur, vertigineuse. Il y eu ces quelques secondes d’éternité, ce court instant où le temps sembla s'être arrêté. Vasco ne savait pas vraiment à quel point ses mots avaient pu blesser Oz, à quel point celui-ci se sentait trahi. Oh, il le connaissait et ne s’attendait pas à recevoir de sincères et heureuses félicitations. Cependant, il ne pouvait réellement comprendre l’impact que ces mots avaient dans l’esprit d’Oz et les conclusions que celui-ci en tirait. Tout simplement parce que, là où Oz était terriblement possessif et refusait de voir son meilleur ami partir, là où Oz voulait impérativement garder Vasco près de lui toute sa vie, quoi qu’il arrive et même si le blond devait pour cela se sacrifier, Vasco était prêt à se sacrifier, justement, au profit d’une autre personne : il serait profondément malheureux sans Oz, vraiment. Il ne savait pas s’il supporterait un éloignement. Mais tant qu’Oz allait bien, il ferait avec. S’il fallait qu’Oz s’éloigne de lui pour atteindre le bonheur, Vasco le laisserait faire. Il n’en serait pas heureux, loin de là. Il ne savait pas s’il y survivrait, maintenant que leur relation avait atteint un stade si élevé, maintenant qu’ils dépendaient littéralement l’un de l’autre. Mais si c’était pour que le gosse de riche soit enfin heureux, il n’hésiterait pas. C’est justement à cause de cette incompréhension entre les deux jeunes hommes que Vasco ne comprit une partie de l’impact que ses paroles avaient eu sur Oz qu’alors que s’étirait ce moment figé. Il y avait sa main sur l’épaule d’Oz, qui se voulait rassurante, lui indiquant plus ou moins clairement qu’il était là et resterait là quoi qu’il arrive. Et puis il y avait ce trouble, inhabituel, qui occupait les traits d’Oz.. Et l’artiste comprit, plus ou moins. Oz avait il… Peur ? Si oui, peur de quoi ? Il avait mal, par contre, c’était sûr. Et ce mal trouvait un écho en Vasco, qui se désolait de faire souffrir son meilleur ami. Il n’avait pas le droit de lui faire mal comme ça, mais il était bien obligé de lui annoncer ça. Et puis il resterait après, il n’en aimait pas moins Oz : où était le problème ?

      Ce moment ne dura pas. Le trouble fut balayé au profit de la colère, exprimée en un violent froncement de sourcil. Et, tout aussi violemment, Oz se libéra de la prise de Vasco. Le coup sur son bras lui fit mal, oui : Oz n’avait pas mesuré sa force, comme d’habitude. Mais cela n’avait que très peu d’importance : Vasco avait l’habitude, après tout. Et même s’il ne l’avait pas eu, il l’aimait trop pour s’offusquer de si peu. Il en venait même à penser qu’il l’avait bien mérité : il faisait souffrir l’âme d’Oz, Oz faisait souffrir son corps. Normal, du point de vue Vascozien. Et aussi malsaine que soit cette relation, Vasco y tenait. Il tenait à préserver Oz d’un maximum de malheur, et là, il déclenchait sa colère folle. C’était indigne de lui. Il n’avait pas le droit de faire ça, non, et il s’en voulait pour cela : mais il n’avait pas le droit non plus, sous le prétexte de ne pas vouloir lui faire du mal, de ne rien lui dire de cette merveilleuse rencontre qu’il avait faite quelques temps auparavant. Pris entre deux feux, l’amoureux avait fini par se jeter dans la gueule du loup et était prêt à subir. Jusqu’à ce qu’Oz se remette. Rien ne changerait dans leur relation, non ? Un pas en arrière de la part d’Oz, un pas en avant de celle de Vasco. Reflexe, langage du corps. Non, Oz, je ne te laisserais pas t’éloigner. Je t’ai blessé, j’en suis désolé, profondément. Mais ne te renferme pas : je suis toujours là pour toi, et je t’aime. Un long message, complexe, dans un simple geste. Le regard que lui adressa Oz blessa Vasco : non qu’il soit déçu qu’Oz ne se réjouisse pas pour lui. Ce regard dur, haineux, voulait dire que Vasco avait fait une terrible erreur, qu’il était en faute : et Vasco s’en voulait, mais là, il n’avait vraiment pas du tout le choix. La voix d’Oz retentit ensuite, sèche, dure, suite logique de son regard mauvais. Et si entendre cette voix là n’était pas une partie de plaisir, il en allait de même pour les mots qu’elle portait.

      Non, ce n’était pas une plaisanterie plus que douteuse du borgne. Il aurait peut-être mieux fallut – quoi que…. Vasco était terriblement sérieux alors qu’il avouait ne la connaître que depuis quelques jours. Leur rencontre n’était pas des plus récentes et pourtant, le grand romantique n’avait pas le moindre complexe à la présenter comme la femme de sa vie : c’était vraiment le coup de foudre, auquel il croyait profondément. Il se doutait bien qu’Oz n’était pas du genre à croire en pareil hasard, n’essayait même pas de le convaincre : c’était une bataille perdue d’avance. Le gosse de riche était bien plus réaliste sur ce point au moins que son ami qui était capable de mener un raisonnement aussi absurde qu’un raisonnement nettement plus réaliste. Edryn, il ne la connaissait que depuis quelques jours, oui, et elle s’était vite faite une place immense dans sa vie. C’était comme ça, il y a des gens qui attirent sans qu’on puisse en expliquer la raison. D’ailleurs, c’était aussi un peu le cas d’Oz : une personne normale aurait eu bien du mal à aimer le plus jeune des enfants Roland, il faut dire ce qui est. Mais Vasco, lui, s’était vite attaché, accroché. Pour atteindre la relation qu’ils avaient aujourd’hui et qu’il ne gâcherait pour rien d’autre que le bonheur d’Oz. Oui, on pouvait trouver un attachement aussi rapide complètement grotesque. Ce ne serait pas tout à fait faux, à vrai dire : c’était un peu rapide. Mais Vasco était comme ça, il fonctionnait beaucoup par coups de cœur – ce qui ne l’empêchait pas de devenir très ami avec des gens qui ne lui avaient initialement pas tapé dans l’œil. En tout cas, suite à ce léger excès de colère d’Oz, Vasco aurait voulu se faire vraiment, vraiment tout petit, pour pouvoir se glisser dans un trou de souris.

      Et puis Oz posa LA question. Son ton était calme, mais cette question avait énormément d’impact sur Vasco, le poussant à remettre un peu les pieds sur terre – alors qu’il aurait répondu que oui sans la moindre hésitation à n’importe qui d’autre qu’Oz. Est-ce qu’il l’aimait ? Vasco fronça, sensiblement, les sourcils. Il était vrai qu’il faisait les choses un peu vite… Que ses déclarations à propos d’Edryn étaient peut-être un peu précipitées… Après tout, il lui était déjà arrivé d’avoir des coups de cœur sans que ceux-là ne durent. Mais il était vrai que dans le cas d’Edryn, c’était différent. Bien plus intense. Du même genre que celui qui l’avait poussé à aimer Oz. Et il aimait vraiment Oz, oui : la logique voulait donc qu’il aimât vraiment Edryn. Il ne comprit même pas pourquoi il avait douté, ce court instant. Certainement parce que là, il était vraiment effrayé par la façon dont Oz réagirait quand il lui répondrait. Il chercha donc une formulation qui serait à peu près correcte aux yeux de son meilleur ami : il ne trouva rien d’autre que la sincérité la plus totale.


      « Oui, je l’aime. »

      Vasco ne pouvait de toute façon qu’être sincère avec Oz, non seulement parce que ce dernier connaissait toutes les expressions et toutes les intonations du premier qui était un médiocre menteur, mais aussi parce qu’il ne voulait pas lui cacher la vérité. Oz n’était plus un enfant à qui il fallait mentir pour préserver son bonheur immaculé : il était désormais adulte, et il devait donc subir quelques désagréments, qui n’étaient pas censés l’empêcher d’atteindre le bonheur pour autant. Normalement, ces quelques mauvaises expériences devaient même être enrichissantes pour le gosse de riche. Mais il n’accepterait sûrement pas telle réponse aussi facilement, aussi, le ton doux, Vasco décida de parfaire son suicide.

      « … Tu sais, toi aussi, je t’aime. Vraiment, sincèrement. Profondément. Et… Je veux pas te perdre. Je voudrais qu’on garde notre relation. Que tu continues à faire partie de ma vie, pour toujours et à jamais. Et je me disais… J’aimerais bien que tu sois mon témoin de mariage. Justement parce que tu es l’homme le plus important de ma vie. »

      Sa déclaration, qui était une véritable déclaration d’amour, était on ne peut plus sincère : mais la demande qu’il venait de lui faire, Vasco s’en doutait par rapport à la réaction qu’avait eu Oz auparavant, ne lui plairait pas du tout, malgré tout ce que cela impliquait. La tempête éclaterait sans aucun doute, dévastatrice, balayant bien des choses sur son passage : restait à espérer que tout ne parte pas en lambeaux à cause de cette catastrophe.
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    Message  Oz Roland Dim 16 Jan 2011 - 21:13

      Tout aurait été terriblement plus simple s’ils avaient été des meilleurs amis tout ce qu’il y a de plus normaux. Si Oz n’était pas aussi peu conventionnel, s’il n’était pas aussi insupportable, asocial, égocentrique, aussi capricieux, infiniment possessif et mortellement jaloux. S’il avait eu une relation tout ce qu’il y a de plus normale avec Vasco, s’il ne s’était pas attaché autant à lui, pas de manière aussi malsaine. Oui, tout aurait été probablement plus simple si tout avait été normal dès le départ, peut-être même s’ils ne s’étaient jamais rencontrés. Sauf que les choses étaient ce qu’elles étaient, et revenir en arrière n’était jamais possible. C’était comme cette question, que le gosse de riche posa sans réfléchir. Maintenant, il la regrettait. Il avait ce goût amer dans la bouche qui ne lui donnait qu’une envie : retirer la dite question et changer aussitôt de sujet pour ne pas avoir à entendre la réponse. Il faillit se raviser, pendant le court laps de temps que prit Vasco pour répondre. Mais il hésita, et ce lui fut fatal. L’annonce, ces mots, ces trois uniques petits mots, semblèrent le laisser de marbre en apparence, lui arrachant tout au plus un haussement de sourcils. Pourtant, à l’intérieur, ce fut comme un grand vide. Ou comme une énorme gifle mentale qui vous laissait pétrifié un instant. Juste une incompréhension intégrale qui annihilait la moindre pensée, et qu’on essayait de conserver le plus longtemps possible pour oublier cette douleur qui commençait à poindre, sournoise, dans la poitrine. Et ça faisait mal. Cruellement mal. Oz aurait été incapable de mettre un mot sur ce qu’il ressentait alors. Était-ce de la déception ? Se sentait-il juste dégoûté ? Trahi ? Dépité ? Apeuré ? Il n’aurait su dire. Il savait juste qu’il éprouvait à l’instant un grand vide, et une profonde lassitude. Il en avait juste marre. Que tout se passe toujours comme ça. Que tout se passe toujours aussi mal, depuis sa naissance. Il en avait juste marre d’être comme ça, et de se prendre sans arrêt une énorme claque dans la figure. C’était fatiguant, à force. Terriblement fatiguant. Il détourna un instant les yeux, pour poser son regard morne sur les vagues qui s’écrasaient encore sur le sable, sans les voir, puis prit une inspiration. Il n’avait qu’une envie, c’était partir. Partir d’ici au plus vite, partir loin, même. Il en avait marre de toutes ces conneries, de Sila qui débarquait comme une fleur, de Vasco qui lui foutait une claque en lui annonçant tranquillement qu’il allait épouser la femme de sa vie rencontrée quelques jours plus tôt, marre de son anniversaire, marre de cette période, marre de tout. Il en avait marre, juste marre. Et…

      Et Vasco n’en avait pas fini. Voilà qu’il reprenait de nouveau la parole, et Oz arracha son regard des vagues pour le poser sur lui, sourcils légèrement froncés, bouche close. Qu’est-ce qu’il disait encore ? Oh, « je t’aime aussi » ? Tiens donc. C’était d’un… pathétique. Le voilà qui cherchait à noyer le poisson, avec de jolies paroles vides de sens. Il parlait, il parlait, il mentait, et tout ça pour faire mieux passer cette trahison infecte. C’était dégueulasse. Oz n’écouta pas tout avec attention, mais déjà, il sentait la colère noire entamer sa fulgurante ascension. Il avait toujours été d’un tempérament sanguin et colérique, et il se laissait toujours aller à ce sentiment dévastateur pour oublier pendant un temps tous les autres. La tempête enflait toujours trop rapidement, puis éclatait, détruisait, dévastait tout, et disparaissait tout aussi rapidement, laissant la rancœur derrière elle. Ca l’arrangeait tellement de se sentir en colère et haineux plutôt que désespéré et angoissé. Et là, c’était exactement le cas. Cet enfoiré osait lui dire entre quatre yeux qu’il aimait une poufiasse rencontrée il y avait de ça quelques jours à peine, et il trouvait encore le moyen de s’empresser par derrière de lui assurer l’aimer aussi ? Comme pour le rassurer, comme pour essayer de ne pas l’énerver ? Pour la FORME ? Ce n’était, ce n’était… Ce n’était que des conneries. Et il osait lui balancer ça à la figure, gentiment, doucement, tendrement, comme s’il n’était qu’un gosse à qui le père viendrait d’annoncer un nouveau mariage. Ca le débectait. Il n’avait aucunement le droit de… Attendez. Avait-il bien entendu ? Est-ce que… Est-ce que Vasco avait osé, est-ce qu’il avait osé lui proposer très sérieusement d’être son témoin de mariage ? LUI ? Après lui avoir annoncé qu’il aimait une inconnue, que c’était la femme de sa vie, qu’il allait se marier, faire sa vie avec elle, le laisser connement en plan, lui, Oz, et maintenant, maintenant, il en rajoutait encore une couche en lui demandant d’être son TÉMOIN ? Il n’était… Il n’était qu’un… Non, stop. C’était trop. La frustration et le désespoir avaient mué en colère sourde, ardente, et cette dernière brûlait, bouillait dans ses veines. Il n’avait PAS le droit. Il ne pouvait, il n’avait pas… Le profond sentiment d’injustice et de trahison lui montait à la tête, lui faisait mal, nourrissait sa colère, l’enflammait ; il fronça violemment les sourcils, serra les dents, et quelque part, quelque part en lui, la corde lâcha. Et l’ouragan balaya sa raison.

      Il fit un pas en avant, rapide, et les traits crispés par la colère, sans attendre, il envoya brusquement et violemment sa main dans la figure de Vasco, dans une gifle retentissante et brûlante. Ce n’était pas une claque de gamine, mais une gifle brutale assenée du revers de la main, violente, soudaine, implacable ; une gifle qui avait probablement la même force qu’un coup de poing, mais qui avait davantage de sens venant de sa part, plus d‘impact. Dans cette gifle, il y avait toute la colère, toute la rancœur, toute la frustration, mais il y avait aussi l’accusation ; et le mépris, infini. Furtivement, dans un élan de satisfaction colérique, Oz songea que si la bague qu’il portait aujourd’hui au doigt pouvait accentuer ne serait-ce qu’un peu la douleur de la baffe ou esquinter un chouilla cette jolie gueule d‘ange, ce serait tant mieux. Et tout en administrant cette gifle monumentale à cette personne qui était son meilleur ami et plus encore, il laissa sa voix aux accents furieux éclater soudain avec fracas, vibrante, vociférant avec colère comme il en avait malheureusement souvent l’habitude :

      - TU TE FOUS VRAIMENT DE MA GUEULE ?

      Complètement indifférent aux quelques têtes qui purent alors se tourner dans leur direction, Oz darda sur Vasco un regard noir comme les abysses, la colère incandescente brûlant dans ses prunelles, la rage bouillant dans ses veines. C’était parti. D’une vive détente du bras, il chopa le blond par le col de sa veste et furieusement, le fit pivoter pour le pousser brutalement dos contre la balustrade.

      - EST-CE QUE TU TE FOUS DE MA GUEULE, VASCO FAIR ?

      Il avait les tympans qui bourdonnaient, la tête qui allait exploser, le sang qui battait contre ses tempes, la voix hurlante, les poings tremblants et la respiration sifflante. Il avait atrocement chaud, et la colère ne diminuait pas, elle enflait, elle criait, elle explosait, elle détruisait. Elle rendait l’angoisse et la déception confus dans son esprit, pendant un temps salvateur, et elle lui donnait envie de tout casser, d’absolument tout casser. Elle lui donnait envie de faire mal à Vasco, de le secouer violemment, de lui coller une autre gifle, de lui balancer un coup de poing, puis un coup de pied, de lui griffer le visage, de lui tirer les cheveux, tout ça pour qu’il arrête, qu’il ARRÊTE. Et il n’avait aucune chose à casser sous la main, il n’avait aucun objet pour exorciser sa colère, il n’avait aucun verre à briser, aucune chaise à envoyer valdinguer, juste cette balustrade et Vasco, Vasco qu’il agrippa à nouveau par le col. L’éclat de la colère brilla une nouvelle fois avec force dans ses prunelles, et il attrapa violemment le menton de son vis-à-vis entre ses doigts crispés pour lui faire baisser d’autorité, sans douceur aucune, pour mieux pouvoir le regarder dans les yeux.

      - TU VEUX QUE JE SOIS TON TÉMOIN ? TU VEUX QUE JE SOIS LE TÉMOIN DE TOUTES CES CONNERIES ? TU TE FOUS VRAIMENT DE MOI ? TU ME DÉGOUTES, PUTAIN, TU ME DÉGOUTES !

      Incapable de tenir en place, Oz le repoussa brutalement en libérant son menton dans la foulée, et s’écarta d’un pas en pivotant vivement sur ses talons pour chercher quelque chose des yeux, quelque chose, n’importe quoi, quelque chose qu’il puisse casser, déchirer, détruire. N’importe quoi tant que ça lui permettait de calmer le tremblement colérique de ses poings, n’importe quoi tant que ça pouvait lui éviter de ruer Vasco de coups. Il ne devait pas, il ne devait pas… Il fallait qu’il balance un violent coup de poing dans quelque chose, mais pas dans la figure de Vasco, il fallait qu’il casse quelque chose, mais pas Vasco. Et il n’y avait rien, absolument rien, pas même des chaises ou des tables à une terrasse, pas même le gobelet qu’il avait jeté quelques instants plut tôt. Avisant l’écharpe qu’il portait, cette écharpe qui n’était pas la sienne, il jura et leva les mains pour s’empresser de l’enlever, brusquement, vivement, nerveusement, comme si elle l’étranglait, puis la jeta violemment à son propriétaire sans se soucier de savoir s’il la rattrapait ou non, et ce avant d’éclater de nouveau d‘une voix vibrante de colère :

      - QUELQUES JOURS, BORDEL ! QUELQUES JOURS ! NE VIENT SURTOUT PAS ME DIRE AUSSI TRANQUILLEMENT QUE QUELQU‘UN EST MAINTENANT AU MÊME NIVEAU QUE MOI POUR TOI, NE VIENT PAS ME DIRE ÇA, NE VIENT PAS ME DIRE QUE QUELQU‘UN A PU PRENDRE MA PLACE EN QUELQUES JOURS !

      Sa main partit de nouveau sans prévenir à ces mots, vive et brutale, pour envoyer une nouvelle beigne violente et retentissante à travers la joue du blond. Il avait mal à la gorge à force de crier, il avait mal à la main, il avait mal à la poitrine, il avait mal partout. Les pensées confuses s’entrechoquaient dans son esprit, et les mots se bousculaient dans sa bouche.

      - Je croyais… JE CROYAIS… TU AVAIS DIT…

      Mais quel CON il avait été ! Quel con il avait été de croire naïvement à toutes ces conneries, à tous ces mots, à toutes ces promesses, à toutes ces affirmations. Quel con il avait été de se laisser bercer par l’espoir confiant d’être irremplaçable et tout de même assez important pour Vasco - peut-être pas autant que ce dernier l’était pour lui, mais quand même un peu. Quel con il avait été d’oublier la sociabilité effarante de Vasco et sa prédisposition à aimer un très grand nombre de personnes. Quel con il avait été d’oublier ce qu’il était, quel con il avait été de se croire permis d’espérer être important. Quel con il était de réagir comme ça, quel con il était de crier tout ça, quel con il était de s’être attaché autant, quel con il était de toujours tout reporter à lui, quel con il était d’être aussi jaloux, quel con il était avec cette possessivité maladive qui l’empêchait d’accepter sciemment que Vasco, SON Vasco, aime et aille avec quelqu’un d’autre, quel con il était tout court, quel con il avait toujours été. Il se passa vivement une main dans les cheveux, puis l’autre, croisa les deux mains un instant à l’arrière de son crâne, jura entre ses dents, tenta de prendre une inspiration, recula à nouveau d’un ou deux pas, releva les yeux pour fusiller Vasco du regard, les dents serrées.

      - Ne m’approche plus.

      Il ne réfléchissait plus à ce qu’il disait ; tout ce qu’il voulait, à l’instant, c’était partir et tout oublier. Préserver cette colère qui lui faisait mal mais qui lui permettait de s’extérioriser, et ne surtout pas laisser Vasco le calmer, comme il arrivait à le faire souvent. Oz baissa les mains, et ferma une seconde les paupières pour prendre une profonde inspiration. La colère bouillait encore, il suffisait d’un rien pour qu’elle explose de nouveau, mais il prit sur lui un instant pour pouvoir maîtriser sa voix et arrêter d’hurler - ça ne regardait personne, absolument personne, et tous ces passants qui regardaient dans leur direction, il aurait pu tous les frapper un à un. Personne ne pouvait comprendre, de toutes façons. Il recula encore un peu, songea à partir tout de suite, effectua quelques pas, garda les sourcils froncés, posa les yeux sur Vasco. Une envie irrésistible de cracher son venin, de cracher tout son mépris, de cracher des propos blessants à la figure du blond pour lui faire mal le prit soudain, lui brûla les lèvres. Il ne trouva qu’une chose, et terriblement froid, infiniment méprisant, il se contenta de faire remarquer d’une voix acide :

      - J‘espère au moins qu‘elle est blonde. Pour t‘en servir comme pâle substitut d‘Eileen.

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    Message  Vasco Fair Dim 16 Jan 2011 - 23:06

      Vasco avait été le plus sincère qui soit : aucune arrière pensée n’animait sa déclaration. Il préférait peut-être juste tout lui annoncer d’un coup, pour qu’Oz s’énerve un bon coup et qu’il n’ait à le calmer qu’une fois. Mais il était sincère : il ne voulait pas que leur relation change, étant habitué et appréciant à force cette relation du maître tyrannique et du chien fidèle, du possesseur et du possédé qui était la leur. Il aimait Oz, plus qu’il était censé aimer un meilleur ami normal, mais il s’en moquait, à vrai dire. Leur relation, il la trouvait belle. Que deux personnes puissent s’aimer à ce point sans être en couple, sans songer à l’être, sans que cela n’amenuise l’amour que chacun éprouvait pour l’autre, c’était beau. Leur relation, elle n’était pas normale, pas saine. Pas saine du tout. Mais tout deux s’aimaient, et c’était bien là l’essentiel. Pour rien au monde Vasco n’était prêt à sacrifier cette relation privilégiée qu’il avait avec Oz. Privilégiée dans les deux sens : d’un côté, le gosse de riche accordait rarement son affection, préférant se réfugier dans le confort de la haine qui animait chacun de ses gestes, chacun de ses traits. De l’autre, le musicien appréciait certes énormément de monde, en tant que personne hypersociale qu’il était, mais il n’aimait vraiment, profondément et inconditionnellement, que bien peu de gens : et Oz était le premier homme à qui Vasco accordait cet amour, si profond et si fort qu’il en était douloureux. Pour les deux partis. Leur lien enfin était particulier : parfois, on pouvait penser qu’ils se détestaient. D’autre, qu’ils étaient véritablement amants. Ou encore qu’ils étaient deux frères, sans que la place du plus jeune soit bien précise en vue des comportements immatures que tous deux pouvaient adopter : ils s’aimaient, oui, et on ne pouvait assurément pas dire qu’ils étaient deux meilleurs amis normaux. Chacun déstabilisait constamment l’autre, bien qu’avec le temps, ils arrivaient parfois à prévoir leurs réactions mutuelles : leur lien était toujours surprenant, détonnant aussi, mais nourrit d’un amour profond. Même si, malheureusement, la violence était parfois de mise entre eux deux.

      Violence. Vasco aurait dû s’en douter. Jamais Oz n’aurait pu accepter avec un grand sourire d’être le témoin de son mariage. A vrai dire, peut-être qu’au fond, il avait attendu de se prendre un coup de poing en plein visage à peine le l’hypothétique futur mariage annoncé : un coup de poing, oui, pour lui remettre les idées en place, immédiat. Bien que les idées de Vasco soient tout à fait bien placées, à son sens. Mais une gifle… Ce coup était tellement lourd de sens que Vasco, sa tête tournée par la violence du geste, en souffrit profondément. Ce n’était pas la force elle-même du coup qui le blessa le plus, ni même la légère griffure, qui saignait pourtant sensiblement, que la bague d’Oz avait laissée sur sa joue. Non, là où Vasco souffrait énormément, c’était au cœur, à l’âme : la vérité, c’était qu’un coup de poing, de la part d’Oz, était devenu normal. La vérité, c’était qu’une gifle, de la part d’Oz, était terrible. La vérité, c’était qu’il avait blessé Oz, terriblement, plus encore qu’il l’aurait cru. Qu’il l’avait déçu, qu’il avait alors droit à son mépris le plus profond. Que son meilleur ami lui en voulait. La douleur au fond de son œil océan, Vasco se laissa un instant aller au désespoir, sourd au cri qu’Oz avait poussé en le frappant : ainsi, tout était fini. Leur belle amitié, si malsaine et si étrange, mais si profonde malgré tout, était brisée à jamais. Par sa faute. Il était coupable. Il avait fait du mal à Oz. Il méritait… Il ne savait pas ce qu’il méritait, mais c’était dix fois pire que cette gifle qui l’avait tant fait souffrir. Non, même, cent fois pire. Il n’avait pas le droit de lui faire du mal : il l’aimait. Il avait toujours voulu qu’Oz soit heureux, que la colère dans son cœur s’amenuise pour qu’enfin son meilleur ami soit serein. Oh, il ignorait tout à fait pourquoi il était toujours constamment énervé contre tout : mais il jugeait que ce n’était pas le plus important. Si un jour Oz le voulait, quelle qu’en soit la raison, il lui dirait pourquoi il avait si mal, pourquoi il bâtissait autour de lui une forteresse aussi solide, couverte de haine et de rancœur. Mais l’essentiel, c’était qu’Oz finisse par se sentir bien. Et puis, maintenant, c’était fini : jamais il ne lui dirait pourquoi il souffrait tant, et ce parce que Vasco avait brisé leur amitié. Tout était sa faute, et jamais il ne se le pardonnerait.

      Il se reprit en entendant quelque chose de plutôt rare, dans la bouche d’Oz : son prénom, et son nom. Oh, ce n’était pas bon signe : il n’utilisait les deux en même temps que lorsque la colère, terrible, le consumait à son encontre. Mais il n’avait tout de même pas le droit de le laisser tomber. Pas maintenant, pas alors qu’Oz était si mal. Un instant, il eut peur : Oz l’avait plaqué contre la balustrade contre laquelle ils étaient auparavant tous deux appuyés. Comptait-il, emporté par sa colère, le faire passer par-dessus ? Non, non, Oz était certes violent, Oz était certes au plus mal, Oz était certes capable de beaucoup, mais il ne pouvait pas prendre un tel risque. Si ? La panique grimpa un fol instant, oui, atteignit des plafonds vertigineux : elle redescendit tout aussi vite. Il se devait de rester serein. Et s’il mourrait à l’instant, ici même, cela n’avait aucune importance : il l’aurait bien mérité, non ? Il se devait de rester calme. Et d’écouter Oz. Bien sûr. Bien sûr, il s’énervait à l’idée même d’être le témoin de Vasco. Vasco s’en était douté, que cela se passerait mal. Mais il était hors de question qu’il laisse tomber. Il fallait qu’Oz comprenne l’importance que Vasco lui donnait en lui demandant ça. Et qu’il le dégoûte, ma foi… Il n’était plus à ça près. Il avait fait trop de mal à Oz, et il s’en voulait. Qu’il le dégoûte était légitime. Même si ça faisait un mal terrible.

      Oz s’empressa de retirer cette écharpe que Vasco lui avait prêté quelques instants plus tôt, comme si elle l’étouffait, l’oppressait, comme s’il s’agissait d’une malédiction à laquelle il voulait échapper. Il la lança contre le torse de Vasco, ensuite, semblant se moquer de ce qui arriverait à cette écharpe, d’où il la lançait, tant qu’il ne la tenait plus. Vasco réagit trop tard : il posa sa main contre son cœur tout juste une seconde après que l’écharpe ait quitté cette place. Il la laissa choir : cela n’avait strictement aucune importance. L’essentiel pour lui était de suivre les mouvements d’humeur de son ami, cet ami qui lui était si cher. Son nouveau cri lui déchira le cœur, encore un peu plus qu’il l’était déjà : Oz avait mal. Et… Il croyait qu’Edryn allait lui prendre sa place ? Il était jaloux d’elle ? Si la situation avait été moins dramatique aux yeux de Vasco, il en aurait sans doute rit. C’était… Tout simplement ridicule. Ils avaient une place similaire, aux yeux de Vasco : mais cette place n’était pas la même, loin de là. Et surtout, surtout, personne ne pourrait un jour prendre la place gargantuesque qu’Oz occupait pour Vasco. Mais là, il n’était pas prêt à en rire : ça lui faisait tout simplement une peine énorme. Ainsi, Oz n’avait rien écouté de ce qu’il avait dit ? Ou pire encore, il ne l’avait pas cru. Le regard que lui adressa Vasco n’était que douleur et douceur : il l’aimait, bordel, pourquoi ce petit crétin ne le croyait-il pas ?! Son regard ne put rester longtemps ainsi : un coup de poing vint l’en empêcher, brutal, sur la même joue qu’Oz avait déjà malmené juste avant avec sa gifle retentissante. Plus par reflexe que par nécessité, Vasco porta une main sur cette joue si douloureuse, et sûrement si rougie. En la retirant, il put apercevoir au bout de son index et de son majeur de petites traces de sang, légères. La bague d’Oz lui avait bel et bien éraflé la joue plus méchamment que Vasco l’avait tout d’abord cru. Mais cela n’avait vraiment strictement aucune importance.

      Oz sembla, un instant, tout simplement perdu. Ses paroles, un petit moment, furent tout simplement incohérentes : quelques mots perdus dans l’air, hurlé, manifestation d’un désespoir profond. Des mots perdus qui avaient une signification pourtant immense : Oz se sentait Trahi. Vasco ne savait pas pourquoi : il n’avait jamais, jamais dit qu’il ne se marierait jamais. Il n’avait jamais ne serait-ce que sous entendu qu’il resterait célibataire à vie. Au contraire, il avait eu plusieurs petites amies depuis qu’il connaissait Oz : mais pourquoi celui-ci s’énervait donc tant ? Tout ce que Vasco lui avait promis, à demi mots, c’était l’exclusivité. Une relation d’amitié d’une profondeur et d’une confusion inédite. Et cela, Vasco ne l’avait pas arrêté. Il ne cesserait jamais d’aimer Oz ainsi. C’était tout simplement impossible, irréalisable. S’il avait été prêt à abandonner, fataliste, quelques minutes plus tôt, à peine, il était désormais décidé : il était hors de question de laisser tomber Oz, quelle que soit la douleur physique que celui-ci lui infligerait. Ou psychologique. Car Oz était très doué dans ce domaine, il savait exactement quel sujet aborder pour faire mal, sur quel problème il pouvait appuyer pour obtenir ce qu’il voulait – ou croyait vouloir. Et puis Oz sembla se contrôler de nouveau, plus ou moins, se souvenir que malgré le temps abominable, il n’était pas seul dans ce lieu, il se trouvait exposé aux regards des autres. Il recula encore, s’éloignant un peu plus de Vasco qui, trop surpris de la réaction brutale qu’il attendait pourtant, n’avait pas bougé. Il parla plus bas, plein d’une fureur désormais contrôlée, à l’image de ce regard haineux. Ne plus l’approcher ? Il comptait le frapper s’il désobéissait ? Sûrement. Mais les coups, Vasco en avait bien l’habitude : il oubliait déjà presque la douleur pourtant encore présente que les coups de son ami lui avait infligée. Sa pauvre joue… Mais vraiment, il s’en moquait. Il était là, et comptait bien le montrer. Sauf qu’Oz, plus encore que la douleur physique, se montra une nouvelle fois très doué dans l’art de blesser les autres par la parole.

      Eileen. Il avait osé parler d’Eileen, alors qu’il savait très bien que c’était le Tabou. Le sujet qu’il ne fallait pas aborder. Celui qui pouvait mettre Vasco dans des états abominables. Le regard que lui lança Vasco, un instant, ne fut que douleur : comme s’il était prêt à lui tourner le dos au nom de cette parole atroce qui semblait pourtant, hors contexte, plutôt anodine. Il souffrait, oui. Il avait peut-être même envie de frapper Oz pour lui faire passer l’envie de répéter des choses pareilles : pourtant, alors qu’il se rua vers lui, abandonnant son écharpe au sol derrière lui, ce n’était pas pour le frapper. Il contourna l’interdit pour poser ses deux mains sur les joues d’Oz, doucement mais tout de même fermement. Et puis il plaqua ses lèvres contre celles d’Oz, força le passage entre ses dents, pour lui offrir un baiser magnifique, passionné. Parce qu’il aimait Oz, et que les mots ne suffisaient visiblement pas au gosse de riche pour le comprendre : s’il ne l’aimait pas, il n’aurait pas pris le risque de ruiner – ou du moins de compromettre – ses chances avec Edryn qui pouvait très bien passer à tout moment dans ce lieu ouvert. S’il ne l’aimait pas, il ne lui aurait pas donné un baiser d’une telle intensité. Il profita de l’effet de surprise certain pour faire durer ce baiser, un certain temps : et puis, vivement, lorsqu’il quitta les lèvres d’Oz, il s’empara de la parole avant que son meilleur ami ne le fasse.


      « Ne mêle pas ma mère à ça, Oswald Roland. »

      Un ton sec, oui, dur, avec le nom complet de son meilleur ami qui voulait tant dire ici : Oz, tu m’as fait mal, tu sais. Je t’en veux pour ce que tu viens de dire. Car oui, Oz, alors qu’il savait très bien ce qu’il se passait pour Vasco, avait osé évoquer la mère de Vasco. Eileen Fair. Eileen qu’il aimait, vraiment, profondément. Trop, oui. Eileen dont il était séparé depuis trop d’années. Dont il s’était séparé. Volontairement, pour ne pas laisser trop de place à son amour, justement, et pour qu’elle puisse à nouveau vivre heureuse avec son mari. Volontairement, pour pouvoir construire sa vie et éprouver un amour un peu moins violent à l’égard de cette femme merveilleuse qui l’avait éduqué. Profitant encore de la surprise qu’il avait provoquée, et qui ne pourrait sûrement pas durer, il enchaîna, dans un souffle, la voix pleine d’amour.

      « Tu ne m’as pas écouté, Oz ? Je t’aime. Vraiment. Terriblement. Je pourrais te le répéter mille fois, cela ne servirait à rien. Tu le sais que je t’aime. Et personne, jamais, ne pourra te remplacer. Personne ne mérite ta place, personne à part toi. Pas même Edryn. Jamais elle n’aura ta place. Jamais personne ne pourra prendre la place immense que tu occupes dans mon cœur, Oz. Elle est et restera à toi. Pour toujours. Juré. Je te le jure.»

      Vasco ne lâcha pas les joues d’Oz. Il brûlait de sincérité, oui, et il savait qu’Oz ne pourrait que s’en rendre compte, alors que Vasco lui parlait si bas, avec cette voix, avec cette formule pour conclure ses mots. Il le connaissait trop pour ignorer tout ce que cela voulait dire : maintenant, il ne restait plus qu’à attendre la réaction de l’homme qu’il regardait droit dans les yeux, le front presque collé au sien tant il était proche de lui. Il se trouvait dans l’œil de la tempête.
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    Message  Oz Roland Mer 26 Jan 2011 - 21:58

      Oz avait tapé dans le mille, évidemment. Il savait parfaitement qu'évoquer Eileen était la chose à ne pas faire face à Vasco, il savait pertinemment que c'était le sujet qui pouvait le toucher au plus profond de son être, le sujet définitivement et totalement tabou. Il savait très bien que c'était le sujet qui faisait le plus mal, atrocement mal, férocement mal. Rien que prononcer le nom de la mère de Vasco était dévastateur, alors attaquer directement les sentiments bien trop forts que pouvait avoir ce dernier envers elle... C'était mettre la barre encore plus haut. C'était transgresser allégrement les limites, et ce en toute connaissance de cause. Oz ne fut donc pas étonné de cet éclat de douleur parfaitement perceptible qui passa dans les prunelles de Vasco ; il savait qu'il lui ferait mal en prononçant cette simple phrase. Il le savait parfaitement. Et c'était ce qu'il avait cru vouloir, mais il n'en était à vrai dire même pas réellement satisfait. Comme toujours, il ne savait jamais ce qu'il voulait. Il se sentait attaqué, alors il réagissait au quart de tour pour rendre le coup au centuple et attaquer directement les faiblesses les plus à même de faire un mal atroce. Il le faisait automatiquement, constamment. Et il présentait ainsi une prédisposition certaine à blesser facilement et fortement les personnes qui lui étaient les plus chères. Vasco en faisait souvent les frais, pour se trouver trop proche du gosse de riche. Il en faisait encore plus férocement les frais que Sila avait pu l'être, à l'époque où elle s'était un peu trop approchée de lui. C'était toujours la même chose ; graviter autour d'Oswald Roland, s 'approcher de trop près, s'attacher un peu trop, c'était inexorablement souffrir. Souffrir souvent, et férocement. Ce n'était pas la première fois qu'Oz attaquait Vasco au sujet de sa mère, par exemple. Mais il avait été tellement choqué et marqué par la réaction violente de celui-ci, la première fois, qu'il s'était abstenu d'évoquer de nouveau le sujet, comprenant parfaitement que c'était tabou. Ce qui ne l'empêchait cependant pas, dans les situations de crises comme celles-ci, de jouer furieusement toutes ses cartes ; et de blesser celui qu'il adorait plus que de mesure au passage. Intercepter et comprendre ce regard, constater que son attaque verbale avait parfaitement fait mouche, ne rendit pas Oswald satisfait de lui-même mais le calma suffisamment pour qu'il puisse s'abstenir d'en rajouter une couche. Il prit une inspiration, garda les sourcils froncés et le regard rivé sur le jeune homme blond, mais ne fit aucun pas supplémentaire pour s'en aller. Qu'attendait-il au juste ? Il ne le savait pas vraiment lui-même. Peut-être qu'il attendait tout naturellement que Vasco réagisse violemment, qu'il réagisse en conséquence, qu'il réagisse comme lui l'avait fait et empire les choses, pour que l'ouragan détruise encore plus de choses, qu'il dévaste tout, absolument tout sur son passage, et que leur relation soit finalement réduite à néant en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. Que tout se casse, que tout se brise. Même s'il n'en avait absolument, absolument aucune envie. Pendant une seconde, la haine et le dégoût que ressentait Oz envers lui-même atteignirent des hauteurs vertigineuses ; pourquoi devait-il être comme ça ? Pourquoi était-il comme ça ? Pourquoi se sentait-il toujours obligé d'empirer constamment les choses, d'être toujours violent et blessant ? Pourquoi ne pouvait-il pas réagir comme quelqu'un de tout à fait normal, et ne pas se sentir constamment prisonnier de contradictions diverses et de sentiments dévastateurs ? Pourquoi devait-il toujours se sentir mal et mal réagir comme ça ? C'était... tellement insupportable à la longue. Et il ne pouvait absolument rien faire contre. Parce qu'il était ainsi, pour le meilleur et surtout pour le pire.

      Puis Vasco réagit enfin. Il s'arracha à son immobilité, se décolla de la balustrade, abandonna l'écharpe et se rua en avant. Oz n'eut même pas envie de reculer précipitamment ; après tout, il l'avait cherché. Il aurait peut-être juste le temps de lever la main pour protéger quelque peu son visage, si Vasco décidait de lui envoyer son poing dans la figure, mais il n'en était même pas sûr. Et il n'avait même pas spécialement envie de se protéger. Il n'avait aucune envie que le musicien le frappe, cependant, à vrai dire. Ce n'était arrivé que de rares fois, depuis qu'ils se connaissaient (en excluant leur rencontre quelque peu... détonante), mais à chaque fois, ça l'avait profondément perturbé. Des deux, il était celui qui frappait l'autre. Vasco était tellement adonné à la tendresse que le voir devenir violent était toujours choquant, et encore plus quand on était la cible de ses coups et qu'on était Oz. Alors non, il n'en avait vraiment pas envie. Il avait déjà l'estomac qui se contractait légèrement à l'idée ; mais tant pis, il n'y pouvait rien. Evidemment, son vis-à-vis s'empressa de piétiner l'interdit pour s'approcher à toute vitesse. Cela n'étonnait même plus le gosse de riche, à vrai dire, mais ça l'agaçait toujours autant. Et lorsque Vasco prit son visage entre ses mains, Oz ne vit pas tout de suite le coup arriver. Ce n'était pourtant pas la première fois que le musicien lui faisait le coup, mais il était à vrai dire tellement persuadé de se faire frapper qu'il fut complètement pris au dépourvu par le baiser qu'il lui offrit. Il ne devait y avoir que Vasco Fair pour embrasser à pleine bouche et sans prévenir le meilleur ami qui l'avait profondément blessé, au lieu de le ruer logiquement de coups. Vraiment, oui, il ne devait y avoir que lui. Oz était pourtant habitué, à force, de se faire rouler des pelles magistrales par un Vasco qui accordait beaucoup d'importance aux contacts physiques ; il s'y était habitué, oui, et il y avait même pris goût. C'était comme les innombrables câlins vasconiens, les gestes tendres et toutes ces choses auxquelles il n'avait jamais été habitué avant de le connaître. Maintenant, de la part de Vasco, il en avait carrément besoin – dans un sens, pour pouvoir s'assurer que même s'ils n'étaient pas frères, même s'ils n'étaient pas en couple, même s'il n'y avait pas de lien tangible à proprement parler entre eux, il y avait tout de même quelque chose. Il en avait besoin pour être sûr de compter, au moins un peu. Il se raidit tout d'abord, trop surpris qu'il était pour pouvoir mieux réagir, se demandant furtivement s'il n'y avait pas un problème quelque part pour que la situation soit illogique à ce point, puis finit par se détendre imperceptiblement et se laisser faire, le laisser faire, à défaut de pouvoir faire autre chose. Il leva même une main pour agripper de ses doigts la veste de Vasco, et enroula sa langue autour de la sienne pour pouvoir finalement lui rendre le baiser, sans réfléchir, juste parce qu'il en avait envie. Pour oublier pendant quelques secondes, rien que quelques secondes, juste un peu, et...

      Et puis soudain ce fut fini, et il fallut quelques secondes à Oz pour comprendre que Vasco lui parlait d'une voix sèche et venait de prononcer son nom en entier. Bon. Alors de toutes évidences, il lui en voulait quand même. C'était logique, en fait. Mais ce qui l'était moins, c'était le fait de l'embrasser d'abord et de l'engueuler ensuite. La logique purement illogique de Vasco n'était pourtant plus à prouver, et Oz fronça doucement les sourcils en se disant qu'il en avait marre d'être toujours balloté de la sorte. Il pinça un peu les lèvres, jeta un regard noir à Vasco en guise de réponse, mais ne prononça pas un mot. Il détestait quand on l'appelait par son véritable prénom, et il savait très bien ce que cela voulait dire quand le blond l'employait : il lui en voulait. Et Oz n'aimait pas ça. Il l'avait cherché, pourtant, il le savait. Mais il n'aimait pas ça quand même. Il détourna le regard et lâcha la veste de Vasco, gardant les sourcils obstinément froncés et les lèvres crispées en une légère moue contrariée. Ne pas mêler sa mère à ça, hein ? Mais c'était pourtant le bon moment. Si cet abruti se tapait bien un complexe d'Oedipe, son mariage avec l'autre inconnue ne serait forcément qu'une grosse blague. Et Oz avait très bien compris que les sentiments que Vasco avait pour sa mère étaient bien trop forts pour être normaux. Cependant, même s'il fut tenté d'en rajouter une couche par pur esprit de contradiction, il garda la bouche close. Peut-être parce que l'injonction de Vasco était sans appel, et qu'il l'avait parfaitement compris au fond de lui. Alors il ne dit rien. Et le blond reprit la parole, plus bas, dans un souffle, parce que c'était une habitude entre eux d'aborder les sujets sincères et importants à voix plus basse, presque dans un chuchotement, comme si ça pouvait mieux marquer les esprits. Sa voix se fit plus douce, infiniment plus douce, et Oz lutta pour garder les yeux rivés ailleurs. Le visage de Vasco étant cependant toujours si proche du sien, il finit tout de même par lui jeter un coup d'œil, et il lui fut ensuite impossible de détourner le regard. Il n'avait pas envie d'entendre tous ces mots, mais il crevait d'envie de les entendre. Il s'obstinait à penser que Vasco mentait, mais il percevait toute cette sincérité brûlante. Il refusait qu'on l'aime, mais il avait besoin de savoir que Vasco l'aimait quand même. Il ne croyait pas un traitre mot de ce qu'il disait, mais il savait qu'il disait la vérité. Il voulait réagir violemment et se remettre à gueuler, mais il sentait déjà la colère s'estomper pour laisser la place à l'incertitude. Il détestait Vasco, mais il l'aimait à en crever. Les contradictions déchiraient l'âme. Et le fait qu'il se mette à jurer... Dans un sens, c'était peut-être anodin. Mais dans la bouche du musicien, ça ne l'était pas. Parce que lorsqu'il jurait quelque chose, c'était qu'il disait la vérité, qu'il y croyait. Il refusait formellement de jurer lorsqu'il mentait, et Oz se servait de cela sans vergogne pour deviner lorsqu'il disait la vérité ou non. Le fait qu'il jure maintenant, le fait qu'il jure à ces mots, ça voulait tout dire. Absolument tout dire.

      Oz ne sut pas du tout comment réagir. Il avait perdu son froncement de sourcils, et il gardait les yeux rivés dans l'œil azuré de Vasco, retenant sa respiration sans même s'en rendre compte. Il savait qu'il aurait été plus simple pour lui de s'énerver de nouveau et de reculer brutalement, pour rester campé sur ses positions et exprimer toute son angoisse à travers la colère. Mais là... Mais là, il ne savait pas du tout quoi faire. Son regard s'arracha finalement de l'œil de Vasco, pour descendre doucement et s'arrêter sur la joue estropiée. La bague qu'il portait au doigt avait servi, finalement. Mais là encore, il ne ressentit aucune satisfaction à l'idée d'avoir pour la énième fois fait une marque à son meilleur ami en lui portant un coup. Ca arrivait tellement souvent... Peut-être trop souvent, même. Mais cette violence, il n'arrivait jamais à la contrôler. Oz ne réfléchit pas, de nouveau, et leva la main pour lui effleurer la peau du bout des doigts, sous l'estafilade. Est-ce que ça lui faisait mal ? Probablement. Il ouvrit la bouche pour lui poser la question, pensivement, puis se ravisa avec un froncement de sourcils. Allons bon, ce n'était pas le moment de lui demander si sa joue ne lui faisait pas trop mal. Il venait de lui annoncer qu'il allait se marier avec une fille qu'il aimait et qu'il ne connaissait depuis que quelques jours. C'était impardonnable. Impardonnable, en dépit de tout ce qu'il pouvait dire avec toute la sincérité dont il était capable. Non ? Oz laissa doucement retomber sa main.

      - C'est ridicule.

      Sa voix lui parut incroyablement calme, en comparaison des cris de tout à l'heure. Le ton était atone, las, et il avait le visage fermé, imperturbable, sourcils doucement froncés. Et il ne savait même pas pourquoi il disait ça. Qu'est-ce qui était ridicule, hein ? Toute cette histoire ? L'annonce de Vasco ? Le fait qu'il puisse aimer férocement quelqu'un en quelques jours à peine ? Le baiser ? Le fait qu'il lui assure avec cette sincérité flagrante qu'il l'aimait et que ça ne changerait jamais ? Ou bien que lui, Oz, n'était même pas capable de savoir comment réagir à ça ? Probablement tout à la fois. Il se maudissait d'être comme ça, il se maudissait pour ne pas se mettre de nouveau en colère et il se maudissait pour douter, tout comme il maudissait Vasco pour réussir à le perturber comme ça. Il fronça un peu plus les sourcils, et posa les mains sur les avant-bras de son vis-à-vis, pour les tenir et lui enjoindre d'une pression sèche de le lâcher. Parce qu'il ne savait pas du tout comment réagir, mais il savait au moins qu'être aussi proche de Vasco amenuisait toujours inexorablement sa colère. Ce n'était pas pour rien s'il lui avait ordonné de ne plus l'approcher, quelques instants plus tôt. C'était parce qu'il savait pertinemment que Vasco pourrait réussir à le convaincre en étant si proche et en s'y prenant de cette manière. Or, Oz ne voulait pas lui pardonner ce coup-là. Ce n'était peut-être qu'obstination de sa part, mais il ne pouvait décemment pas accepter sans broncher toutes ces conneries. Il fronça donc les sourcils, et s'efforça d'avoir l'air dur et d'avoir l'œil noir lorsqu'il regarda de nouveau Vasco. Intraitable. Il devait être intraitable.

      - Lâche-moi, maintenant. Ou sinon je t'en colle une de nouveau.

      Il était ridicule.
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    Message  Vasco Fair Mer 26 Jan 2011 - 23:54

      Tout pouvait arriver après ce que Vasco avait fait, le pire inclus : pourtant, avec très peu de recul – quelques secondes à peine – il avait l’impression d’avoir agi au mieux. Préserver leur amitié si singulière était sa priorité : n’était-ce pas ce qu’il avait fait en les liant par ce baiser, comme s’il avait tenté d’absorber tous les mauvais sentiments d’Oz et de les étouffer d’amour ? De toute évidence, s’ils n’étaient pas tout deux protégés de l’autre qui pouvait lui faire un mal phénoménal, il avait fait de son mieux pour qu’ils restent ensemble, tous les deux. Il avait alors eu recours au moyen le plus simple pour lui : la marque d’une affection sans bornes dans un baiser. Et tout le laissait croire qu’il avait eu raison de le faire. Parce qu’il l’avait sentie, cette main accrochée à sa veste. Et surtout, il sentit bien, un court instant, juste avant que le blond ne décide lui-même de rompre ce baiser quelque peu forcé, qu’Oz avait fini par lui rendre son baiser. Et ça, Vasco, sans le comprendre et tout en en étant profondément attristé, pensait que c’était bon signe. Il pensait cela car jamais Oz ne lui aurait rendu ce baiser s’il voulait voir leur relation se terminer à l’annonce de ce mariage, comme Vasco l’avait d’abord craint. Parce qu’il ne le lui aurait pas rendu s’il ne l’aimait pas, oui. Oz n’avait pas besoin d’avouer l’amour qu’il ressentait envers Vasco : parfois, ce dernier le comprenait sans parole. Bien entendu, cela ne suffisait pas toujours : et il n’était pas rare que Vasco soit justement persuadé de n’être rien pour celui qui était tout. Mais là, à cet instant précis, il comprit : il comptait. Pourquoi était-il donc paradoxalement si triste qu’Oz lui rende ce baiser ? Tout simplement parce que Vasco sentait quelque chose de désespéré dans la réponse d’Oz : comme si quelque part, il ne le lui avait rendu qu’en désespoir de cause, ne sachant trop que faire d’autre et cherchant une pause pour son cœur égaré. Oui, c’était possible : et plus que blessant pour Vasco qui se trouvait alors face à une marque d’affection qui n’était rien d’autre qu’un prétexte, c’était douloureux de se dire qu’Oz était mal à ce point.

      Il avait eu très peur qu’Oz ne le laisse pas parler : mais bien heureusement, la surprise avait suffit à le faire taire. Il avait encerclé son reproche de deux véritables déclarations, l’une par le corps et l’autre par la parole : ça n’avait aucunement été calculé. Il avait agit spontanément, de manière à calmer et aider Oz au plus vite : cependant, il ne pouvait pour autant tout lui pardonner, c’était impossible. C’était impossible parce qu’Oz savait comme le sujet d’Eileen était tabou, comme il interdisait d’ordinaire à tous d’en parler. Oz avait eu la chance que Vasco l’aime trop pour le laisser après la première fois qu’il évoqua sa mère : et là encore, alors qu’il l’avait terriblement blessé et qu’il avait eu le malheur de jouer encore sur cet interdit, sur le fil du rasoir, Oz n’avait pas perdu Vasco. Ce fait était déjà très significatif en lui-même : il ne faisait qu’appuyer encore un peu la petite déclaration d’amour qui suivait. Quoi qu’il en soit, Oz n’avait pas à parler d’Eileen. Elle n’avait rien à faire dans cette conversation, le problème ne la concernait en rien : Vasco avait beau l’aimer à un point incroyable, il avait la capacité d’éprouver un amour puissant, très puissant, voire trop puissant pour plusieurs personnes à la fois. Eileen, Oz et Edryn, en l’occurrence. Oz chercha d’abord à fuir son regard alors qu’il recevait des explications sur l’amour qu’il lui portait, à lui et seulement lui : parce que là, il n’y avait qu’eux deux, personne d’autre ne comptait dans l’immédiat. Vasco, à l’expression qu’Oz affichait après sa déclaration, compris que son meilleur ami avait été troublé, perdu par le poids de ces mots qui signifiaient alors tant. Oz ne réagit tout simplement pas : ou plutôt, sa réaction était bien trop calme. Son froncement de sourcil quasi perpétuel s’envola. Sa colère sembla quitter ses yeux, qu’il avait fini par perdre dans le sien. C’était comme si Oz cherchait quelle serait la meilleure attitude à adopter sans parvenir à faire la part des choses : Vasco n’avait plus qu’une envie, effacer toute la conversation et prendre son meilleur ami dans ses bras pour lui souffler, doucement, à l’oreille, que tout était fini, tout irait bien. Comme s’il devait rassurer un enfant fragile et perturbé dont le cœur aurait été pris en otage.

      La réaction d’Oz fut un véritable coup au cœur de Vasco. Doucement, il baissa les yeux, légèrement. Sa joue. La joue que sa bague avait éraflée, la joue qui le picotait légèrement, l’air marin chargé de sel n’aidant en rien à calmer la douleur faible qu’il ne sentait de toute façon déjà plus, trop absorbé par les réactions d’Oz. Avec une délicatesse qu’on ne lui connaissait que trop peu, il posa ses doigts juste en dessous de cette blessure qui saignait encore sans que Vasco le sente vraiment. Le contact fut d’une douceur incroyable, d’une intensité inhabituellement faible : Oz ouvrit la bouche, comme pour dire quelque chose, sûrement en rapport avec cette blessure qui semblait le captiver maintenant qu’il était redevenu un peu plus calme. Des excuses ? Vasco n’en attendait pas tant : il savait qu’Oz n’était pas le genre d’homme à s’excuser facilement, loin de là. Il n’avait pas entendu souvent le jeune homme lui présenter des excuses, à vrai dire : et il avait eu à chaque fois l’impression qu’il les arrachait réellement à Oz, celui-ci rechignant vraiment à en présenter, à un point où cela en devenait incroyable pour une personne normale, qui avait de ce fait d’autant plus de mal à le supporter en règle générale. Vasco, lui, s’y était fait. Il aimait Oz pour ce qu’il était, aussi dingue que cela puisse paraître, et il ne voulait vraiment qu’une chose : son bonheur. Mais qu’Oz voulait-il donc dire alors, puisque ce n’était bien évidement pas des excuses ? Une explication pataude ? Peu probable également. Le froncement de sourcil était revenu : peut-être qu’Oz se sentait coupable, auquel cas Vasco n’avait presque aucun moyen de le savoir. Il ne voulait pas qu’Oz se sente coupable : au fond, c’était lui qui était coupable. C’était lui qui avait fait cette annonce. C’était lui qui n’était pas normal.

      Cela ne changeait rien au problème : jamais Vasco ne saurait ce qu’Oz avait voulu dire à cet instant puisqu’il sembla se raviser, avant de prendre la parole. Ridicule ? De quoi parlait-il ? Vasco laissa plus ou moins couler, du moins ne réagit-il visiblement pas lorsque son meilleur ami prononça ce mot. S’il parlait du rockeur… Celui-ci en avait bien conscience. C’était ridicule d’accorder si vite sa confiance, d’aimer si vite, de croire au grand amour et au coup de foudre. Et pourtant il y croyait, il le faisait, comme si une part de lui avait encore besoin de croire aux contes de fées. Il savait que sa vision de l’amour était peut-être un peu trop idyllique : il avait après tout assisté à l’autodestruction d’un couple, et ses propres expériences amoureuses n’avaient pas étés de grandes réussites, surtout qu’il cherchait plus l’oubli que l’amour alors. Mais là, il sentait au plus profond de sa chair que c’était radicalement différent. Il y avait quelque chose, c’était impossible autrement. Et tant pis si c’était totalement ridicule, cela ne changerait nullement sa façon de pensée et l’idée qui lui trottait dans la tête depuis qu’il l’avait vue : Edryn Edge était la femme de sa vie. Peut-être même Oz trouvait-il sa déclaration à son intention ridicule : encore une fois, il n’en avait rien à faire. L’essentiel, pour lui, était qu’Oz ait compris à quel point il était important. A quel point il pouvait l’aimer, à quel point il était même nécessaire à la vie de son meilleur ami. Vasco se moquait du reste : tant qu’il s’assurait qu’Oz ne l’abandonnerait pas, tout irait bien. Tant qu’ils restaient ensemble, ils seraient capable de traverser le meilleur comme le pire, les royaumes comme les empires, et pourraient sans le moindre problème vivre. Une vie sans le jeune homme aux cheveux d’ébène était juste inconcevable pour Vasco.

      Le cadet des deux jeunes hommes posa ses mains sur les avant-bras de son ainé, dans l’espoir que celui-ci daigne le lâcher. Il accompagna d’ailleurs ses mots d’une menace dure : mais Vasco avait surtout l’impression qu’Oz cherchait désespérément à récupérer ses derniers relents de colère pour cacher le reste. Le seul mystère réel, c’est qu’il ignorait plus ou moins quel était ce reste. Il comptait donc le frapper si Vasco ne daignait pas le lâcher ? Ce n’était pas comme s’il n’en avait pas l’habitude… C’est pourquoi Vasco sembla tout d’abord lâcher Oz, relevant ses bras et les mains quittant les joues du jeune homme. Mais ce fut uniquement pour pouvoir enrouler un bras autour de la taille d’Oz, un autre autour de ses épaules et l’attirer assez brusquement à lui, pour le serrer fort dans ses bras, dans une étreinte qui se voulait aussi rassurante qu’aimante. Il savait ce qu’il risquait : il le souffla doucement à Oz, conscient des risques qu’il prenait.


      « Tu peux me frapper si tu veux. »

      Il n’en avait après tout rien à faire, comme le démontrait son attitude suicidaire. Et puis il sourit, doucement, tendre malgré la tension qu’il y avait inévitablement. Il n’hésita pas plus que nécessaire pour lâcher la suite, dans un murmure aimant.

      « Ce n’est pas ça qui m’empêchera de t’aimer. Je ne te laisserais jamais. Tout ira bien, Oz. »

      Oui, Vasco essayait alors de rassurer son ami, n’énonçant que des strictes vérités : s’il y avait bien une personne avec qui il était très lié, qu’il ne voulait pas perdre, c’était Oz. Il ne supporterait de le voir s’éloigner de lui sous aucun prétexte. Et tant pis s’il devait se faire frapper, il resterait là, à faire subir à son meilleur ami une étreinte pleine d’une douceur infinie malgré sa tendresse incroyable. L’écharpe qu’il avait abandonnée derrière lui ne comptait pas : même sa guitare, dans l’instant, ne comptait plus. Tout ce qu’il voulait, c’était apaiser la tempête et rendre son meilleur ami heureux.
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    Message  Oz Roland Dim 13 Fév 2011 - 19:46

      Évidemment, il fallait qu'il désobéisse. Évidemment, il fallait que Vasco passe outre l'injonction et n'en fasse qu'à sa tête, toujours quand il ne le fallait pas – ou plutôt, au contraire, toujours dans les situations où il le fallait justement. Oz crut qu'il aillait lui obéir, pourtant, pendant une seconde, lorsqu'il enleva les mains de ses joues. Il y crut, oui, et lorsque le blond l'attira à lui la seconde suivante, il se fit la furtive réflexion d'être bien con pour y croire ne serait-ce qu'une fraction de seconde : ce type avait toujours le chic pour lui désobéir quand il ne fallait pas... Pourquoi aurait-ce été différent aujourd'hui ? Dans un sens, cela rassura le gosse de riche. Dans un sens seulement, quelque part au fond, quelque part dans les tréfonds, les débris de son esprit. Mais surtout, surtout, cela raviva la flamme de sa colère. D'abord profondément contrarié, il posa une main sur le bras qui lui entourait la taille, dans l'intention d'y serrer les doigts et de s'y agripper pour le forcer à lâcher, mais il se figea lorsque Vasco reprit la parole dans un souffle. Il pouvait le frapper, s'il voulait ? Comment ça, il pouvait le frapper, s'il voulait ? Se moquait-il de lui ? Est-ce qu'il pensait peut-être que lui, Oswald Roland, avait besoin de son autorisation, de son aval, de sa bénédiction pour pouvoir le frapper ? Indubitablement, il devait se foutre de sa gueule. Il se foutait forcément de sa gueule. Cette phrase, si elle aurait du à la base paraître pour anodine ou apaisante, ne fit que l'énerver davantage. Les mots qui suivirent, prononcés dans un murmure qui avait toujours généralement rassuré le gosse de riche, furent pourtant l'étincelle de trop et achevèrent d'embraser à nouveau cette colère ardente qui couvait toujours sous les cendres. Tout irait bien ? Tout irait bien ? Il croyait quoi, ce con ? Il croyait peut-être qu'il allait se contenter de ça ? Qu'il allait y croire ? Qu'il allait hocher la tête et s'accrocher désespérément à cette promesse aussi grotesque que dérisoire ? Qu'il allait croire que tout irait bien ? Bordel, il se foutait de sa gueule, il se foutait encore et toujours de sa gueule, il en rajoutait une couche, il l'agaçait, il l'énervait, il le frustrait, il lui faisait mal, il n'était qu'un enfoiré, un bel enfoiré, il le prenait pour un gosse, il osait, il osait, il osait... La corde lâcha de nouveau, et sa voix éclata, vibra, explosa.

      - Mais PUTAIN, je ne suis PAS un GAMIN ! Et ARRÊTE DE FAIRE ÇA !

      Tout ça, tout ça c'était trop ; l'annonce, la nouvelle, la trahison, le coup à l'âme, les excuses, le baiser, les affirmations, les désobéissances, la proximité, l'étreinte forcée, les promesses à la con, c'était trop, trop, trop. Sourcils froncés et traits du visage défigurés par la colère, par la frustration, par l'exaspération, par le désespoir, il empoigna les cheveux blonds de Vasco d'une main et tira, brusquement, brutalement, il tira pour lui faire mal, pour le faire lâcher, pour lui ordonner de lâcher, pour lui ordonner de le laisser tranquille, d'arrêter, de le laisser partir. Il tira brusquement, puis le lâcha pour pouvoir lui balancer un coup de coude, et un autre, puis chercha à reculer en y mettant toutes ses forces. Il rua, encore et encore, laissa éclater quelques insultes, quelques injonctions, lui agrippa un bras, le serra de ses doigts, fort, tira pour le faire lâcher prise, il le poussa de ses mains, lui assena de violents coups de coude, lui écrasa le pied, chercha encore à reculer, à s'échapper, lui griffa le dos d'une main, tira violemment sur le bras qui entourait sa taille, rua encore, se débattit, s'essouffla, lui tira à nouveau les cheveux, lui cria à l'oreille de le lâcher, de le lâcher tout de suite, lui envoya un coup de genoux, un coup de coude, le griffa encore, se débattit encore, et sa voix continuait de vibrer, d'éclater, d'exploser, il lui hurlait de le lâcher, il lui hurlait d'arrêter, il lui hurlait de la fermer, il hurlait qu'il n'était pas un gosse, qu'il n'était pas un gosse et qu'il n'avait pas besoin de ça, qu'il ne voulait pas, qu'il ne voulait pas, qu'IL NE VOULAIT PAS. Il ruait, il ruait encore, il se débattait, il hurlait, il crachait, il s'énervait et il s'essoufflait, il se fatiguait, et l'autre ne voulait pas lâcher. Il crut s'être dégagé à un moment, il crut s'être suffisamment dégagé pour pouvoir bondir en arrière, du côté, n'importe où, et il trébucha dans sa hâte, puis poussa un feulement de chat furieux en sentant les doigts de Vasco se refermer autour de son poignet et le tirer de nouveau. Mais qu'il le lâche, QU'IL LE LÂCHE ! Il grogna, pesta, siffla, et il se débattit encore, rua encore, tenta de repousser Vasco avec le plat de la main, les coudes, les genoux. Sa respiration était sifflante, haletante, colérique, et il manquait d'air, il tremblait, il n'en pouvait plus. Et lui qui ne voulait pas lâcher... C'était trop, trop horrible, trop épuisant, trop énervant, trop frustrant. Trop.

      - Arrête...

      Un souffle, une fatigue, une lassitude, presque une supplique. Arrêter quoi ? Arrêter tout. Le corps tendu comme un arc, Oz arrêta néanmoins de se débattre comme un beau diable et ferma les yeux, un instant, pour prendre enfin une inspiration, maladroitement. Il capitulait. Il le savait depuis leur toute première rencontre, que Vasco avait une poigne de fer qu'on ne lui soupçonnait pas forcément en le voyant. Et pourtant, sa résistance était à toute épreuve et sa force, étonnante de fermeté. Il le savait, mais cela ne l'empêchait jamais d'essayer, et d'essayer encore, de frapper, de se débattre, de tenter d'échapper à ces étreintes forcées qui finissaient toujours invariablement par le calmer. Et maintenant, il était épuisé. Fatigué. Las. Vraiment très las. Il aurait aimé pouvoir effacer cette entrevue de sa mémoire. Qu'elle n'ait jamais eu lieu. Que rien de tout cela n'ait jamais eu lieu.

      C'était idiot. Vasco aimait beaucoup de monde. Il adorait sa mère plus que tout. Il avait connu un nombre incroyable de personnes durant ces vingt-trois premières années d'existence. Il aimait toutes les femmes. Il avait bon nombre d'amis. Il avait même des fans, et ce nombre ne cesserait d'augmenter au fil de l'ascension de son succès de chanteur. Il s'était de toutes évidences très vite attaché à Sila, et ce alors que ça ne faisait pas encore un mois qu'elle était là. Et maintenant, il avait rencontré une fille qui était devenue la plus importante de sa vie ou tout du moins l'une des plus importantes avec sa mère, en quelques jours seulement. C'était risible. C'était abominable, toutes ces personnes qu'il aimait et qui l'aimaient en retour. Non pas qu'Oz trouvait cela fondamentalement étrange, qu'autant de gens apprécient Vasco : c'était même tout à fait normal, à ses yeux. Qui pouvait bien le détester, franchement ? Excellente question. Peut-être son père, mais c'était là un cas bien à part. Ce succès, tous ces gens, c'était normal. Naturel. Logique. Mérité. Mais ça faisait vraiment un mal de chien, quand on était bouffé ainsi par cette conne de jalousie malsaine et possessive. Lui, au final, il n'était qu'une personne parmi les autres. Ça aurait du lui suffire, dans un sens. Il n'aurait pas pu supporter n'être rien pour celui qui était tout, alors ça aurait du lui suffire. Sa place aurait du lui suffire, les paroles de Vasco auraient du lui suffire, les gestes, les promesses, les affirmations, tout aurait du lui suffire. Sauf que non. Indubitablement non. Ça le rendait malade, tous ces autres. Ça le rendait malade, d'être dans le même sac que tous ces autres. Ça le rendait malade, de voir Vasco aimer tous ces gens. Ça le rendait malade et techniquement, il n'avait strictement rien le droit de dire. Techniquement, il n'avait pas le droit d'y trouver à redire. Techniquement. Dans sa vision des choses, dans sa conception des choses, dans son monde, dans sa vie, dans son esprit, Vasco était à lui. C'était sa chose, la sienne, sa propriété. À lui. Sauf que fondamentalement, il le savait, au fond, en vérité, que ce n'était pas réellement vrai. Et ça faisait mal.

      Il ouvrit les yeux. Il n'avait plus rien à faire des passants, et ne songea même pas à tourner la tête pour voir si certains les regardaient bizarrement, alertés par tout ce tohu-bohu. Il était encore tendu, et il inspira lentement. Il refusa de regarder Vasco, et tourna plutôt les yeux en direction des vagues qui s'écrasaient lentement sur le sable. Il avait tellement envie de partir. De tourner les talons, de s'éloigner, de courir, de s'épuiser, d'oublier, puis de s'arrêter dans un bar pour s'abandonner à l'alcool. C'était tout ce qu'il pouvait faire, de toutes façons. Il n'accepterait jamais ce que Vasco venait de lui dire. Et il ne pouvait rien faire pour le faire changer d'avis, pour lui ordonner d'oublier cette fille qu'il aimait éperdument et ridiculement. Dans un sens comme dans l'autre, il était coincé. Il devait subir. Comme toujours, il devait subir. Ça le dégoutait. Horriblement. Atrocement. C'était lassant. Il parla, finalement, d'une voix beaucoup plus tranquille, plus basse, plus plate, plus atone, plus lasse, plus résignée, plus dégoûtée, plus froide.

      - Tu fais ce que tu veux. Je n'ai rien à dire.

      Il voulait juste partir. Et oublier. Fuir, en fait.
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    Message  Vasco Fair Lun 14 Fév 2011 - 0:09

      Douleur. Elle explosa dans tout son corps alors qu’Oz le frappait, encore et encore, le frappait inlassablement. Il voulait se libérer. Il voulait se libérer comme d’habitude, et comme d’habitude Vasco refusait de le lâcher aussi facilement. Il avait vraiment l’habitude de l’incroyable violence de son meilleur ami : il avait sérieusement l’habitude de subir, subir sans rien dire, sans rien faire. Rien sinon le garder près de lui, le forcer à rester dans ses bras pour peut-être le calmer. Il ne savait pas vraiment ce qui avait bien pu mettre de nouveau Oz tant en colère : tout ce qu’il savait c’était que c’était entièrement sa faute. Mais il refusait de le laisser partir comme ça, sur un tel élan de colère et, sans aucun doute, avec la certitude qu’Edryn avait réduit à néant la place qu’avait Oz chez lui – du moins Vasco, connaissant parfaitement le gosse de riche, pensait qu’il raisonnait alors ainsi. C’était plus qu’un câlin refusé : c’était une véritable confrontation d’autorité, de volonté. Et comme toujours, inlassablement, Vasco tenait. Le plus solide des rocs dans la tempête. Peu importaient les bleus, peu importaient les marques, peu importaient même les saignements que les griffures d’Oz provoquaient sur les mains, les bras : son meilleur ami pouvait bien lui briser les os, lui vivant il ne le lâcherait jamais. Les coups pleuvaient, grêlaient, et lui ne faisait rien d’autre que le retenir du mieux qu’il pouvait, malgré tout le mal qu’Oz lui faisait. Tout était en train d’exploser. Son bras, ses mains, ses côtes, ses tympans, son crâne à mesure qu’il lui tirait les cheveux. Oh, il se doutait qu’Oz ne lui avait rien cassé pour l’instant : la douleur serait autrement plus insurmontable. Mais il lui faisait mal, assurément. Un instant, après un coup particulièrement douloureux dans le plexus et d’un cri hystérique, la prise de Vasco se relâcha : l’instant d’après il avait de nouveau saisit le poignet de son ami pour le propulser contre son torse et le forcer à revenir, à rester là, à se calmer tout contre lui. Si Oz ne se débattait pas tant, il pourrait entendre les battements précipités du cœur de l’artiste. Il fatiguait, lui aussi. Il était loin d’être invincible. Mais à ce jeu là, c’était toujours lui qui gagnait.

      Le temps lui donna raison : peut-être que les coups ne s’étaient abattu que pendant un court instant. Vasco avait l’impression qu’Oz le frappait depuis des heures. Il avait mal partout. Il sentait le sang couler, légèrement, de sa main : il sentait là le picotement, familier pour l’avoir senti sur sa joue peu avant, d’une blessure ouverte. Et surtout, il sentait que s’il ne tenait pas Oz si fort, il se serait sûrement effondré sur le coup de la douleur qui lui vrillait le corps. Ses côtes surtout avaient été mises à mal : ses bras, aussi. Et sa tête. Il avait si mal au crâne… Il ne savait même pas si c’était à cause des nombreuses fois où Oz lui avait tiré les cheveux ou si c’était simplement dû à ses hurlements. Les deux, sûrement. Il avait mal partout, oui, même ses jambes n’avaient pas été épargnés de quelques coups de pieds, volontaires ou non : mais il avait tenu. Et c’était pour lui tout ce qui comptait. Haletant de cette lutte qu’il avait dû mener de front pour maintenir le gosse de riche tout contre lui, son cœur battant plus fort que jamais, Vasco était aussi soulagé que persuadé qu’il écoperait de bleus magnifique : il s’en moquait à vrai dire. Oz semblait tout aussi épuisé que lui : au moins n’avait-il pas à craindre un nouvel assaut dans les minutes qui suivraient. Voilà qu’Oz cessait de se débattre, oui : Vasco pouvait enfin espérer avoir un peu de temps pour se remettre de toute la brutalité de l’ouragan qui s’était abattu sur lui. Peut-être que la tempête allait repartir de plus belle par la suite : mais il se tenait prêt. Il maintiendrait sa prise si assurée, si efficace. Il resterait là quoi qu’il advienne. Oz n’était pas près de se débarrasser de lui, quand bien même il en aurait une envie incroyable. Parce qu’alors qu’ils se liaient de plus en plus, Vasco s’était fait la promesse d’être toujours là pour Oz. Toujours. Pour le meilleur comme pour le pire. Et même si Oz le détestait au final.

      Il lui souffla un mot, une fois qu’il retrouva son souffle. Arrêter. Il devait arrêter. Mais quoi ? De l’aimer ? Impossible. D’aimer Edryn ? Impossible. De le tenir ? Impossible. Parce qu’il tenait trop à lui pour ça : non, il ne comptait pas arrêter. Le blond était décidé à continuer à désobéir : quand on fréquentait le plus jeune des fils Roland, on savait qu’il ne fallait surtout pas obéir à ce genre d’ordre. Pas toujours. Il y avait certes des vrais « arrête ». Mais il y avait aussi de nombreux ordres de ce type qui ne voulait dire qu’une chose : continue. Continue même si c’est insupportable. Vasco ne les différenciait pas toujours : mais là, il était persuadé qu’il devait continuer. Même si Oz ne s’en rendait pas compte lui-même. Il devait continuer, pour leur bien à tout les deux. Pour leur amitié. Et ça le tuait de désobéir à cet ordre qui était dit sur un tel ton… C’était presque une supplique. C’était presque une supplique et ça aurait pu changer la donne : Oswald Roland ne suppliait jamais personne. Un long silence s’installa, durant lequel ni l’un ni l’autre ne semblait décidé à parler : ils devaient tous deux être trop occupés à reprendre leurs souffles. Vasco aurait alors donné cher pour pouvoir pénétrer l’esprit du jeune homme qu’il serrait dans ses bras, pour pouvoir savoir à quoi il pensait actuellement. Les choses auraient été plus simples ainsi : il aurait pu le rassurer exactement sur ses peurs qu’ils connaitraient parfaitement, il aurait pu l’aider plus efficacement. Mais il n’en avait pas la capacité et après réflexion, c’était mieux ainsi : il n’avait pas à violer le sanctuaire sacré des pensées d’autrui, encore moins quand il s’agissait d’une personne qu’il adorait comme il adorait Oz. Il ne supporterait pas qu’on agisse ainsi envers lui-même. Ainsi, même si la tentation était grande, il préférait vraiment qu’Oz lui fasse un jour suffisamment confiance pour se livrer à lui : ça n’arriverait sûrement jamais, à l’idée de Vasco en tous cas. Mais ce n’était pas grave. Il restait là. Sa loyauté était sans failles.

      Oz prit de nouveau la parole. Il aurait pu être amer sur ces mots : il était juste glacial et c’était encore bien pire. Ne comprenait-il donc vraiment pas à quel point son avis comptait pour Vasco ? Certes, il ne cesserait pas d’aimer cette femme qu’il avait rencontrée pour autant. On ne pouvait contrôler son amour. Mais il avait tout à dire. Il était le seul. Le seul en mesure de lui parler aujourd’hui à propos des sujets les plus sensibles. Le seul à pouvoir le faire douter de choses aussi viscérales que l’amour qu’il ressentait envers Edryn. Le seul dont la voix comptait assez pour qu’il lui demande d’être son témoin. Le seul qu’il ne voulait jamais, jamais laisser tomber dans cette vie sur Sannom, quoi qu’il arrive, le seul qui avait droit à être appelé son « meilleur ami », le seul pour qui il était prêt à presque tous les sacrifices, le seul qui avait droit à cette place si particulière dans son cœur, le seul qui avait droit à cette relation au fond tellement innommable tant elle était complexe… Il était le seul, et il ne s’en rendait même pas compte.

      Douceur. Les baisers qui s’étaient mis, d’un coup, à poindre sur les joues, les tempes, le front, la commissure des lèvres d’Oz étaient en étaient plein. Il ne s’agissait que de ça : de la douceur à l’état brut. Une douceur qui appelait au calme et à l’ouverture de son cœur. Une douceur qui disait « je t’aime », tout simplement. Une douceur qui n’avait qu’un but : montrer à Oz, lui faire enfin comprendre, définitivement, que la place dans le cœur de Vasco était sûre et incroyablement forte. Sa lèvre inférieure était juste légèrement enflée, pas de grand-chose : un coup perdu, sûrement. Mais chaque baiser lui faisait mal : et pourtant il continuait. Là où Oz l’avait roué de coup, lui rouait son meilleur ami de baisers. La thérapie par l’amour. Il souhaitait, avec toute sa tendresse coutumière, qu’Oz finisse par aller bien. Vraiment. C’était là son vœu le plus cher : s’il pouvait l’aider à se sentir bien, il ferait tout ce qui était en son pouvoir. Il ne savait en réalité pas quoi faire. Alors il se montrait à l’écoute, présent, et tendre. Plus tendre que n’importe qui. S’il débarquait parfois pour dormir dans la chambre d’Oz, c’était pour que celui-ci se sente moins seul, pour qu’il ait conscience que Vasco Fair était là, et que sa fidélité envers lui était inaltérable. Après un long baiser sur la tempe, Vasco murmura à l’oreille de son ami, la voix brisée, une chose qu’il ne se serait jamais attendu à dire en pareille circonstance, c'est-à-dire alors qu’il venait de trouver la femme de sa vie.


      « Je suis désolé, Oz. »

      Brisé, oui : mais de quoi s’excusait-il ? Persuadé qu’Oz ne comprendrait pas s’il ne précisait pas, il s’empressa de le faire.

      « Je suis désolé, mais ton avis compte, Oz. Tu es bien le seul dont j’écoute l’avis là-dessus. Enfin, le seul avec elle… Eileen. Et tu es le seul à pouvoir me le donner. J’ai douté tout à l’heure, tu sais. Je me suis demandé si je n’allais pas un peu vite. Mais… Je suis sûr que je vais pouvoir construire quelque chose avec elle. Fais-moi confiance, Oz. Je t’en supplie. Je pense pouvoir construire quelque chose avec elle… Mais pas sans toi. »

      Au fur et à mesure de sa tirade, son murmure se fit plus bas, sa voix se brisait. Et il atteignit son minimum, mais néanmoins audible pour Oz qui était si près de lui, l’instant d’après.

      « J’ai un putain de besoin de toi, Oz, un truc de dingue. Si tu pars… Je pars aussi. »

      Oui, si Oz partait, lui mourrait. Ou du moins le Vasco actuel, celui qu’on connaitrait, mourrait : il ne serait plus que l’ombre de lui-même, et il finirait sûrement par se tuer d’une façon ou d’une autre. Oz était une nécessité dans sa vie. Et le double sens, il le savait, n’échapperait pas à Oz. Il craignait que le gosse de riche ferme volontairement les yeux sur ce double sens qu’il était trop intelligent pour ne pas comprendre : mais il y avait trop de choses en jeu pour que seulement il puisse croire qu’Oz oserait faire exprès d’ignorer l’alarme qui venait d’être tirée. Parce que le fruit de cette tempête pouvait alors avoir des circonstances dramatiques.
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    Message  Oz Roland Mer 16 Fév 2011 - 16:41

      Oz se concentra sur sa respiration pendant un instant, et uniquement sur ça. Cette respiration sifflante qu'il tâcha de rendre plus calme, inspirant doucement, bloquant, expirant silencieusement, cet air qu'il faisait entrer et sortir méticuleusement pour s'éviter de penser à ce qu'il devrait irrémédiablement penser, cet air qu'il reprenait avidement, doucement, nécessairement. Il se concentra sur ça un instant, et il garda ses prunelles de jade rivés sur ces vagues qu'il voyait inlassablement ondoyer puis s'écrouler sur la plage, dans un rythme ininterrompu et impossible à interrompre. Il se concentra sur ça et il voulait continuer de se concentrer sur ça, mais les lèvres de Vasco qui déposèrent soudain des baisers sur son visage, sur ses joues, au bout de ses lèvres, sur ses tempes, sur son front, tous ces baisers légers, tendres, rassurants, pleins de sens, tous ces baisers qui pleuvaient comme ses coups avaient plu quelques instants plus tôt, tous ces baisers le déconcentrait et le faisait invariablement revenir à l'instant présent. Il secoua un peu la tête, sourcils insensiblement froncés et légère moue agacée aux lèvres, mais il n'avait pas, il n'avait plus la force d'en faire plus pour lui enjoindre d'arrêter. Il était fatigué, las, et il sentait une sourde et légère pulsation dans ses mains, parce qu'il n'avait pas arrêté de pousser, de frapper, de tirer, et qu'il avait mal aux doigts comme il avait mal partout, comme il avait mal à l'âme. Il était fatigué, alors il détourna le regard en gardant les sourcils imperceptiblement froncés, mais ne fit pas un geste pour exiger que Vasco cesse cette avalanche de tendresse, qu'il arrête de le retenir, de le rassurer, et qu'il le laisse enfin se dégager de là pour se barrer plus loin. Il ne fit rien parce qu'il savait que ça aurait été inutile, à l'instar de tous ces coups précédents qui avaient été eux aussi vains dès le départ. Il l'avait su, pourtant. Il le savait très bien, maintenant, à force. C'était lassant, à la longue : c'était toujours Vasco qui gagnait à ce jeu-là. Toujours. C'était frustrant.

      Le souffle brisé de ce dernier lui parvint à l'oreille, et Oz fronça légèrement les sourcils avec incompréhension. Il était désolé ? Mais il était désolé de quoi ? De le retenir contre son gré dans ses bras ? De le forcer à se calmer ? De l'avoir énervé comme ça ? De l'avoir blessé comme ça ? De lui avoir annoncé cette nouvelle qui, si aux yeux de personnes normales aurait pu paraître aussi anodine que bien accueillie, n'était pour lui qu'ouragan blessant et dévastateur ? Il était désolé d'avoir dit ça ? Il était désolé de lui désobéir ? Il était désolé parce qu'il ne changerait en aucun d'avis, quelque soit ce qu'il pouvait dire ? Il était désolé, mais il était désolé de quoi ? De tout ça à la fois ? Oz ne voulait pas de ses excuses. Il n'en voulait pas, parce que les restes de sa logique brisée lui donnait l'impression que tout cela était profondément ridicule, dans un sens, mais surtout parce qu'il ne les acceptait pas. Il n'en voulait pas, Vasco pouvait les garder. Il n'en voulait pas, elles ne changeraient strictement rien et il le savait. Il ne prononça pas un mot, ne fit pas un geste, et son vis-à-vis enchaîna sur ce même ton, si bas qu'il en était presque inaudible. Mais il entendit, parce qu'il était tout contre lui. Il entendit, et il écouta. Au final, il était désolé parce que l'avis d'Oz comptait. Parce qu'il avait besoin de cet avis. Son avis comptait, et ce même s'il ne voulait pas le donner. Le brun se raidit quelque peu, mais continua d'écouter. Il ne voulait pas entendre ça. Il ne voulait pas donner son avis. Il ne voulait pas continuer d'en parler, il ne voulait pas continuer d'y penser. Il ne voulait pas dire quelque chose tout en sachant que cela ne changerait rien, il ne voulait pas mentir en disant que tout allait bien, il ne voulait pas accepter parce qu'il ne le voudrait jamais, il ne voulait pas faire de mal à Vasco, pas plus qu'il lui en faisait déjà, il ne voulait pas l'aliéner mais il le voulait pour lui, il ne demandait qu'à accepter tout ça mais lui vivant, il ne pourrait jamais, jamais, ô grand jamais, il voulait être normal mais il était déchiré, il était brisé, il n'était rien, il aurait voulu être quelqu'un de meilleur pour Vasco, pour tout le monde, quelqu'un de plus normal, de plus sain, mais il ne pouvait pas, il ne pouvait pas parce qu'il était ce qu'il était et ce qu'il était le dégoûtait, le rebutait, l'exécrait, il en avait marre et il ne voulait rien dire, il voulait garder tout ce mal pour lui, il ne voulait pas qu'on s'approche trop près, il ne voulait pas qu'on lui fasse encore plus de mal qu'on lui en faisait déjà, il ne voulait plus penser à ça, il ne voulait plus avoir mal, il ne voulait plus faire de mal, il voulait juste...

      Partir ? Comment ça, partir ? Tiré brutalement du maelström de ses réflexions, Oz quitta les vagues des yeux pour poser son regard ébahi sur la partie du visage de Vasco qu'il pouvait voir en tournant un peu la tête. Attendez, attendez, attendez. Il y avait quelque chose qui n'allait pas. Quelque chose qui tirait une sonnette d'alarme, là quelque part. Il y avait quelque chose, il y avait quelque chose dans ce qu'il avait dit, quelque chose qui réveillait un écho, qui foutait une baffe pour le réveiller, quelque chose qu'il ne pouvait en aucun cas ne pas comprendre, quelque chose qui... Partir. S'il partait, il partait aussi. Non. En aucun cas. Impossible. Il n'avait pas le droit. Figé, Oz garda le silence quelques courts secondes. Il ne connaissait que trop bien Vasco, maintenant. Il avait parfois du mal à comprendre certaines choses, il avait parfois du mal à se rendre compte de certaines choses, mais il le connaissait suffisamment pour comprendre que ce verbe n'était pas anodin dans sa bouche. Et il le connaissait suffisamment pour comprendre que Vasco serait parfaitement capable de mettre fin à ses jours, si jamais il y était amené. Par contre, il doutait franchement que son simple départ puisse entraîner celui du blond : c'était lui, plutôt, qui avait un putain besoin de lui. Un sacré putain de besoin de lui, même. Un besoin incommensurable, un besoin indéchiffrable, un besoin innommable. Si jamais Vasco le laissait, si jamais Vasco partait, si jamais Vasco s'en allait, l'abandonnait, il serait quoi, lui ?

      Oz sans Vasco.
      Oz sans Vasco.
      Il ne serait rien.
      Rien.

      - Tu n'as pas le droit.

      L'injonction claqua sans qu'Oz y prenne garde, et il plaqua dans un même temps sa main sur la bouche de Vasco comme pour lui enjoindre de se taire. Il n'avait pas le droit. Il n'avait pas le droit. Il n'avait pas le droit de quoi ? Il n'avait pas le droit de dire tout ça, il n'avait pas le droit de s'attacher si fort à une inconnue, il n'avait pas le droit de la faire entrer dans la balance. Il n'avait pas le droit de le laisser, et il n'avait pas le droit de dire avoir besoin de lui alors que c'était l'inverse, que c'était lui, Oz, qui avait un putain de besoin de lui. Il n'avait... Non. Non, il fallait qu'il arrête de penser de la sorte. Il fallait qu'il arrête. Il fallait qu'il arrête, vraiment. Oui, il avait un putain de besoin de Vasco. C'était indéniable. Mais pourquoi refusait-il de croire à l'inverse ? Vasco venait de le dire. C'était lui qui l'avait dit en premier. Il l'avait dit avec cette voix, si basse, si basse, tellement basse. Il l'avait dit, qu'il avait un putain de besoin de lui. Et qu'il partirait s'il partait. Qu'il se tuerait s'il n'était pas là. Qu'il mourrait, qu'il partirait s'il n'était pas là. Et ça, ça, non... Non, c'était impossible. C'était de ça dont il n'avait pas le droit. Il n'avait en aucun le droit de partir. Il n'avait en aucun cas le droit de mourir, il n'avait en aucun cas le droit de disparaître. Il n'avait en aucun cas le droit de disparaître dans le néant, il n'avait en aucun cas le droit de passer dans un au-delà inconnu. Il n'avait pas le droit de lui faire peur comme ça, il n'avait pas le droit de dire ça, il n'avait pas le droit d'envisager ça. En aucun cas.

      - Tu n'as pas le droit de partir.

      Il le répétait sans s'en rendre compte, et sa main quitta la bouche de Vasco pour glisser dans sa nuque, dans son dos, et il glissa son autre bras autour de ses épaules, l'empoigna maladroitement, vivement, et il l'attira brusquement à lui, plus proche encore, il s'agrippa à son cou, à son dos, et il le serra fort, il lui tint la nuque, il colla sa tempe contre la sienne, il fronça les sourcils en regardant par-dessus son épaule, il sentit son cœur tambouriner dans sa poitrine, il le serra plus fort encore sans penser au fait qu'il puisse avoir mal à cause des coups précédents, il le serra plus fort encore sans penser qu'il pouvait paraître ridicule et complètement allumé, là, à le frapper, à lui hurler dessus puis à l'étreindre comme s'il avait peur de le voir disparaître, il le serra plus fort encore sans penser à tout ça, il s'y agrippa, et il s'exprima de nouveau à voix basse, toujours dans la même idée, dans la même optique, inlassablement :

      - Je te l'interdis.

      Oui, il lui interdisait de partir, il lui interdisait de mourir, il lui interdisait d'envisager des choses pareilles. Il lui interdisait d'en dire plus, et il lui interdisait de disparaître. Il le serra fort contre lui un moment, il le serra fort sans penser au reste, et il attendit juste que les battements frénétiques de son cœur se calment, qu'il se calme tout court, il attendit un moment avant de desserrer doucement et progressivement son étreinte. Il laissa ses bras retomber, sans violence, et il ne recula pas vraiment, il posa son front sur l'épaule de Vasco. Il garda les yeux ouverts ainsi que le silence, encore un instant, puis finit par pousser un soupir presque inaudible. Lorsqu'il prit la parole, ce fut d'une voix si calme et si plate que cela l'étonna lui-même, un peu. Ce calme devait certainement être du à la résignation. A une putain de résignation qui faisait mal et qui ne durerait peut-être pas, mais une putain de résignation quand même. Ou alors une lassitude, une fatigue, une capitulation partielle qui n'en était même pas vraiment une.

      - Mon avis ne servira à rien. Tu le connais, ne fais pas l'idiot. Je me fous que tu veuilles construire quelque chose avec elle, je me fous que tu puisses construire quelque chose avec elle, je me fous que tu me dises avoir besoin de moi pour construire quelque chose avec elle. Je me fous d'elle, et je préfère crever plutôt que d'accepter d'être le témoin d'une connerie aussi monumentale que celle-ci. Maintenant, je sais très bien que ça ne te fera en aucun changer d'avis, alors n'insiste pas, fais ce que tu veux et laisse-moi oublier ça.

      Il savait qu'il ne pourrait pas oublier, pas vraiment. Il savait juste qu'il pourrait éviter d'y penser, qu'il pourrait éviter d'y penser et faire comme si de rien n'était si Vasco ne le plantait pas face à la réalité, il savait qu'il pourrait éclipser partiellement ces pensées de son esprit s'il pensait à autre chose, s'il évitait d'y penser, il savait qu'il pourrait trouver un substitut d'oubli dans tout cet alcool qu'il buvait encore et toujours pour oublier, pour oublier et se sentir mieux, rien qu'un peu, rien qu'un tout petit peu mieux.

      - Je ne veux plus y penser.

      Ce serait tellement plus simple comme ça.
      Il ferma les yeux.
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    Message  Vasco Fair Jeu 31 Mar 2011 - 23:33

      Ce fut d’abord un court instant de stupeur que montra Oz : il avait tourné la tête vers son meilleur ami, celui-là même qu’il venait de rouer de coups, le regardant d’un air complètement scotché. Vasco lui rendit un regard d’une tristesse et d’une douceur incroyable : si jamais Oz n’avait pas bien compris le message – ce qui semblait impossible pour Vasco en vue du regard qu’il lui lançait –, il ne pouvait que le comprendre avec cela. Et puis d’un coup, avant que le musicien n’ait le temps de dire ou de faire quoi que ce soit de nouveau, Oz prit la parole et posa, brusquement, sa main sur la bouche de son meilleur ami. Meilleur ami qui ne comprit pas grand-chose : il n’avait pas le droit ? De quoi ? De lui dire tout ça ? Il le devait. Il le devait même s’il aurait peut-être préféré ne pas le faire, même s’il aurait peut-être été mieux pour Oz de rester baigné dans l’illusion. De le serrer dans ses bras alors qu’il lui faisait une telle annonce ? C’était la seule façon pour lui de lui faire comprendre sans utiliser les mots que ce n’était pas parce qu’il était fou amoureux d’Edryn qu’il le laisserait tomber, vu qu’Oz ne semblait pas faire suffisamment confiance dans les mots. De lui souffler tout l’amour qu’il éprouvait pour lui ? Il était pourtant nécessaire qu’il le sache, maintenant plus qu’avant encore. Vasco ne pouvait se permettre de le laisser douter, pas en pareille circonstance. La main qu’Oz avait plaquée sur sa bouche l’empêchait toute réponse, toute question, toute parole : il pouvait certes se libérer aisément, mais il savait très bien qu’Oz risquait de mal le prendre et, surtout, que c’était inutile. Si Oz lui avait posé la main sur la bouche c’était que Vasco devait se taire : le ton sur lequel il avait parlé allait en ce sens également. Vasco n’avait rien à dire : juste à écouter et à comprendre.

      Et puis Oz compléta ses paroles, les répétant à vrai dire à moitié… C’était donc ça… Pas le droit de partir. Oz lui interdisait de mourir. Il n’avait pas le droit de laisser Oz : à cet instant, brièvement, Vasco se rendit compte de l’importance incroyable qu’il avait prise dans la vie de son meilleur ami. Mais cet instant ne dura guère puisque la prise de conscience s’envola avec l’étreinte soudaine que lui fit son meilleur ami : ce n’était pas courant. Oz essayait généralement de se libérer ou se laissait faire d’un air blasé ou énervé. Mais quand il lui rendait son étreinte, c’était que des choses graves se déroulaient dans son esprit : et même alors qu’Oz lui faisait un mal de chien à l’agripper ainsi, appuyant par endroit sur les bleus naissants qu’il avait lui-même provoqués, Vasco ne fit que le serrer plus fort, le plus fort qu’il le pouvait, comme si cette étreinte pouvait guérir les blessures qu’Oz trainait à l’âme et que Vasco rêvait de faire cicatriser. Ce n’était pas une simple étreinte, non : Oz s’accrochait à lui comme il se serait accroché à la bouée de sauvetage qui lui permettrait de ne pas sombrer. Peut-être que sans Vasco, Oz aurait sombré dans le désespoir le plus total, plongeant dans un alcoolisme démesuré pour tenter vainement d’oublier les plaies qu’il devait supporter dans son âme. Et si, même avec Vasco, il continuait à boire, l’artiste espérait bien qu’Oz finirait par arrêter, le plus vite possible. Et surtout, qu’il devienne heureux. Avec ou sans lui. Vasco n’était pas idiot, bien qu’il oublie souvent ce fait : mais présentement, il prenait conscience de l’importance capitale qu’il avait pour Oz. C’était malsain. C’était terriblement malsain, d’autant plus que c’était réciproque. Cette interdépendance, moins visible du côté de Vasco mais non moins forte, allait finir par les détruire s’ils ne faisaient rien. En même temps, se séparer était se condamner à une mort certaine : ils étaient piégés. Quoi qu’ils fassent, ils allaient se faire du mal, encore et encore, comme il s’en faisait si souvent, involontairement : c’était comme ça et cela ne semblait pas vraiment prêt à changer. Il le faudrait pourtant, mais aucun d’eux deux ne pouvaient faire les transformations nécessaires pour assainir leur relation si profonde : aucun d’entre eux n’étaient prêt à faire tant de sacrifices, sachant qu’ils se détruiraient s’ils faisaient une chose pareille.

      Vasco serra donc Oz fort, tout aussi fort, peut-être même plus fort qu’Oz lui-même le faisait. Le gosse de riche lui faisait un mal de chien à le serrer si fort après l’avoir roué de coup, à lui faire ce câlin de brutes alors même que tout son corps le faisait souffrir, mais il s’en moquait, tout comme il se moquait des regards intrigués des passants qui n’avaient pas eu le courage de venir les séparer alors qu’ils se battaient et qui les voyait maintenant agrippés l’un à l’autre comme si leurs vies en dépendaient. Rien d’autre ne comptait que rassurer Oz. Non, il ne le laisserait pas : puisqu’Oz le souhaitait, il ne partirait pas. Il ne l’abandonnerait pas. Beaucoup de chose dans la vie du musicien dépendaient de son meilleur ami : sa présence sur Sannom, notamment. Si jamais les deux hommes se disputaient jusqu’à ne plus jamais vouloir se parler, ce qui était une des grandes craintes Vasconienne, le décoloré quitterait sûrement la ville. Il ne supporterait pas de voir encore son meilleur ami alors même qu’ils ne pourraient plus se parler, tout comme il ne supporterait pas de savoir qu’il souffrirait autant que lui de leur séparation alors même qu’ils ne pourraient se rejoindre. C’était l’un des pires scénarii que Vasco s’était créé depuis qu’il était sur Sannom. Une dispute monumentale avec Oz qui les forcerait à ne plus se voir, définitivement. Ni l’un ni l’autre ne le souhaitaient : Oz venait de le lui faire très clairement comprendre, et l’artiste avait tenté d’en faire de même peu avant, sans trop savoir si son message était bien passé. Il espérait bien que oui, craignait bien que non. Il ne comptait cependant pas trop insister : le jeune homme aux cheveux sombres finirait bien par se rendre compte de tout l’amour que Vasco ressentait à son égard – ou du moins, encore une fois, l’espérait-il. Il entendait battre fort le cœur de son meilleur ami, qui l’avait forcé à se baisser pour poser sa tempe contre la sienne : était-ce à cause des coups qu’il lui avait assénés peu avant ? Ou alors l’émotion, la peur que lui faisait alors Vasco ? Le soleil était désormais totalement recouvert par de sombres nuages : l’homme au bandeau se sentait terriblement triste pour cet autre homme qu’il aimait tant et à qui il venait probablement de gâcher la journée.

      S’il l’avait assurément rendu terriblement triste, Vasco était rassuré sur un point : Oz se calmait peu à peu. Oui, sa colère avait désenflée : rien ne disait qu’il ne repartirait pas de plus belle plus tard, mais, pour le moment, Oz s’était calmé. C’était là un véritable soulagement. Doucement, le gosse de riche finit par baisser les bras, l’air presque doux tant son attitude contrastait avec la violence précédente. Il posa son front sur l’épaule de Vasco, qui réagit alors presque par reflexe. Il relâcha légèrement son étreinte pour ne pas faire mal à Oz, de nouveau délicat, stoppant leur étreinte brutale en même temps qu’Oz, garda un bras autour de la taille de son ami alors que l’autre venait se poser dans les cheveux de son ami, délicatement, glissant ses doigts dans les mèches folles pour ensuite lui caresser les cheveux avec une douceur incroyable qui, il le savait, finirait de rassurer et de calmer Oz. Il commençait à en avoir franchement l’habitude : et s’il était épuisant de devoir faire face aux sautes d’humeur de cet homme qu’il aimait tant, il l’adorait trop pour lui en vouloir ou pousser un coup de gueule quelconque. Il l’aimait comme il était. Oz prit ensuite la parole d’un ton calme et plat : il avait raison. Il avait raison car Vasco connaissait parfaitement l’avis de l’homme aux yeux de jade sur la question : il n’était pas idiot et commençait à vraiment connaitre le plus jeune des fils Roland. Mais cela n’empêchait pas qu’Oz avait le droit de dire ce qu’il pensait de cette histoire. Il comptait trop pour avoir à se taire.


      Ainsi donc, Oz refusait clairement d’être son témoin et ne voulait plus entendre parler de cette histoire. Vasco prit donc une résolution plutôt intelligente : comme rien n’était encore vraiment officiel avec Edryn, il allait attendre un peu que leur relation s’établisse pour en reparler à Oz. Et pour lui proposer, une nouvelle fois, d’être son témoin. Car Vasco ne voulait pas d’autre témoin : et si Oz ne venait pas assister à son mariage, il se passerait donc de témoin. Il n’y avait qu’Oz qui avait droit à ce poste. Caressant toujours les cheveux de son ami, sa résolution prise très sérieusement et suivant pour une fois un raisonnement logique – car après tout et même s’il n’y pensait pas une seule seconde, trop optimiste pour cela, il se pouvait tout aussi bien qu’Edryn ne ressente jamais les mêmes sentiments que lui et que ce mariage ne se fasse jamais –, Vasco lui souffla donc, avec une douceur infinie, ce qu’Oz voulait entendre.

      « D’accord. »

      Puis, doucement, il le serra un peu plus fort. Ce n’était pas parce qu’il avait cédé qu’il allait laisser Oz tranquille, cependant : il était censé lui demander pourquoi il était si distant ces deniers temps, mais il n’en avait plus le droit. Plus maintenant, ou en tous cas pas dans l’immédiat. Il allait attendre un peu qu’Oz soit plus rassuré, plus tranquille pour l’interroger et prendre le risque de le voir s’énerver et le frapper à nouveau – il n’était plus à ça près pour aujourd’hui, à vrai dire.

      « Tu veux qu’on ailles quelques part, tous les deux ? Tu me manques. J’ai envie de passer du temps avec toi. »

      Subtile allusion aux absences répétées d’Oz, encore. Mais comme pour montrer qu’il n’insisterait pas, il lui souffla plus bas ces quelques mots :

      « Je t’aime comme un fou. »

      Et comme pour illustrer ses paroles, il déposa un doux baiser sur la tempe offerte de son meilleur ami.
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    Message  Oz Roland Dim 17 Avr 2011 - 22:17

      D'accord.

      Au son de ce simple mot, la tension encore présente dans les épaules d'Oz se détendit presque entièrement. Pas totalement, cependant, parce qu'il ne serait probablement pas tout à fait tranquille avant longtemps, mais elle se détendit tout de même. Vasco était d'accord, donc il arrêterait d'en parler. Ou tout du moins, il acceptait de ne plus en parler pour le moment. Oz n'était pas dupe, il savait pertinemment que l'affreuse histoire finirait tôt ou tard par être mise à nouveau sur le tapis – Vasco avait parlé de la femme de sa vie, après tout. Mais bon. Pour le moment, au moins, il pouvait fermer les yeux et se complaire dans l'illusion que le sujet ne serait plus jamais abordé, quand bien même il savait très bien au fond que cela ne serait pas le cas. Il sentit l'étreinte de Vasco se resserrer sensiblement, et il ne chercha pas à l'en empêcher. Il garda une main agrippée à la veste du blond, dans son dos, l'autre dans sa nuque, et il attendit, il attendit que les battements frénétiques de son cœur ralentissent la cadence, il attendit de reprendre le contrôle, il attendit que le calme revienne totalement. Il songea subitement à la cascade de coups qu'il avait administré à Vasco et à la douleur qu'ils avaient très certainement du occasionner, puis relâcha alors doucement sa prise. Il se sentit idiot, à se soucier ainsi d'un coup de la douleur et des bleus que le chanteur pouvait avoir alors que tout cela était signé de sa main, mais desserra tout de même son étreinte. Son vis-à-vis reprit la parole, sans le lâcher, pour lui demander s'il voulait qu'ils aillent tous les deux quelque part. Oswald ne répondit pas, pour la simple et bonne raison qu'il fut trop occupé à froncer les sourcils en entendant la suite. Ah ouais, il lui manquait ? Tiens donc. Il devait probablement dire ça pour recoller les morceaux, pour faire un peu mieux passer la pommade. Ce ne fut qu'en réfléchissant un peu plus qu'Oz songea à ses nombreuses absences du moment. Et il était vrai qu'en faisant toujours en sorte de partir très tôt de l'auberge pour ne revenir que très tard, il avait moins l'occasion de voir celui qu'il adorait et disait détester. Il n'avait évidemment pas touché un seul mot à personne des raisons qui le poussaient à s'éloigner de la sorte, et il ne comptait pas le faire. Mais de ce point de vue, les paroles de Vasco prenaient tout leur sens. Sauf que... non. Ça devait être autre chose. Le fait qu'il soit là ou non ne changeait rien, strictement rien.

      Le ton du blond se fit plus bas encore et Oz se raidit soudain. Ce n'était pas la première fois que Vasco disait l'aimer, mais il y avait des fois où il préférait faire comme s'il n'avait rien entendu. Là, il avait retrouvé son calme, il était las, il était tout contre Vasco, il entendait distinctement le souffle de ce dernier et il se détestait trop pour ne pas tiquer sur ces mots. L'aimer comme un fou... C'était tellement grotesque. Il n'acceptait pas qu'on puisse l'aimer. Personne ne pouvait l'aimer, de toutes façons. Pas lui. Il était trop... trop. On ne pouvait pas l'aimer. Il ne pouvait pas accepter qu'on l'aime. Il refusait qu'on l'aime. Vasco n'avait donc logiquement pas le droit. Il n'avait pas le droit de dire ça. Sauf que tout en pensant tout ça, Oz ne pouvait s'empêcher de se sentir comme rassuré, tout au fond de lui. Et cela le dégoûtait de s'en rendre compte. Il n'avait pas le droit, bordel. Il n'était que paradoxes et contradictions. Et il se détestait. Il fixa ses yeux couleur de jade sur sa main, longue et blanche, qu'il fit passer sur l'épaule de Vasco sans se presser avant de la laisser retomber lentement. Le contact de la veste en cuir sous ses doigts lui était familier. Il garda les sourcils froncés, resta pensif et immobile un instant, puis releva les yeux pour croiser furtivement le regard de Vasco. Il ne savait pas trop ce qu'il voulait lui faire comprendre par ce regard. Peut-être d'arrêter de dire des choses pareilles. Arrêter de l'aimer. Mais en même temps, il ne le voulait pas vraiment. Il ne savait pas. Il ne savait plus. Tout cela l'exaspérait. Finalement, il poussa un soupir. Ce genre de soupir qu'il poussait souvent, un soupir où perçait une légère pointe d'agacement mais aussi beaucoup de lassitude.

      - D'accord.

      Il répondait exactement ce que Vasco lui avait répondu précédemment, à ceci près que dans son cas, on sentait que l'assentiment lui était presque arraché à contrecœur. Il n'aimait jamais dire oui, généralement. Il préférait tout refuser par pur esprit de contradiction. Mais là, il était forcé d'avouer que Vasco aussi lui manquait. Et que même s'il était affreusement perturbé par la nouvelle que venait de lui apprendre le blond, qu'il se sentait comme trahi, il voulait tout de même passer encore un peu de temps avec lui. Alors oui, il voulait bien aller quelque part en sa compagnie. Il posa sa main à plat sur le torse de Vasco pour, d'une pression non-violente mais plutôt ferme, reculer et lui faire comprendre qu'il voulait se détacher. Non pas pour fuir ou partir en courant, comme l'idée lui était pourtant venue en premier lieu, mais juste parce qu'il ressentait le besoin de s'éloigner d'au moins un ou deux pas. Il se sentait si fatigué. Et il voulait à tout prix éviter de penser à tout ce qu'il s'était passé. Il recula donc d'un pas, puis d'un autre, et prit une inspiration en plissant légèrement les yeux lorsqu'il observa le ciel sombre et nuageux. Sentant son naturel sarcastique revenir au galop, il ne pu s'empêcher de faire ironiquement remarquer, posant à nouveau les yeux sur Vasco :

      - Je t'ai manqué mais ça ne t'a pas empêché de me gâcher la journée.

      Il ne lui pardonnerait pas facilement ce coup-là. Oh que non. Il refusait. Mais pour le moment... Pour le moment, non, il ne voulait pas y penser. Il était fatigué, et il voulait juste avoir Vasco avec lui. Il retint donc un soupir, détourna une nouvelle fois le regard, observa les passants sans les voir, arrangea machinalement un pan de sa veste légère, glissa une main dans la poche de son jeans sombre et se décida enfin à bouger, effectuant un pas en avant et tournant légèrement la tête du côté pour accrocher le regard du chanteur.

      - Viens.

      C'était bel et bien une injonction, mais le ton du gosse de riche n'était pas aussi naturellement autoritaire que d'habitude. Il voulait juste faire comprendre par là qu'il avait bien dit d'accord, que Vasco pouvait le suivre. Mais qu'il était hors de question de dire un mot de plus sur le sujet houleux qui avait provoqué la tempête.
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    Message  Vasco Fair Mar 24 Mai 2011 - 0:35

      Vasco raccrocha son regard à celui d’Oz après lui avoir offert ce tendre baiser. Le regard qu’il reçu lui déchira le cœur. C’était un regard qui disait non. Un regard qui disait non, ne m’aime pas. Mais en même temps, si, aime moi. J’ai besoin de ton amour. Parce que je suis seul, je me sens seul, et que j’ai envie de sentir qu’une personne, au moins une personne, est là pour moi, pour me protéger, pour me chérir, pour m’aimer. Mais je ne devrais pas le vouloir. Je n’ai pas le droit de recevoir ton amour. Je ne le mérite pas. Tu devrais aimer les autres et me laisser. Je n’ai pas le droit. Je n’ai pas le droit d’être aimé, tout simplement. Vasco aurait pourtant dû le prévoir : il avait senti Oz se raidir après ses mots, alors même qu’il déposait ce baiser sur sa tempe. Il avait bien remarqué cette main qui quittait son épaule. Il avait tout noté, tous ces signaux qui le prévenaient du brusque changement d’attitude d’Oz : et pourtant, ça lui faisait toujours autant de peine. D’autant plus qu’il n’arrivait vraiment pas à comprendre pourquoi Oz semblait penser cela, comment il pouvait se dévaluer à ce point. Aux yeux de Vasco, tout le monde avait le droit d’être aimé, sans exception. Même la personne qu’il haïssait le plus au monde. Car plus qu’un droit, c’était un besoin : c’était l’amour qui pulsait au fond de son cœur, l’amour qui était sa seule vraie motivation dans la vie. Oh, il y avait la musique, oui : mais elle naissait avec l’amour. Et Oz, lui… Oz semblait plutôt rejeter l’amour de toutes les forces de son esprit, comme s’il ne pensait pas en avoir besoin, comme s’il pensait pouvoir vivre sans, sans connaître le moindre problème : et tout ça parce qu’il ne pensait pas mériter l’amour des autres, pour une raison qui était totalement inconnue à Vasco. On ne devait, ne pouvait pas aimer Oswald Roland au nom d’un mystérieux motif. Et là où l’artiste vénérait l’amour, son ami crachait dessus. Ils étaient parfaitement, diamétralement opposés. L’or, et l’ébène.

      D’accord. Oz lui concédait un d’accord. Le fait lui-même était rare : les trois quarts du temps, Vasco était confronté à un refus de la part de son meilleur ami. Parfois, agacé, Vasco se demandait presque si Oz ne lui disait pas systématiquement non par pur plaisir de le contredire, juste pour l’énerver. Mais là, il avait dit d’accord. Vasco en était heureux. Oz voulait donc bien passer un peu de temps avec lui. L’annonce terrible qu’il venait de faire n’avait pas tout fait explosé. Leur amitié, si elle n’était pas intacte – l’avait-elle été seulement un jour ? – était toujours aussi forte. Peut-être même plus forte encore ? Vasco avait enfin réussi à prendre conscience de son importance pour Oz. Peut-être bien qu’il perdrait confiance une fois qu’il serait confronté à un énième refus, mais cette conversation sur le port resterait longtemps à l’esprit de Vasco. Oz n’avait, de toute évidence, aucune envie de voir Vasco se marier. Et si son refus d’être son témoin, son refus de cet hypothétique mariage qui prenait des allures de projets concrets dans l’esprit de Vasco, semblait catégorique, ce dernier était bien décidé à tout faire pour faire changer d’avis son meilleur ami. Tout tant que ça ne briserait rien entre eux, bien évidemment. Il ne supporterait pas de perdre Oz. Tout comme Oz ne supporterait pas de le perdre. Quoi qu’ils disent, quoi qu’ils fassent, leurs destins étaient liés : leur relation terriblement malsaine prenait une ampleur folle dans leur vie et leur imposait de nombreuses restrictions. Ainsi, déménager était exclu si c’était sans l’autre. Avoir une petite amie sans l’accord d’Oz semblait inenvisageable pour Vasco : l’inverse était bien entendu faux, Vasco ayant un caractère beaucoup plus facile que le jeune homme aux cheveux noirs – ou du moins n’était-il pas aussi maladivement possessif et jaloux. Et pourtant, il allait se battre : pour Edryn, pour ce mariage, il se battrait. Tout comme il se battrait contre Edryn pour conserver sa relation avec Oz telle quelle, pour ne surtout rien changer à leur amitié si étrange et si profonde. Pour rien au monde il ne la modifierait et ce, même si Oz n’était pas apte à le voir.

      Oz le repoussa après lui avoir donné son accord. Cependant, son geste était dénué de toute violence. Et c’était bien pour cela que Vasco le lâcha. Oz s’était calmé, cela ne faisait aucun doute : ce devait être épuisant de faire de telles explosions de colères, de frapper et d’hurler si fort. Si Vasco ne s’en fit pas la réflexion, trop occupé à mourir d’inquiétude pour son pauvre ami qu’il avait décidément trop choqué avec son annonce qu’il avait pourtant tentée de faire la plus douce possible, il souffrait encore des coups qu’Oz lui avait infligés plus tôt. Il aurait mal des jours et des jours : c’était son lot quotidien, il ne s’en plaignait pas. Masochiste ? Non, juste trop aimant. Cette fois, Oz y était allé si fort que Vasco se demanda même, brièvement, si tout les bleus qui devaient déjà se former auraient fini de lui faire mal une semaine plus tard. Se penchant après avoir reculé de quelque pas pour récupérer sa guitare, il se retint de grimacer sous les effets de la douleur qu’endurait son corps meurtri. Il était inutile d’inquiéter inutilement Oz. Car au-delà des apparences, Oz s’inquièterait si jamais Vasco souffrait trop à cause de lui : et même s’il le cachait totalement, à cet instant précis, Vasco l’avait compris. Une réplique acerbe accompagna la récupération de cette si précieuse guitare aux yeux de Vasco, et le remords l’emplit. Oui, il avait définitivement causé du tort à Oz. Il lui avait fait passer une journée horrible, une crise de colère épuisante. Et il s’en voulait pour ça. Mais il n’avait pas le choix : s’il ne l’avait pas fait, les conséquences auraient pu être plus graves encore. Vasco n’en était pas moins profondément malheureux pour cet ami si cher qu’était Oz à ses yeux : si seulement il pouvait faire quelque chose… Mais non, seulement ne plus en parler, se taire jusqu’à ce que le projet se concrétise et qu’une nouvelle crise éclate. A moins qu’Oz ait changé d’ici là, mais à vrai dire, Vasco ne le souhaitait pas. Il aimait ce chieur égocentrique et ultra possessif comme il était.

      Viens. Ce n’était pas vraiment un ordre, pas vraiment de la façon habituelle du gosse de riche. Oh, si l’injonction était bien là, Vasco sentait clairement autre chose : c’était comme un supplément à son accord. Car après le reproche, l’artiste n’avait pas bougé : regardant son ami se retourner pour avancer, balloté dans un sens puis dans l’autre, il n’était pas bien sûr de la conduite à adopter. Oh, s’il s’était écouté, et seulement lui, il aurait bien entendu immédiatement foncé à la suite d’Oz, l’étouffant d’un câlin au passage : mais il était bien plus à l’écoute d’Oz que de lui-même, en cet instant. Ainsi, il fut soulagé d’entendre ce qui était pourtant bel et bien un ordre. Doucement, un petit sourire sur les lèvres, il rejoignit Oz, guitare à l’épaule et écharpe abandonnée. Toujours délicat, quoi que non dénué d’une certaine fermeté, il glissa un bras autour des épaules d’Oz : et si celui-ci fit un mouvement pour se dégager, sa résistance resta faible et Vasco tint bon. Seule ombre au tableau, Oz, décidément marqué par l’annonce, n’avait pas glissé son bras dans le dos de Vasco comme il lui arrivait de le faire parfois. Ce n’était pas dramatique. Il ferait avec. Ainsi, continuant d’avancer, Vasco engagea une conversation somme toute banale, savourant le retour à la normale de la situation.


      « Au fait, tu vois Jim bientôt ? Non parce qu’il faudrait que je lui parle, ça fait longtemps. J’ai pensé à aller m’incruster dans l’académie mais je suis bien trop vieux pour passer pour un élève, c’est désespérant. Je suis trop vieux pour tout. Vieux, vieux, vieux. Même si tu dis que non, je le sais, c’est juste pour pas me vexer, oh que tu es chou. Bref, faudrait que je vois Jim, il me manque ce gosse. Oh et au fait, si j’ai de la chance je devrais réussir à économiser assez pour me payer une salle un soir ! C’est une idée qui m’est venue comme ça, ce serait chouette, non ? Faudrait juste rameuter du monde. Et puis niveau fric c’est pas gagné non plus, j’ai du mal à épargner en ce moment. M’enfin, je verrais bien !... »

      Le calme après la tempête.

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