Serait-ce la fin?

Kai était là, à deux doigt de sauter dans le vide. Vide si sombre, froid, glacé. Il allait sauter. Il le faisait. Il l'aurait fait s'il n'avait pas entendu ces bruits. Il l'aurait fait si elle l'avait oublié. Il le faisait si elle n'était pas là.
Nàrië. Toujours aussi belle. Toujours. Elle le fixait. De son regard, qu'il aimait tant. Froid, Mysterieux, tout simplement beau. Beau tout comme elle. Elle qui disparut.
Le séparant du vide dans lequel il aurait du plonger, elle réapparut. Ses bras écartés, comme pour stopper quelque chose. Mais quoi? Kai. Peut-être. Mais il ne faisait rien de mal. Vouloir aller quelque part c'est faire quelque chose de mal? Non. Il ne semblait pas.
Il regarda par dessous l'épaule de Nàrië. Il le vit. Ce noir. Ce noir attirant dont l'envie d'y pénétrer n'était égale à rien d'autre. Son relent glacial. Ses appels enivrants. Sa couleur d'ébene.

- Fais pas ça...Si tu sautes, je saute aussi !

Kai regarda Nàrië. Pourquoi ne le laissait-elle pas faire? Peut-être qu'elle ne voulait pas avoir de morts sur le dos. Oui, peut-être. Ou autre chose.
Kai sourit. Il était impassible. Toujours. Comme d'habitude.
Kai écoutait le néant. Il l'appellait. Sa voix amère. Froide. Si attirante. Kai leva les yeux. Ce ciel béant, déchiré par les nuages. Il allait être spectateur. Spectateur d'un bien beau numéro. Il voulait se donner à la mort comme il s'était donné à la vie. Son âme allait dormir. Enfin. Du repos. A jamais. Du repos. Toujours. Du repos. Il ne voulait que cela.

-S'il te plait...

La voix de Nàrië était implorante. Décidée. Vraie. Kai baissa à nouveau le regard sur Nàrië. Pourquoi restait-elle là? Il devait mourir, car elle ne l'aimait plus. Elle devait vivre, car il l'aimait. C'était ça la vérité. C'était ça, la différence. Il l'aimait à en mourir. La preuve. Il allait se jeter dans le vivre. Laisser son corps aux ténèbres. Car elle ne l'aimait plus. La voir. Il ne pourrait plus. La voir ne plus l'aimer. Ce serait impossible. Il ne le supporterait pas. Ce serait une douleur attroce. La pire. La pire qu'il n'ait jamais du supporter.
Kai se décala. Ca y était de nouveau. Le vide. Face à lui. Rien pour l'empêcher d'aller à sa rencontre. Il ressentit à nouveau ce souffle putride. Cette ombre si attrayante. Cette envie impossible.
Nàrië bougea. Elle voulut se rapprocher. Elle voulut seulement. Elle bascula dans le néant. Ses pieds battants dans le vide. Sa vie ne tenait plus qu'à un fil. Comme Nàrië tenait à une gouttière.
Kai se sentit humilié. C'était lui qui voulait y aller. Là-bas. Pas Nàrië. Et pourtant, c'était elle qui y avait basculé. Elle ne voulait pas y aller. C'était Kai qui en avait envie. Lui, pas Elle. Pas Elle, Lui.
Kai devait aider Nàrië. Mais comment? De nombreuses réponses et idées trouvèrent son cerveau. Aucune. Aucune, Kai n'en voulait aucune. Kai hochait la tête négativement. Il faisait ce geste déplacé alors que Nàrië naviguait. Retenue seulement par ses mains, dans le gouffre glacé. Mais Kai choisirait la sienne. Sa solution. Celle qui irait le mieux.
Des souvenirs jaillirent. Ces souvenirs. Avec Nàrië. Maudits. Blessants. Sur ce toit. Des baisers. Des mots doux. Dans la forêt. Tenue par la hanche. Tenue par la main. Sur la plage. Une bataille. Kinaï. Du sang. Nàrië, blessée. Non, pas encore. Plus jamais!
Kai s'accroupit hativement, en faisant bien attention à ne pas tomber. Il saisit l'avant-bras de Nàrië, la tira avec lui, dans ses bras. Il retira les cheveux qui cachaient son beau visage, et l'embrassa fougueusement. Il se fichait de savoir si elle l'aimait encore. Lui, il l'aimait. Comme un fou. A en mourir. Kai voulut remonter sur des tuiles plus sures, et rentrer dans l'Académie par la suite. Mais il voulut, juste. Car il glissa, à nouveau, à son tour, Nàrië dans ses bras.
Dieu avait-il choisi qu'il y aurait une fin, ce soir-là?

Nàrië est blessée.
Kai se répete ses mots doucement. Il parait fou. Mais il ne l'est pas. Il est juste inquiet. Amoureux. Juste cela.
Nàrië se détache de Kai. Il la regarde. Elle est blessée. Elle est épuisée. Mais elle se lève. Elle marche. Kai a peur. Il a envie de vomir. Il ne comprend plus rien. Si, deux choses, non. Trois. Il l'aime. Elle est blessée. Elle perd du sang.
Nàrië arrache une partie de ses vêtements. Elle panse la blessure. La serre.
Bientôt, le sang arrêtera de couler. Bientôt, Nàrië n'aura plus de sang qui pourra couler. Bientôt, peut-être que tout s'arrêtera.
Kai plonge son visage dans ses mains. Il va vomir. Il a froid. Il tremble. Il a chaud. Il est mal.
Kai détache ses mains maintenant humides. Et rouges. Ensanglantées. Du sang de Nàrië. Il les dévisage. Ces mains. Elle souffrent. Ses mains. Elles ont tenu celles de Nàrië. Elles souffrent. Kai les entendrait presque.
Nàrië se rapproche de lui. Il l'aime. C'est fou comme il l'aime. C'est beau comme il l'aime. Il la désire, du plus profond de lui. Nàrië.
Elle dégage son visage des mèches plaquées sur celui-ci. Il la voit mieux. Tout d'un coup. Il la voit sourire. Quel beau sourire...
Il veut l'embrasser. Mais si elle ne veut pas, cela ne sert à rien. Elle ne l'aime plus. Il l'aime. C'est là la différence. Le gouffre qu'il y a entre eux. Un gouffre ni noir ni blanc. Un gouffre, gris.
Kai passe ses mains sur la nuque à Nàrië. Il les remonte. Caressant longuement les cheveux de la jeune fille. Il rapproche sa tête. Leurs fronts se touchent. Kai est content. Elle le laisse faire. Pour l'instant.

Son regard me fuyait, comme un oiseau fuyant le tempête...
Il semblait perdu...perdu dans ses dilemmes. Il restait figé, immobile. C'était comme si geste qu'il venait de faire envers moi n'avait été qu'une illusion, un rêve... Je n'y comprenais plus rien. Etait-ce bien lui qui m'avait embrassé à l'instant, avant de tomber ?
J'en perdais le nord...

*Tu te berçes d'illusions depuis le début...
C'est faux...Kai ne sait plus où il en est...
Ne vois-tu pas qu'il te rejette ?!
C'est son coeur qui est blessé...
Gifle-le !
Embrasse-le...*

Ces voix se bousculaient dans mon esprit, s'acharnant comme des corbeaux autour d'un morceau de choix.
Je l'aimais mais lui ? Je le sentais déçu, blessé. Nous nous comprenions sans même se parler...avant... A cause d'une simple fuite, il avait cru à un amour qui avait sa fin. Pourquoi ? Je ne savais plus quoi faire...plus quoi penser...
Je me rapprochais du feu, contemplant la danse de ces flammes si vives.

- Je t'aimais Kai...je t'aime encore, malgré ce qui c'est passé...et je crois que je t'aimerais encore lontemps...

Je le fixais. Il restait là, immobile, silencieux... L'avais-je dis trop tard ?

Je ne pouvais décrire ce que je ressentais. De l'amour. Du désespoir. De l'envie. Elle m'avait vu détourner le regard du sien, et ne semblait pas comprendre.
Avait-elle choisi de me faire souffrir autant? Sans cesse. Non, c'était absolument impossible. Et impensable. Nàrië n'était pas comme ça. Elle me respectait. Elle m'avait toujours respecté.
Nàrië semblait perdue dans ses pensées. Mais à quoi pensait-elle. Seulement.
Elle le blessait encore. Sans même le savoir. Elle était là, si près. Il se sentait blessé, meurtri, brulant.
Alors qu'elle refléchissait, j'enlevai ma chemise trempée, dégoulinante d'eau mêlée parfois à du sang. Je la posai sur la table où je m'étais assis, à mes côtés. Sur mon torse nu, je remarquai enfin les quelques morceaux de verre qui avaient transpercé ma chemise, entaillant ma peau. Je les ôtai comme je pouvais. J'évitai de me faire mal. Mais c'était difficile.
J'arrêtai, alors, me disait que j'irais à l'infirmerie après, pour prendre une pince à épiler.
Nàrië me regarda. Cette fois-ci, je n'évitais pas son regard si envoutant. Elle était sortie de ses pensées, et se rapprocha de moi. Elle susura mon espèrance.

- Je t'aimais Kai...je t'aime encore, malgré ce qui c'est passé...et je crois que je t'aimerais encore lontemps...

Je restai là, bouche bée. Qu'avait-elle dit? Avais-je rêvé? Oui, surement, elle délirait, je délirais... Ce n'était pas possible.
Elle m'avait renié. Elle s'était enfuie. Elle m'avait fait comprendre que c'était fini. Je me serais trompé?
Je sourit. Ma tête me lançait. J'avais eu tort sur tout. J'avais failli me tuer pour rien. Car j'avais faux partout. Elle m'aimait encore. Nàrië m'aimait encore. Je n'aurais jamais pu le croire si elle ne l'avait pas dit elle-même.
Une larme passa sur ma joue. Elle n'eut pas le temps de finir sa course que je l'avais déjà supprimée. Une larme de joie. Dans l'espace d'un instant, j'eu le temps de faire trois choses.

-Moi aussi, ça tombe bien.

Je posai mes lèvres sur celles de Nàrië. Je n'étais vraiment pas doué. Comment faisait-elle pour me supporter aussi bien?
Je ne pus me retenir à un simple baiser, et je continuai à embrasser Nàrië langoureusement. Mes mains se déplacaient sensuellement dans le dos de la jeune fille. Jamais je n'aurai cru vraiment que tout repartirai de zéro, ou plutôt, de un.

[Ce n'est pas assez long! xD]

Nàrië se détacha de lui, et remarqua les morceaux de verres plantés dans son torse. Il n'avait pas réussi à les enlever rapidement. Peut-être qu'elle y arriverait, elle. Ses doigts plus minces et plus agiles seraient plus pratique que ceux de Kai.
Nàrië hocha négativement la tête. Pourquoi? Peut-être n'y avait-il rien à y comprendre. Aussi, Kai oublia rapidement ce geste, car la jeune fille venait de lui poser une question.

- J'espère pour toi que tu n'est pas trop...douillet ?!

Kai sourit. Il embrassa de nouveau la belle. Pour rattraper les heures perdues, peut-être. Ou tout simplement parce que l'envie et le désir surpassaient la douleur et autres. Ensuite, Kai sussura à l'oreille de Nàrië une réponse aussi ironique que la question qu'elle avait posée.

-Vas-y doucement, je serre les dents!

Kai rit un peu. Il se voyait dire autre chose d'un peu plus familier, voire vulgaire, si son interlocutrice avait été une vieille. Mais il ne savait pas comment aurait pu réagir Nàrië. Peut-être elle aussi aurait été choquée. Après tout, elle ne connaissait peut-être pas le jeune Kai. S'il avait été avec des potes de son village, ce dernier n'aurait pas hésiter à remplacer les mots.

-Nan, mais tu parles à un homme là! Tu crois pas que je vais pleurnicher pour cela aussi.

Kai avait manqué d'exploser de rire. Il avait pris un ton imposant. S'il n'était certes pas encore un 'homme' et loin de là, il était un jeune un peu fou. Comme tout les autres. Peu bavard, car son passé ne lui permettrait pas, mais un peu dingue sur les bords.

Nàrië sembla éviter de rire. Dalavirienne jusqu'au bout des doigts. Peut-être que Kai ne la verrait jamais rire vraiment. Magré tout, elle lui sourit. Certes ironiquement, mais un sourire est un sourire.

-Ah bon ? Je pensais plutôt avoir affaire à un grand gamin...

Kai ne voulut rien répondre à cela, et se contenta de sourire à son tour.
Il observa attentivement les faits et gestes de Nàrië; qui approchait ses doigts d'un débri de fenêtre, qui s'était enfoncé dans le torse du garçon, près des abdominos. Elle releva son regard brillant vers Kai, qui écouta en rigolant ce qu'elle disait.

-Si tu bouges je ne promets pas que ce sera sans douleur mais bon...puisque tu es un homme...

Kai ne dit rien de plus, à cette phrase remplie de moquerie discrète, que Kai aimait bien. Nàrië arracha le morceau de verre au corps du garçon, qui frissona sur le coup. Elle jeta le débri par dessus son épaule, et déchira un morceau de son sous-pull pour essuyer le sang qui commencer à couler de la plaie. Ensuite, elle s'empressa de recommencer cela pour les six autres morceaux plantés plus ou moins profondément sous la peau du garçon, qui frissona à chaque fois. Il ne semblait pas souffrir autant que cela, mais il n'aimait pas cette sensation. Ensuite, Nàrië le fit retourner, et il s'exécuta. Elle enleva les quelques bouts de verre qui se trouvaient là, entre les os et les muscles. Ensuite, elle balança le tissu ensanglanté dans le feu qui reposait dans la cheminée.
Kai se tourna pour se trouver face à elle. Elle le fixa d'un air rieur, avant de lançer:

-Mossieur est-il satisfait ? Parce que le boulot d'infirmière, çe n'est pas trop mon truc...

Kai sourit. Il était ravi d'avoir eu une infirmière particulière pour ce dur labeur. N'importe quel garçon aurait été heureux, pourquoi ne le serait-il pas. Surtout quand cette infirmière était sa petite amie.

-C'était parfait.

Il avait dit cela avec un sourire indescriptible, qui pouvait paraitre étrange. Il savourait du regard Nàrië, avant de la prendre dans ses bras, de la soulever, et de la poser sur une table, lui par-dessus. Il l'embrassa passionément. C'était fou comme il l'aimait, et surtout... la désirait. Couché par dessus la jeune fille, elle pouvait ne pas apprécier, et le repousser. Mais il n'espèrait pas cela.